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Apostolat des Laïcs - Vocation et Mission des Laïcs dans l'Eglise et dans le Monde

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Apostolat des Laïcs - Vocation et Mission des Laïcs dans l'Eglise et dans le Monde Empty Apostolat des Laïcs - Vocation et Mission des Laïcs dans l'Eglise et dans le Monde

Message par Her Dim 3 Avr - 21:19

EXHORTATION APOSTOLIQUE
POST-SYNODALE
CHRISTIFIDELES LAICI
DE SA SAINTETE LE PAPE
JEAN-PAUL II
SUR LA VOCATION
ET LA MISSION DES LAÏCS
DANS L'EGLISE ET DANS LE MONDE

Donné à Rome, près de Saint-Pierre, le 30 Décembre 1988, en la fête de la Sainte Famille de Jésus, Marie et Joseph.


Aux Evêques
Aux prêtres et aux diacres
Aux religieux et religieuses
A tous les fidèles laïcs

INTRODUCTION

1. LES FIDÈLES LAÏCS (Christifideles laici), dont la «vocation et la mission dans l'Eglise et dans le monde vingt ans après le Concile Vatican II» a été le thème de l'assemblée générale du Synode des Evêques en 1987, appartiennent au Peuple de Dieu, représenté par les ouvriers de la vigne, dont parle Saint Matthieu dans son Evangile: «Le royaume des cieux est comparable au maître d'un domaine qui sortit au petit jour afin d'embaucher des ouvriers pour sa vigne. Il se mit d'accord avec eux sur un salaire d'une pièce d'argent pour toute la journée et il les envoya à sa vigne» (Mt 20, 1-2).

La parabole évangélique met sous nos yeux l'immense vigne du Seigneur, et la foule des personnes, hommes et femmes, qu'Il appelle et qu'Il envoie y travailler. La vigne, c'est le monde entier (cf. Mt 13, 38), qui doit être transformé selon le dessein de Dieu, en vue de l'avènement définitif du Royaume de Dieu.

Allez, vous aussi, à ma vigne

2. «Sorti vers neuf heures, il en vit d'autres qui étaient là, sur la place, sans travail. Il leur dit: "Allez, vous aussi, à ma vigne"» (Mt 20, 3-4).

L'appel du Seigneur Jésus ne cesse de se faire entendre depuis ce jour lointain de notre histoire: il s'adresse à tout homme venu en ce monde.

De nos jours, dans une effusion renouvelée de l'Esprit de la Pentecôte, arrivée avec le Concile Vatican II, l'Eglise a vu mûrir en elle un sentiment plus vif de son caractère missionnaire et, dans un mouvement d'obéissance généreuse, elle a de nouveau écouté la voix du Seigneur qui l'envoie dans le monde comme «le sacrement universel du salut»(1).

Allez, vous aussi. L'appel ne s'adresse pas seulement aux Pasteurs, aux prêtres, aux religieux et aux religieuses; il s'étend à tous: les fidèles laïcs, eux aussi, sont appelés personnellement par le Seigneur, de qui ils reçoivent une mission pour l'Eglise et pour le monde. Saint Grégoire le Grand le rappelle, lorsque, prêchant au peuple chrétien, il commente la parabole des ouvriers de la vigne: «Examinez donc un peu, mes frères, votre mode de vie, et vérifiez bien si déjà vous êtes des ouvriers du Seigneur. Que chacun juge ce qu'il fait et se rende compte s'il travaille dans la vigne du Seigneur»(2).

Fort de son inestimable patrimoine doctrinal, spirituel et pastoral, le Concile a écrit des pages vraiment merveilleuses sur la nature, la dignité, la spiritualité, la mission, la responsabilité des fidèles laïcs. Et les Pères conciliaires, en écho à l'appel du Christ, ont appelé tous les fidèles laïcs, hommes et femmes, à travailler à sa vigne: «Le Saint Concile adjure avec force au nom du Seigneur tous les laïcs de répondre volontiers, avec élan et générosité, à l'appel du Christ qui, en ce moment même, les invite avec plus d'insistance, et à l'impulsion de l'Esprit Saint. Que les jeunes réalisent bien que cet appel s'adresse très particulièrement à eux, qu'ils le reçoivent avec joie et de grand coeur. C'est le Seigneur Lui-même qui, par le Concile, presse à nouveau tous les laïcs de s'unir plus intimement à Lui de jour en jour et de prendre à coeur ses intérêts comme leur propre affaire (cf. Ph 2, 5), de s'associer à sa mission de Sauveur; Il les envoie encore une fois en toute ville et en tout lieu où Il doit aller Lui-même (cf. Lc 10, 1)»(3).

Allez, vous aussi, à ma vigne. Ces paroles ont aussi résonné spirituellement pendant tout le déroulement du Synode des Evêques, qui s'est tenu à Rome du ler au 30 octobre 1987. Reprenant les pistes du Concile et éclairés par les expériences personnelles et communautaires de toute l'Eglise, les Pères, riches en outre de l'apport des Synodes précédents, ont étudié, de façon approfondie, «la vocation et la mission des laïcs dans l'Eglise et le monde, vingt ans après le Concile Vatican II».

Cette Assemblée comprenait des représentants qualifiés des fidèles laïcs, hommes et femmes, qui ont apporté une contribution précieuse aux travaux du Synode. L'homélie de clôture l'a explicitement reconnu: «Nous remercions le Seigneur de ce que, au cours de ce Synode, nous avons pu avoir non seulement la joie de la participation des laïcs (auditeurs et auditrices), mais plus encore de ce que le déroulement des discussions nous a permis d'entendre la voix des invités, les représentants du laïcat provenant de toutes les parties du monde, de différents pays. Cela nous a permis de profiter de leurs expériences, de leurs conseils et de leurs suggestions inspirés par leur amour pour la cause commune»(4).

Le regard fixé sur l'après-Concile, les Pères synodaux ont pu constater de quelle façon l'Esprit a continué de rajeunir l'Eglise, en suscitant en elle de nouvelles énergies de sainteté avec la participation de nombreux fidèles laïcs. Nous en trouvons un témoignage, entre autres, dans le nouveau style de collaboration entre prêtres, religieux et fidèles laïcs; dans la participation active à la liturgie, à l'annonce de la parole de Dieu, à la catéchèse; dans les multiples services et tâches confiés aux fidèles laïcs, qui les ont si bien assurés; dans la floraison vigoureuse de groupes, d'associations, de mouvements de spiritualité et d'engagement; dans la participation plus large et plus marquée des femmes à la vie de l'Eglise et au développement de la société.

Dans le même temps, le Synode ne manquait pas de noter que le chemin post-conciliaire des fidèles laïcs n'a pas été sans difficultés ni dangers. Dans le concret, on peut rappeler deux tentations auxquelles ils n'ont pas toujours su échapper: la tentation de se consacrer avec un si vif intérêt aux services et aux tâches d'Eglise, qu'ils en arrivent parfois à se désengager pratiquement de leurs responsabilités spécifiques au plan professionnel, social, économique, culturel et politique; et, en sens inverse, la tentation de légitimer l'injustifiable séparation entre la foi et la vie, entre l'accueil de l'Evangile et l'action concrète dans les domaines temporels et terrestres les plus divers.

Au cours de ses travaux, le Synode a fait sans cesse référence au Concile Vatican II, dont l'enseignement touchant le laïcat, à vingt ans de distance, a paru d'une actualité surprenante, et parfois d'une portée prophétique: un tel enseignement est capable d'éclairer et d'inspirer les réponses qui doivent être données aujourd'hui aux nouveaux problèmes. En vérité, le défi que les Pères synodaux ont relevé a été celui de bien tracer les routes précises afin que la splendide «théorie» sur le laïcat, formulée par le Concile, puisse devenir une authentique «pratique» ecclésiale. D'un autre côté, certains problèmes s'imposent par un certain caractère de «nouveauté»; au point qu'on peut les qualifier de post-conciliaires, au moins dans un sens chronologique: à ces problèmes, les Pères ont à juste titre réservé une attention toute spéciale au cours de leurs discussions et réflexions. Parmi ces problèmes, il faut mentionner ceux qui concernent les ministères et les services ecclésiaux confiés déjà ou qui seront à confier à des fidèles laïcs, la diffusion et la croissance de nouveaux «mouvements» à côté d'autres formes d'associations de laïcs, la place et le rôle de la femme autant dans l'Eglise que dans la société.

Au terme de leurs travaux menés avec zèle, compétence et générosité, les Pères du Synode m'ont manifesté leur désir et leur souhait qu'en temps opportun, je présente à l'Eglise universelle un document de conclusion sur le laïcat chrétien(5).

Cette Exhortation Apostolique Post-synodale veut donc faire ressortir toute la valeur des travaux du Synode, depuis les Lineamenta jusqu'à l'Instrumentum laboris, depuis la relation d'introduction jusqu'aux interventions de chacun des évêques et des laïcs et jusqu'au rapport de synthèse après la discussion en assemblée, depuis les discussions et les relations des «circuli minores» jusqu'aux «propositiones» et au Message final. Le présent document ne se situe donc pas en marge du Synode; il en constitue au contraire l'expression à la fois cohérente et fidèle; il est le fruit d'un travail collégial, dont la dernière étape a été la rédaction d'un exposé à laquelle ont contribué le Conseil du Secrétariat Général du Synode et le Secrétariat lui-même.

Susciter et alimenter une prise de conscience plus nette du don et de la responsabilité que tous les fidèles laïcs ont dans la communion et la mission de l'Eglise, tel est le but de notre Exhortation.

Les urgences actuelles du monde:
pourquoi donc restez-vous là,
toute la journée, à ne rien faire?

3. Le sens fondamental de ce Synode, et donc son fruit le plus précieux et désiré, c'est de porter les fidèles laïcs à écouter le Christ qui les appelle à travailler à sa vigne et à prendre une part très vive, consciente et responsable à la mission de l'Eglise, en ce moment magnifique et dramatique de l'histoire, dans l'imminence du troisième millénaire.

Des situations nouvelles, dans l'Eglise comme dans le monde, dans les réalités sociales, économiques, politiques et culturelles, exigent aujourd'hui, de façon toute particulière, l'action des fidèles laïcs. S'il a toujours été inadmissible de s'en désintéresser, présentement c'est plus répréhensible que jamais. Il n'est permis à personne de rester à ne rien faire.

Revenons à la lecture de la parabole évangélique: «Vers cinq heures, il sortit encore, en trouva d'autres qui étaient là et leur dit: "Pour quoi êtes-vous restés là, toute la journée, à ne rien faire?". Ils lui répondirent: "Parce que personne ne nous a embauchés". Il leur dit: "Allez, vous aussi, à ma vigne"» (Mt 20, 6-7).

Il n'y a pas de place pour l'inaction, lorsque tant de travail nous attend tous dans la vigne du Seigneur. Le «maître du domaine» répète avec plus d'insistance encore: «Allez, vous aussi, à ma vigne».

La voix du Seigneur résonne certainement en chaque chrétien, au plus profond de son être. Chacun, en effet, est configuré au Christ par la foi et les sacrements de l'initiation chrétienne, est inséré comme un membre vivant dans l'Eglise, et est sujet actif de sa mission de salut. La voix du Seigneur se transmet aussi à travers les événements de l'histoire de l'Eglise et de l'humanité, comme nous le rappele le Concile: «Mû par la foi, se sachant conduit par l'Esprit du Seigneur qui remplit l'univers, le Peuple de Dieu s'efforce de discerner dans les événements, les exigences et les aspirations de notre temps, auxquels il participe avec les autres hommes, quels sont les signes véritables de la présence ou du dessein de Dieu. La foi, en effet, éclaire toutes choses d'une lumière nouvelle et nous fait connaître la volonté divine sur la vocation intégrale de l'homme, orientant ainsi l'esprit vers des solutions pleinement humaines»(6).

Il faut donc regarder en face ce monde qui est le nôtre, avec ses valeurs et ses problèmes, ses soucis et ses espoirs, ses conquêtes et ses échecs: un monde dont les conditions économiques, sociales, politiques et culturelles présentent des problèmes et des difficultés encore plus graves que celles décrites par le Concile dans la Constitution pastorale Gaudium et spes(7). De toute manière, c'est là la vigne, c'est là le terrain sur lequel les fidèles laïcs sont appelés à vivre leur mission. Jésus veut pour eux, comme pour tous ses disciples, qu'ils soient le sel de la terre et la lumière du monde (cf. Mt 5, 13-14).

Mais quel est donc le visage actuel de la «terre» et du «monde», dont les chrétiens doivent être le «sel» et la «lumière»?

Très grande est la diversité des situations et des façons de poser les problèmes dans le monde d'aujourd'hui, caractérisé en outre par un mouvement accéléré de mutation. C'est pourquoi il faut se garder absolument de généralisations et de simplifications abusives. Il est toutefois possible de noter certaines lignes de tendances qui se font jour dans la société actuelle. De même que dans le champ évangélique l'ivraie et le bon grain poussent simultanément, ainsi dans l'histoire, théâtre quotidien de la liberté humaine, se rencontrent côte à côte et parfois étroitement enlacés entre eux le bien et le mal, l'injustice et la justice, l'angoisse et l'espoir.

Sécularisme et besoin religieux

4. Comment ne pas penser à la diffusion persistante de l'indifférence religieuse et de l'athéisme sous ses formes les plus variées, en particulier sous la forme, aujourd'hui peut-être la plus répandue, du sécularisme? Enivré des conquêtes prodigieuses d'un développement scientifico-technique que rien n'arrête, et surtout envoûté par la tentation la plus ancienne et toujours nouvelle, celle de vouloir se faire l'égal de Dieu (cf. Gn 3, 5) grâce à l'usage d'une liberté sans frein, l'homme se coupe de ses racines religieuses les plus profondes: il oublie Dieu, il estime que Dieu n'a aucun sens dans son existence, il le rejette pour se prosterner en adoration devant les «idoles» les plus variées.

Ce sécularisme actuel est en vérité un phénomène très grave: il ne touche pas seulement les individus, mais en quelque façon des communautés entières, comme déjà le notait le Concile: «Des multitudes sans cesse plus denses s'éloignent en pratique de la religion»(Cool. Moi même je l'ai répété souvent: le phénomène de la sécularisation frappe les peuples qui sont chrétiens de vieille date, et ce phénomène réclame, sans plus de retard, une nouvelle évangélisation.

Et pourtant, l'aspiration et le besoin de la religion ne peuvent mourir totalement. La conscience de chaque homme, quand il a le courage d'affronter les questions les plus graves de l'existence humaine, en particulier la question du sens de la vie, de la souffrance et de la mort, ne peut pas hésiter à faire sienne cette parole de vérité que proclamait Saint Augustin: «Tu nous as faits pour Toi, Seigneur, et notre coeur est sans repos tant qu'il ne se repose pas en Toi»(9). C'est ainsi que le monde actuel porte témoignage, sous des formes toujours plus vastes et plus vives, de l'ouverture à une vision spirituelle et transcendante de la vie, du réveil de la recherche religieuse, du retour au sens du sacré et à la prière, de l'exigence de la liberté d'invoquer le Nom du Seigneur.

La personne humaine: sa dignité piétinée et exaltée

5. Pensons encore aux nombreuses violations infligées aujourd'hui à la dignité de la personne humaine. Quand il n'est pas reconnu et aimé dans sa dignité d'image vivante de Dieu (cf. Gn 1, 26), l'être humain est exposé aux formes les plus humiliantes et aberrantes d'«instrumentalisation», qui le rendent misérablement esclave du plus fort. Et ce «plus fort» peut prendre des figures diverses: idéologie, pouvoir économique, systèmes politiques inhumains, technocratie scientifique, invasion des «mass-media». Une fois encore, nous nous trouvons ici en face d'une foule de personnes, qui sont nos frères et soeurs, dont les droits fondamentaux sont violés, parfois en conséquence de l'excessive tolérance ou même de l'injustice patente de certaines lois civiles: le droit à la vie et à l'intégrité du corps, le droit à un toit et au travail, le droit à la famille et à la procréation responsable, le droit à la participation à la vie publique et politique, le droit à la liberté de conscience et de profession de sa foi religieuse.

Qui peut dénombrer les enfants qui n'ont pas vu le jour, parce que tués dans le sein de leur mère, les enfants abandonnés, ou maltraités par les parents eux-mêmes, les enfants qui grandissent privés d'affection et d'éducation? En certains pays, des populations entières n'ont ni maison ni travail, et manquent des moyens indispensables pour mener une existence digne d'êtres humains. De terribles îlots de pauvreté et de misère, physique et morale à la fois, sont désormais fixés au pourtour des métropoles et frappent mortellement des groupes humains entiers.

Mais le caractère sacré de la personne ne saurait être réduit à néant, encore qu'il soit trop souvent méprisé et violé: son fondement inébranlable, c'est le Dieu Créateur et Père; aussi le caractère sacré de la personne continue-t-il de s'imposer encore et toujours.

De là procède la diffusion toujours plus vaste comme aussi l'affirmation toujours plus forte du sens de la dignité personnelle de tout être humain. Un courant bienfaisant désormais parcourt et envahit tous les peuples de la terre, qui ont pris davantage conscience de la dignité de l'homme: l'homme n'est absolument pas une «chose» ou un «objet» qu'on peut utiliser, mais il est toujours et uniquement un «sujet» doué de conscience et de liberté, appelé à vivre de façon responsable dans la société et dans l'histoire, ordonné à des valeurs spirituelles et religieuses.

On a affirmé que notre temps est le temps des «humanismes»: quelques-uns de ces humanismes, d'inspiration athée et séculière, en viennent paradoxalement à amoindrir et anéantir l'homme; d'autres humanismes, au contraire, l'exaltent jusqu'à déboucher sur des formes de véritable idolâtrie; d'autres, enfin, reconnaissent, conformément à la vérité, la grandeur et la misère de l'homme, et ils mettent en évidence, soutiennent et favorisent sa dignité totale.

Un signe et un résultat de ces courants humanistes peuvent se reconnaître dans le besoin grandissant de participation. C'est là, de toute évidence, un des traits distinctifs de l'humanité actuelle, un véritable «signe des temps» qui mûrit en divers domaines et diverses directions: en ce qui concerne surtout les femmes et le monde des jeunes, en direction de la vie familiale et scolaire, mais aussi dans le monde culturel, économique, social et politique. Jouer un rôle, être en quelque façon créateur d'une nouvelle culture humaniste, est une exigence, tout à la fois universelle et individuelle(10).

Conflictualité et paix

6. Nous ne pouvons pas, enfin, oublier un autre phénomène qui marque l'humanité moderne: plus qu'à aucun autre moment de son histoire, l'humanité est aujourd'hui frappée et ébranlée par la conflictualité. Il s'agit d'un phénomène aux formes multiples, qui se distingue du pluralisme légitime des mentalités et des initiatives, et qui se manifeste dans une néfaste opposition des personnes, des groupes, des catégories, des nations et des blocs de nations. Cette opposition prend les formes de la violence, du terrorisme, de la guerre. Une fois encore, mais dans des proportions énormément amplifiées, certaines portions de l'humanité d'aujourd'hui, parce qu'elles veulent faire montre de leur «toute-puissance», renouvellent la folle expérience de la construction de la «tour de Babel» (cf. Gn 11, 1-9); or, cette expérience engendre la confusion, la lutte, la désintégration et l'oppression. La famille humaine est par là bouleversée et déchirée de façon dramatique.

En contrepartie, se manifeste avec une vigueur irrépressible l'aspiration de chaque homme et des peuples au bien inestimable de la paix dans la justice. La béatitude «Bienheureux les artisans de paix» (Mt 5, 9) trouve chez les hommes de notre temps un écho nouveau et bien significatif: pour l'avènement de la paix et de la justice, aujourd'hui, des générations entières vivent, souffrent et travaillent. La participation croissante des personnes et des groupes à la vie de la société est le chemin qu'on prend aujourd'hui de plus en plus pour que la paix se transforme de désir en une réalité. Sur ce chemin, nous rencontrons grand nombre de fidèles laïcs engagés avec générosité sur le terrain social ou politique, sous les formes les plus variées, que ce soit dans les institutions, ou comme coopérateurs bénévoles et en service auprès des plus humbles.

Jesus-Christ, espérance de l'humanité

7. Tel est l'immense chantier qui s'offre aux yeux de ceux que le «Maître du domaine» envoie travailler à sa vigne.

Sur ce chantier, l'Eglise est présente et agissante, l'Eglise, c'est-à-dire nous tous, pasteurs et fidèles, prêtres, religieux et laïcs. Les situations que nous venons d'évoquer touchent l'Eglise: par ces situations, l'Eglise se trouve en partie conditionnée; cependant elle n'en est pas écrasée, encore moins terrassée, parce que l'Esprit Saint, qui est l'âme de l'Eglise, la soutient dans sa mission.

L'Eglise n'ignore pas que tous les efforts soutenus par l'humanité en vue de la communion et de la participation, en dépit des difficultés, des ralentissements, des contradictions de tout genre, provoqués par les limites de l'homme, par le péché et par le Mauvais, obtiennent une réponse parfaite dans l'intervention de Jésus-Christ, Rédempteur de l'homme et du monde.

L'Eglise sait parfaitement qu'elle a été envoyée par Lui comme «le signe et le moyen de l'union intime avec Dieu et de l'unité de tout le genre humain»(11).

En dépit de toute chose, par conséquent, l'humanité peut espérer, doit espérer: Evangile vivant et personnel, Jésus-Christ Lui-même est la «Nouvelle» toute neuve, porteuse de joie, que l'Eglise chaque jour nous annonce et dont elle porte témoignage à tous les hommes.

Dans la transmission de cette annonce et dans la présentation de ce témoignage, les fidèles laïcs occupent une place originale et irremplaçable: par eux, l'Eglise du Christ est présente dans les secteurs les plus variés du monde, comme signe et source d'espérance et d'amour.

CHAPITRE I

JE SUIS LA VIGNE,
VOUS ETES LES SARMENTS
La dignité des fidèles laïcs
dans l'Eglise-Mystère

Le mystère de la vigne

8. L'image de la vigne est utilisée dans la Bible de multiple façon et avec diverses significations: en particulier, elle sert à exprimer le mystère du Peuple de Dieu. Dans cette perspective plus intérieure, les fidèles laïcs ne sont pas simplement les ouvriers qui travaillent à la vigne, mais ils sont une partie même de la vigne: «Moi, je suis la vigne, et vous, les sarments» (Jn 15, 5), dit Jésus.

Déjà dans l'Ancien Testament, les prophètes, quand ils veulent parler du peuple élu, recourent à l'image de la vigne. Israël est la vigne de Dieu, l'ouvrage du Seigneur, la joie de son coeur: «Je t'avais plantée comme une vigne de choix» (Jr 2, 21); «Ta mère ressemblait à une vigne plantée au bord de l'eau. Elle était féconde et feuillue grâce à l'abondance de l'eau» (Ez 19, 10); «Mon ami avait une vigne sur un coteau plantureux. Il en retourna la terre et en retira les pierres, pour y mettre un plant de qualité...» (Is 5, 1-2).

Jésus reprend le symbole de la vigne, et Il l'emploie pour révéler certains aspects du Royaume de Dieu: «Un homme planta une vigne, il l'entoura d'une clôture, y creusa un pressoir, et y bâtit une tour de garde. Puis il la donna en fermage à des vignerons et partit en voyage» (Mc 12, 1; cf. Mt 21, 28 et suiv.).

L'évangéliste Jean nous invite à aller encore plus profond et il nous introduit à la découverte du mystère de la vigne: elle est le symbole et la figure non seulement du peuple de Dieu, mais de Jésus Lui-même. Lui, Jésus, est le cep de vigne, et nous, les disciples, nous en sommes les sarments; Lui est la «vraie vigne», à laquelle, pour vivre, sont unis les sarments (cf. Jn 15, 1 et suiv.).

Le Concile Vatican II, reprenant les différentes images bibliques qui éclairent le mystère de l'Eglise, propose de nouveau l'image de la vigne et des sarments: «La vigne véritable, c'est le Christ; c'est Lui qui donne vie et fécondité aux rameaux que nous sommes: par l'Eglise nous demeurons en Lui, sans qui nous ne pouvons rien faire (Jn 15, 1-5)»(12). C'est l'Eglise elle-même, donc, qui est le vignoble évangélique.

Elle est mystère parce que l'amour et la vie du Père, du Fils et de l'Esprit Saint sont le don absolument gratuit offert à tous ceux qui sont nés de l'eau et de l'Esprit (cf. Jn 3, 5), appelés à vivre la communion même de Dieu, à la manifester et à la communiquer dans l'histoire (mission): «En ce jour, dit Jésus, vous reconnaîtrez que je suis en mon Père, que vous êtes en moi, et moi en vous» (Jn 14, 20).

Désormais, c'est seulement à l'intérieur du mystère de l'Eglise comme mystère de communion que se révèle «l'identité» des fidèles laïcs, leur dignité originelle. Et c'est seulement à l'intérieur de cette dignité que peuvent se définir leur vocation et leur mission dans l'Eglise et dans le monde.

Qui sont les fidèles laïcs?

9. Les Pères du Synode ont très justement noté la nécessité de déterminer et de proposer une description positive de la vocation et de la mission des fidèles laïcs, grâce à une étude approfondie de la doctrine du Concile Vatican II, à la lumière des plus récents documents du Magistère et de l'expérience de la vie de l'Eglise, elle-même guidée par l'Esprit Saint(13).

Pour répondre à la question «qui sont les fidèles laïcs?», le Concile a refusé la solution facile d'une définition négative et s'est ouvert à une vision nettement positive; il a manifesté son intention fondamentale en affirmant la pleine appartenance des fidèles laïcs à l'Eglise et à son mystère, et le caractère particulier de leur vocation, dont le propre est, d'une manière particulière, de «chercher le règne de Dieu précisément à travers la gérance des choses temporelles qu'ils ordonnent selon Dieu»(14). «Sous le nom de laïcs _ ainsi s'exprime la Constitution Lumen gentium _ on entend ici l'ensemble des chrétiens qui ne sont pas membres de l'ordre sacré et de l'état religieux reconnu par l'Eglise, c'est-à-dire les chrétiens qui, étant incorporés au Christ par le baptême, intégrés au Peuple de Dieu, faits participants à leur manière de la fonction sacerdotale, prophétique et royale du Christ, exercent pour leur part, dans l'Eglise et dans le monde, la mission qui est celle de tout le peuple chrétien»(15).

Déjà Pie XII affirmait: «Les fidèles, et plus précisément les laïcs, se trouvent sur la ligne la plus avancée de la vie de l'Eglise; par eux, l'Eglise est le principe vital de la société humaine. C'est pourquoi, eux surtout, doivent avoir une conscience toujours plus claire, non seulement d'appartenir à l'Eglise, mais d'être l'Eglise, c'est-à-dire la communauté des fidèles sur la terre, sous la conduite du Chef commun, le Pape, et des Evêques en communion avec lui. Ils sont l'Eglise»(16).

Conformément à l'image biblique de la vigne, les fidèles laïcs, comme tous les membres de l'Eglise, sont des sarments, branchés sur le Christ, qui est Lui, la vraie vigne, et c'est par Lui qu'ils sont rendus vivants et donneurs de vie.

L'insertion dans le Christ au moyen de la foi et des sacrements de l'initiation chrétienne est la racine première qui crée la nouvelle condition du chrétien dans le mystère de l'Eglise, qui constitue sa «physionomie» la plus profonde, qui est à la base de toutes les vocations et du dynamisme de la vie chrétienne des fidèles laïcs: en Jésus-Christ mort et ressuscité, le baptisé devient une «créature nouvelle» (Ga 6, 15; 2 Co 5, 17), une créature purifiée du péché et vivifiée par la grâce.

Ainsi donc, ce n'est que par l'exploitation des mystérieuses richesses que Dieu donne aux chrétiens dans le baptême qu'on peut dessiner la «figure» du fidèle laïc.

Le Baptême et la nouveauté chrétienne

10. Il n'est pas excessif de dire que la vie entière du fidèle laïc a pour but de le porter à connaître la radicale nouveauté chrétienne qui découle du Baptême, sacrement de la foi, pour qu'il puisse en vivre les obligations selon la vocation que Dieu lui a fixée. Pour dessiner la «figure» du fidèle laïc, examinons de façon plus directe et explicite, entre autres, les aspects fondamentaux suivants: Le Baptême nous fait naître à la vie d'enfants de Dieu; il nous unit à Jésus-Christ et à son Corps qui est l'Eglise; il nous confère l'onction dans l'Esprit Saint en faisant de nous des temples spirituels.

Enfants de Dieu dans le Fils unique

11. Souvenons-nous des paroles de Jésus à Nicodème: «Oui, vraiment, je te le dis, à moins de naître d'eau et d'Esprit, on ne peut pas entrer dans le royaume de Dieu» (Jn 3, 5). Le baptême est donc une nouvelle naissance, c'est une régénération.

C'est précisément en pensant à cet aspect du don du baptême que l'apôtre Pierre entonne ce chant: «Béni soit Dieu, le Père de Jésus-Christ notre Seigneur; dans sa grande miséricorde, Il nous a fait renaître, grâce à la résurrection de Jésus-Christ d'entre les morts, pour une vivante espérance, pour l'héritage qui ne connaîtra ni destruction, ni souillure, ni vieillissement» (1 P 1, 3-4). Et il donne le nom de chrétien à ceux que Dieu «a fait renaître, non pas d'une semence périssable, mais d'une semence impérissable: sa parole vivante qui demeure» (1 P 1, 23).

Par le baptême chrétien nous devenons fils ou filles de Dieu, dans son Fils unique, Jésus-Christ. Au sortir des eaux des fonts baptismaux,chaque chrétien entend à nouveau la voix qui fut entendue un jour sur les rives du Jourdain: «Tu es mon Fils bien-aimé, tu as toute ma faveur» (Lc 3, 22), et il comprend ainsi qu'il a été associé au Fils bien-aimé, en devenant fils adoptif (cf. Ga 4, 4-7) et frère du Christ. Ainsi se réalise dans l'histoire de chaque homme l'éternel dessein de Dieu: «Ceux qu'Il connaissait par avance, Il les a aussi destinés à être l'image de son Fils, pour faire de ce Fils l'aîné d'une multitude de frères» (Rm 8, 29).

C'est l'Esprit Saint qui fait que les baptisés sont fils ou filles de Dieu et en même temps membres du Corps du Christ. Saint Paul le rappelle aux chrétiens de Corinthe: «Nous avons tous été baptisés dans l'unique Esprit, pour former un seul corps» (1 Co 12, 13), de sorte que l'Apôtre peut dire à ses fidèles laïcs: «Vous êtes le corps du Christ et, chacun pour votre part, vous êtes les membres de ce corps» (1 Co 12, 27); «et voici la preuve que vous êtes des fils: envoyé par Dieu, l'Esprit de son Fils est dans nos coeurs» (Ga 4, 6; cf. Rm 8, 15-16).

Un seul corps dans le Christ

12. Régénérés comme «fils dans le Fils», les baptisés sont inséparablement «membres du Christ et membres du corps de l'Eglise», comme nous l'enseigne le Concile de Florence(17).

Le Baptême signifie et produit une incorporation mystique mais réelle au Corps crucifié et glorieux de Jésus. Par le moyen du sacrement, Jésus unit le baptisé à sa mort pour l'unir à sa résurrection (cf. Rm 6, 3-5), le dépouille du «vieil homme» et le revêt de «l'homme nouveau», c'est-à-dire de Lui-même: «Vous tous qui avez été baptisés dans le Christ _ proclame l'apôtre Paul _ vous vous êtes revêtus du Christ» (Ga 3, 27; cf. Ep 4, 22-24; Col 3, 9-10). De là découle que «tout en étant nombreux, nous formons un seul corps dans le Christ» (Rm 12, 5).

Nous retrouvons, dans les paroles de Paul, l'écho fidèle de l'enseignement de Jésus Lui-même: Il nous a, en effet, révélé la mystérieuse unité de ses disciples avec Lui et entre eux, la présentant comme l'image et le prolongement de cette secrète communion qui lie le Père au Fils et le Fils au Père dans le lien d'amour de l'Esprit (cf. Jn 17, 21 ). C'est de cette même unité que parle Jésus en utilisant l'image de la vigne et des sarments: «Moi, je suis la vigne, et vous, les sarments» (Jn 15, 5), une image qui met en lumière non seulement l'intimité profonde des disciples avec Jésus, mais aussi la communion de vie des disciples entre eux: tous, sarments de l'unique Vigne.

Temples vivants de l'Esprit Saint

13. A l'aide d'une autre image, celle d'un édifice, l'apôtre Pierre définit les baptisés comme des «pierre vivantes» fondées sur le Christ, qui est Lui la «pierre angulaire»; et ils sont destinés à la «construction d'un édifice spirituel» (1 P 2, 5 et suiv.). Cette image nous introduit à un autre aspect de la nouveauté du baptême que le Concile Vatican II présente en ces termes: «Les baptisés, en effet, par la régénération et l'onction du Saint-Esprit, sont consacrés pour être une demeure spirituelle»(18).

L'Esprit Saint «oint» le baptisé, Il imprime sur lui un sceau indélébile (cf. 2 Co 1, 21. 22), et Il le constitue temple spirituel, c'est-à-dire qu'Il le remplit de la sainte présence de Dieu grâce à l'union et à la conformité avec Jésus-Christ.

Fort de cette «onction» spirituelle, le chrétien peut, à sa manière, répéter les paroles de Jésus: «L'Esprit du Seigneur est sur moi, parce qu'Il m'a consacré par l'onction; Il m'a envoyé porter la bonne nouvelle aux pauvres, annoncer aux prisonniers leur libération et aux aveugles le retour de la vue, remettre en liberté les opprimés et proclamer une année de grâce du Seigneur» (Lc 4, 18-19; cf. Is 61, 1-2). Ainsi, par l'effusion du Baptême et de la Confirmation, le baptisé participe à la mission même du Christ Jésus, le Messie Sauveur.

Participants a la fonction sacerdotale, prophétique et royale de Jésus-Christ

14. S'adressant aux baptisés comme à des «enfants qui viennent de naître», l'apôtre Pierre écrit: «Approchez-vous de Lui: Il est la pierre vivante, que les hommes ont éliminée, mais que Dieu a choisie parce qu'il en connaît la valeur. Vous aussi, soyez les pierres vivantes qui servent à construire le Temple spirituel, et vous serez le sacerdoce saint, présentant des offrandes spirituelles que Dieu pourra accepter à cause du Christ Jésus ... Oui, c'est vous qui êtes la race choisie, le sacerdoce royal, la nation sainte, le peuple qui appartient à Dieu; vous êtes donc chargés d'annoncer les merveilles de celui qui vous a appelés des ténèbres à son admirable lumière ...» (1 P 2, 4-5. 9).

C'est là un nouvel aspect de la grâce et de la dignité du baptême: les fidèles laïcs participent, pour leur part, à la triple fonction de Jésus-Christ: sacerdotale, prophétique et royale. C'est un aspect qui, certes, n'a jamais été négligé par la tradition vivante de l'Eglise, comme on le voit, par exemple, dans l'explication du Psaume 26 que nous présente Saint Augustin: «David reçut l'onction royale. En ce temps-là, il n'y avait à la recevoir que le roi et le prêtre. Ces deux personnes préfiguraient le futur roi-prêtre unique, le Christ (le mot «Christ» vient de «chrisma», qui signifie «onction»). Et notre chef n'a pas été seul à recevoir l'onction, mais nous aussi, qui sommes son corps, nous l'avons reçue avec Lui ... Voilà pourquoi l'onction est donnée à tous les chrétiens, alors que dans l'Ancien Testament elle n'était le fait que de deux personnes seulement. Que nous soyons le corps du Christ, cela ressort clairement du fait que nous avons tous reçu l'onction et qu'en Lui nous sommes oints (christi) et Christ, parce que, d'une certaine manière, la tête et le corps forment le Christ dans son intégrité»(19).

Dans le sillage du Concile Vatican II(20), dès le début de mon service pastoral, j'ai tenu à exalter la dignité sacerdotale, prophétique et royale de tout le Peuple de Dieu: «Celui qui est né de la Vierge Marie _ disais-je _ le fils du charpentier, à ce qu'on croyait, le Fils du Dieu vivant, comme le proclamait Pierre, est venu pour faire de nous tous "un royaume de prêtres". Le Concile Vatican II nous a rappelé le mystère de ce pouvoir et aussi le fait que la mission du Christ, Prêtre, Prophète-Maître, Roi, se poursuit dans l'Eglise. Tous, le Peuple de Dieu tout entier, participent à cette triple mission»(21).

Par cette Exhortation, nous voulons inviter encore une fois les fidèles laïcs à relire, à méditer et à assimiler avec intelligence et amour l'enseignement si fécond et si riche du Concile qui touche à leur participation à la triple fonction du Christ(22). Voici à présent une brève synthèse des éléments essentiels de cet enseignement.

Les fidèles laïcs participent à l'office sacerdotal, par lequel Jésus s'est offert Lui-même sur la Croix et continue encore à s'offrir dans la célébration de l'Eucharistie à la gloire du Père pour le salut de l'humanité. Incorporés à Jésus-Christ, les baptisés sont unis à Lui et à son sacrifice par l'offrande d'eux-mêmes et de toutes leurs activités (cf. Rm 12, 1-2). Parlant des fidèles laïcs, le Concile déclare: «Toutes leurs activités, leurs prières et leurs entreprises apostoliques, leur vie conjugale et familiale, leurs labeurs quotidiens, leurs détentes d'esprit et de corps, s'ils sont vécus dans l'Esprit de Dieu, et même les épreuves de la vie, pourvu qu'elles soient patiemment supportées, tout cela devient offrandes spirituelles agréables à Dieu par Jésus-Christ (cf. 1 P 2, 5); et dans la célébration eucharistique ces offrandes rejoignent l'oblation du Corps du Seigneur pour être offertes en toute piété au Père. C'est ainsi que les laïcs consacrent à Dieu le monde lui-même, rendant partout à Dieu dans la sainteté de leur vie un culte d'adoration»(23).

La participation à l'office prophétique du Christ «qui proclame, par le témoignage de sa vie et la vertu de sa parole, le royaume du Père»(24), habilite et engage les fidèles laïcs à recevoir l'Evangile dans la foi, et à l'annoncer par la parole et par les actes, sans hésiter à dénoncer courageusement le mal. Unis au Christ, «le grand prophète» (Lc 7, 16), et constitués dans l'Esprit «témoins» du Christ ressuscité, les fidèles laïcs sont rendus participants autant au sens de la foi surnaturelle de l'Eglise qui «ne peut se tromper dans la foi»(25) qu'à la grâce de la parole (cf. Ac 2, 17-18; Ap 19, 10); ils sont au surplus appelés à faire briller la nouveauté et la force de l'Evangile dans leur vie quotidienne, familiale et sociale, comme aussi à exprimer, avec patience et courage, dans les difficultés de l'époque présente leur espérance de la gloire «même à travers les structures de la vie du siècle»(26).

Par leur appartenance au Christ, Seigneur et Roi de l'Univers, les fidèles laïcs participent à son office royal, et sont appelés par Lui au service du Royaume de Dieu et à sa diffusion dans l'histoire. Ils vivent la royauté chrétienne tout d'abord par le combat spirituel qu'ils mènent pour détruire en eux le règne du péché (cf. Rm 6, 12) et ensuite par le don d'eux-mêmes pour servir, dans la charité et dans la justice, Jésus Lui-même, présent en tous ses frères, surtout dans les plus petits (cf. Mt 25, 40).

Mais les fidèles laïcs sont appelés en particulier à redonner à la création toute sa valeur originelle. En liant la création au bien véritable de l'homme par une activité soutenue par la vie de la grâce, ils participent à l'exercice du pouvoir par lequel Jésus Ressuscité attire à Lui toutes les choses et les soumet, en même temps qu'Il se soumet Lui-même, au Père, de sorte que Dieu soit tout en tous (cf. Jn 12, 32; 1 Co 15, 28).

La participation des laïcs à la triple fonction de Jésus Prêtre, Prophète et Roi, trouve d'abord sa racine dans l'onction du Baptême, puis son développement dans la Confirmation et son achèvement et son soutien dans l'Eucharistie. C'est une participation qui est donnée, il est vrai, à chaque fidèle laïc, mais en tant qu'ils forment l'unique Corps du Christ: en effet, Jésus enrichit de ses dons l'Eglise elle-même parce que l'Eglise est son Corps et son Epouse. Ainsi c'est en tant que membre de l'Eglise que chacun participe à la triple fonction du Christ, comme l'enseigne clairement l'apôtre Pierre; il appelle, en effet, les baptisés «la race choisie, le sacerdoce royal, la nation sainte, le peuple qui appartient à Dieu» (1 P 2, 9). Et c'est justement parce qu'elle découle de la communion ecclésiale, que cette participation des fidèles laïcs à la triple fonction du Christ exige d'être vécue et réalisée dans la communion et pour la croissance de cette communion même. Saint Augustin écrit: «De même que nous nous appelons tous chrétiens (christiani) en raison de l'onction (chrisma) mystique, de même nous nous appelons tous prêtres, parce que nous sommes membres de l'unique Prêtre»(27).

Les fidèles laïcs et le caractère séculier

15. La nouveauté chrétienne est le fondement et le titre de l'égalité de tous ceux qui sont les baptisés dans le Christ, de tous les membres du Peuple de Dieu: «Commune est la dignité des membres du fait de leur régénération dans le Christ; commune la grâce d'adoption filiale; commune la vocation à la perfection; il n'y a qu'un salut, une espérance, une charité sans division»(28). En vertu de cette dignité baptismale commune, le fidèle laïc est co-responsable, avec tous les ministres ordonnés et avec les religieux et les religieuses, de la mission de l'Eglise.

Mais cette dignité baptismale commune revêt chez le fidèle laïc une modalité qui le distingue, sans toutefois l'en séparer, du prêtre, du religieux, de la religieuse. Le Concile Vatican II a indiqué que cette modalité se trouve dans le caractère séculier: «Le caractère séculier est le caractère propre et particulier des laïcs»(29).

Pour saisir de façon complète, adaptée et spécifique, la condition ecclésiale du fidèle laïc, il faut approfondir la portée théologique du caractère séculier, à la lumière du dessein salvifique de Dieu et du mystère de l'Eglise.

Comme l'affirme Paul VI, l'Eglise «a une authentique dimension séculière, inhérente à sa nature intime et à sa mission, dont la racine plonge dans le mystère du Verbe Incarné, et qui s'est réalisée sous des formes diverses pour ses membres»(30).

L'Eglise, en effet, vit dans ce monde, même si elle n'est pas de ce monde (cf. Jn 17, 16), et elle est envoyée pour continuer l'oeuvre rédemptrice de Jésus-Christ; cette oeuvre, «qui concerne essentiellement le salut des hommes, embrasse aussi le renouvellement de tout l'ordre temporel»(31).

Il est certain que tous les membres de l'Eglise participent à sa dimension séculière; mais cela de façons diverses. En particulier la participation des fidèles laïcs a une modalité de réalisation et de fonction, qui, selon le Concile, leur est «propre et particulière»: c'est cette modalité que l'on désigne du nom de «caractère séculier»(32).

Dans le concret, le Concile parle de la condition des fidèles laïcs en la désignant, avant tout, comme le lieu où leur est adressé l'appel de Dieu: «C'est là qu'ils sont appelés»(33). Il s'agit ici d'un «lieu» présenté en termes dynamiques: les fidèles laïcs «vivent au milieu du siècle, c'est-à-dire engagés dans tous les divers devoirs et travaux du monde, dans les conditions ordinaires de la vie familiale et sociale dont leur existence est comme tissée»(34). Ce sont des personnes qui vivent une vie normale dans le monde, étudient, travaillent, créent des rapports amicaux, sociaux, professionnels, culturels. Le Concile ne considère pas simplement leur condition comme un cadre extérieur et un environnement, mais bien comme une réalité destinée à trouver en Jésus-Christ la plénitude de son sens(35). Il va même jusqu'à affirmer que «le Verbe Incarné en personne a voulu entrer dans le jeu de cette solidarité... Il a sanctifié les liens humains, notamment ceux de la famille, source de la vie sociale. Il s'est volontairement soumis aux lois de sa patrie. Il a voulu mener la vie même d'un artisan de son temps et de sa région»(36).

Le «monde» devient ainsi le milieu et le moyen de la vocation chrétienne des fidèles laïcs, parce qu'il est lui-même destiné à glorifier Dieu le Père dans le Christ. Le Concile peut dès lors indiquer le sens propre et particulier de l'appel de Dieu qui s'adresse aux fidèles laïcs. Ils ne sont pas invités à abandonner la position qu'ils occupent dans le monde. Le baptême, en effet, ne les retire pas du monde (comme le souligne l'apôtre Paul: «Que chacun, mes frères, reste devant Dieu dans la condition où il se trouvait quand il a été appelé» [1 Co 7, 24]); mais il leur confie une vocation qui concerne justement leur situation dans le monde: les fidèles laïcs, en effet, sont «appelés par Dieu à travailler comme du dedans à la sanctification du monde, à la façon d'un ferment, en exerçant leurs propres charges sous la conduite de l'esprit évangélique, et pour manifester le Christ aux autres avant tout par le témoignage de leur vie, rayonnant de foi, d espérance et de charité»(37). Ainsi, l'être et l'agir dans le monde sont pour les fidèles laïcs une réalité non seulement anthropologique et sociologique, mais encore et spécifiquement théologique et ecclésiale. Dans leur situation au milieu du monde, en effet, Dieu manifeste son dessein et leur communique leur vocation particulière de «chercher le règne de Dieu précisément à travers la gérance des choses temporelles qu'ils ordonnent selon Dieu»(38).

C'est précisément dans cette optique que les Pères du Synode ont déclaré: «Le caractère séculier du fidèle laïc n'est donc pas à définir seulement dans un sens sociologique, mais surtout en un sens théologique. Le caractère séculier doit s'entendre à la lumière de l'acte créateur et rédempteur de Dieu, qui a confié le monde aux hommes et aux femmes, pour qu'ils participent à l'oeuvre de la création, qu'ils libèrent la création elle-même de l'influence du péché et qu'ils se sanctifient dans le mariage ou dans le célibat, dans la famille, dans la profession et dans les différentes activités sociales»(39).

La condition ecclésiale des fidèles laïcs est définie dans sa racine à partir de la nouveauté chrétienne et caractérisée par son caractère séculier(40).

Les images évangéliques du sel, de la lumière et du levain, bien qu'elles s'adressent indistinctement à tous les disciples de Jésus, s'appliquent de façon toute spéciale aux fidèles laïcs. Ce sont des images merveilleusement significatives, parce qu'elles traduisent non seulement l'insertion profonde et la participation totale des fidèles laïcs sur la terre, dans le monde, dans la communauté humaine, mais surtout la nouveauté et l'originalité d'une insertion et d'une participation destinées à la diffusion de l'Evangile qui sauve.

Appelés a la sainteté

16. La dignité des fidèles laïcs se révèle à nous dans sa plénitude si nous examinons la vocation première et fondamentale que le Père offre en Jésus-Christ par l'intermédiaire de l'Esprit à chacun d'eux: la vocation à la sainteté, c'est-à-dire à la perfection de la charité. Le saint est le témoignage le plus éclatant de la dignité conférée au disciple du Christ.

Sur la vocation universelle à la sainteté, le Concile Vatican II s'est exprimé en termes lumineux. On peut affirmer que c'est l'orientation principale qui a été fixée pour les fils et les filles de l'Eglise, par ce Concile voulu pour le renouvellement évangélique de la vie chrétienne(41). Cette orientation n'est pas une simple exhortation morale, mais une excigence incontournable du mystère de l'Eglise: l'Eglise est la Vigne choisie, par le moyen de laquelle les sarments vivent et grandissent de la sève même du Christ, sainte et sanctifiante; elle est le Corps mystique dont les membres participent à la même vie de sainteté que la tête, qui est le Christ; elle est l'Epouse aimée du Seigneur Jésus, qui s'est livré pour la sanctifier (cf. Ep 5, 25 et suiv.). L'Esprit Saint qui sanctifia la nature humaine de Jésus dans le sein virginal de Marie (cf. Lc 1, 35) est le même Esprit qui demeure et opère dans l'Eglise pour lui communiquer la sainteté du Fils de Dieu fait homme.

Il est aujourd'hui plus urgent que jamais que tous les chrétiens reprennent le chemin du renouveau évangélique, recevant avec générosité l'invitation de l'Apôtre à «être saints dans toute la conduite» (1 P 1, 15). Le Synode extraordinaire de 1985, vingt ans après la clôture du Concile, a fort à propos insisté sur cette urgence: «Etant donné que l'Eglise dans le Christ est mystère, elle doit être considérée comme un signe et un instrument de sainteté. Les saints et les saintes ont toujours été source et origine de renouvellement dans les moments les plus difficiles de l'histoire de l'Eglise. Aujourd'hui nous avons un besoin très grand de saints; nous devons en demander au Seigneur avec insistance»(42).

Tous, dans l'Eglise, précisément parce qu'ils sont ses membres, reçoivent et donc partagent la vocation commune à la sainteté. De plein droit, et sans aucune différence avec les autres membres de l'Eglise, les fidèles laïcs sont appelés à la sainteté: «L'appel à la plénitude de la vie chrétienne et à la perfection de la charité s'adresse à tous ceux qui croient au Christ, quels que soient leur état ou leur rang»(43); «Tous les fidèles du Christ sont donc invités et obligés à poursuivre la sainteté et la perfection de leur état»(44).

La vocation à la sainteté plonge ses racines dans le Baptême et elle est réactivée par les autres sacrements; principalement par l'Eucharistie: revêtus de Jésus-Christ et abreuvés de son Esprit, les chrétiens sont «saints», et sont, de ce fait, habilités et engagés à manifester la sainteté de leur être dans la sainteté de tout leur agir. L'apôtre Paul ne se lasse pas d'engager tous les chrétiens à vivre «comme il convient à des saints» (Ep 5, 3).

La vie selon l'Esprit, dont le fruit est la sanctification (Rm 6, 22; cf. Ga 5, 22), suscite en tous les baptisés et en chacun d'eux le désir et l'exigence de suivre et d'imiter Jésus-Christ, en accueillant ses Béatitudes, en écoutant et méditant la parole de Dieu, en participant de façon consciente et active à la vie liturgique et sacramentelle de l'Eglise, en s'adonnant à la prière individuelle, familiale et communautaire, en s'ouvrant à la faim et à la soif de justice, en pratiquant le commandement de l'amour dans toutes les circonstances de la vie et dans le service auprès de leurs frères, spécialement de ceux qui sont humbles, pauvres et souffrants.

Se sanctifier dans le monde

17. La vocation des fidèles laïcs à la sainteté exige que la vie selon l'Esprit s'exprime de façon particulière dans leur insertion dans les réalités temporelles et dans leur participation aux activités terrestres. C'est encore l'Apôtre qui nous y engage: «Tout ce que vous dites, tout ce que vous faites, que ce soit toujours au nom du Seigneur Jésus-Christ, en offrant par Lui votre action de grâce à Dieu le Père» (Col 3, 17). Appliquant les paroles de l'Apôtre aux fidèles laïcs, le Concile affirme de façon très ferme: «Ni le soin de leur famille, ni les affaires temporelles ne doivent être étrangers à leur spiritualité»(45). Après eux, les Pèrès du Synode ont déclaré: «L'unité de la vie des fidèles laïcs est d'une importance extrême: ils doivent, en effet, se sanctifier dans la vie ordinaire, professionnelle et sociale. Afin qu'ils puissent répondre à leur vocation, les fidèles laïcs doivent donc considérer leur vie quotidienne comme une occasion d'union à Dieu et d'accomplissement de sa volonté, comme aussi de service envers les autres hommes, en les portant jusqu'à la communion avec Dieu dans le Christ»(46).

La vocation à la sainteté doit être perçue et vécue par les fidèles laïcs, moins sous un aspect d'obligation exigeante et incontournable, que comme un signe lumineux de l'amour infini du Père qui les a régénérés à sa vie de sainteté. Une pareille vocation, dans ces conditions, doit se définir comme un élément essentiel et indissociable de la nouvelle vie baptismale, et par conséquent comme un élément constitutif de leur dignité. En même temps, la vocation à la sainteté est intimement liée à la mission et à la responsabilité qui sont confiées aux fidèles laïcs dans l'Eglise et dans le monde. En effet, la sainteté vécue, tout en provenant de la participation à la vie de sainteté de l'Eglise, représente aussi par elle-même une première et fondamentale contribution à l'édification de l'Eglise en tant que «Communion des Saints». Devant les yeux éclairés par la foi s'ouvre un spectacle merveilleux: celui de tant de fidèles laïcs, hommes et femmes, qui, précisément dans leur vie et leur activité de chaque jour, souvent inaperçus ou parfois incompris, méconnus des grands de la terre mais regardés avec amour par le Père, sont des ouvriers qui travaillent inlassablement dans la Vigne du Seigneur, des artisans humbles et grands à la fois _ assurément par la puissance de la grâce de Dieu _ de la croissance du Royaume de Dieu au cours de l'histoire.

La sainteté est ensuite, il faut le reconnaître, une base essentielle et une condition absolument irremplaçable pour l'accomplissement de la mission de salut de l'Eglise. C'est la sainteté de l'Eglise qui est la source secrète et la mesure infaillible de son activité apostolique et de son élan missionnaire. C'est seulement dans la mesure où l'Eglise, Epouse du Christ, se laisse aimer de Lui, et L'aime en retour, qu'elle devient Mère féconde dans l'Esprit.

Revenons à l'image biblique: la naissance et l'expansion des sarments dépendent de leur insertion dans la vigne: «De même que le sarment ne peut pas porter de fruit par lui-même s'il ne demeure pas sur la vigne, de même vous non plus, si vous ne demeurez pas en moi. Moi, je suis la vigne, et vous, les sarments. Celui qui demeure en moi et en qui je demeure, celui-là donne beaucoup de fruit, car, en dehors de moi, vous ne pouvez rien faire» (Jn 15, 4-5).

Tout naturellement il faut rappeler ici la proclamation solennelle de fidèles laïcs, hommes et femmes, au rang de bienheureux et de saints, qui a été faite durant le temps du Synode. Le peuple de Dieu tout entier, les fidèles laïcs en particulier, peut trouver en eux de nouveaux modèles de sainteté et de nouveaux témoins de vertus héroïques, pratiquées dans des conditions communes et ordinaires de la vie. Comme l'ont affirmé les Pères du Synode: «Les Eglises locales et surtout celles qu'on appelle les jeunes Eglises doivent discerner attentivement parmi leurs propres membres les hommes et les femmes qui ont donné dans de telles conditions (les conditions quotidiennes du monde et de l'état conjugal) le témoignage de la sainteté et qui peuvent servir d'exemple aux autres, afin que, si le cas se présente, ils soient proposés pour la béatification et la canonisation»(47).

Au terme de ces réflexions, destinées à définir la condition ecclésiale du fidèle laïc, nous revient à la mémoire la célèbre interpellation de Saint Léon le Grand: «Reconnais, ô Chrétien, ta dignité»(48). C'est ce que dit aussi Saint Maxime, évêque de Turin, en s'adressant à ceux qui avaient reçu le baptême: «Considérez l'honneur qui vous est fait dans ce mystère!»(49). Tous les baptisés sont invités à écouter une fois encore les paroles de Saint Augustin: «Réjouissons-nous et remercions: nous sommes devenus non seulement des chrétiens, mais le Christ ... Soyez dans la stupeur et la joie: nous sommes devenus Christ!»(50).

La dignité de chrétien, source de l'égalité de tous les membres de l'Eglise, garantit et promeut l'esprit de communion et de fraternité, et, en même temps, elle devient la source secrète et puissante du dynamisme apostolique et missionnaire des fidèles laïcs. C'est une dignité exigeante, la dignité des ouvriers appelés par le Seigneur à travailler à sa vigne: «A tous les laïcs _ lisons-nous dans les Actes du Concile _ incombe la noble charge de travailler à ce que le dessein divin de salut parvienne de plus en plus à tous les hommes de tous les temps et de toute la terre»(51).


Dernière édition par Hercule le Mer 11 Mai - 7:19, édité 3 fois
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Apostolat des Laïcs - Vocation et Mission des Laïcs dans l'Eglise et dans le Monde Empty Re: Apostolat des Laïcs - Vocation et Mission des Laïcs dans l'Eglise et dans le Monde

Message par Her Dim 3 Avr - 21:22

EXHORTATION APOSTOLIQUE
POST-SYNODALE
CHRISTIFIDELES LAICI
DE SA SAINTETE LE PAPE
JEAN-PAUL II
SUR LA VOCATION
ET LA MISSION DES LAÏCS
DANS L'EGLISE ET DANS LE MONDE

Donné à Rome, près de Saint-Pierre, le 30 Décembre 1988, en la fête de la Sainte Famille de Jésus, Marie et Joseph. (Suite 1) :


CHAPITRE II

TOUS SARMENTS DE L'UNIQUE VIGNE
La participation des fidèles laïcs
à la vie de l'Eglise-Communion

Le mystère de l'Eglise-Communion

18. Ecoutons de nouveau les paroles de Jésus: «Moi, je suis la vraie vigne, et mon Père est le vigneron ... Demeurez en moi, comme moi en vous» (Jn 15, 1-4).

Par ces simples paroles nous est révélée la communion mystérieuse qui lie en une parfaite unité le Seigneur et ses disciples, le Christ et les baptisés: une communion vivante et vivifiante, par laquelle les chrétiens ne s'appartiennent pas à eux-mêmes, mais sont la propriété du Christ, comme les sarments unis à la vigne.

La communion des chrétiens avec Jésus a pour modèle, source et fin la communion même du Fils avec le Père dans le don de l'Esprit Saint: unis au Fils dans le lien d'amour de l'Esprit, les chrétiens sont unis au Père.

Jésus continue: «Moi, je suis la vigne, et vous, les sarments» (Jn 15, 5). De la communion des chrétiens avec le Christ découle la communion des chrétiens entre eux; tous sont les sarments de la Vigne unique, qui est le Christ. En cette communion fraternelle le Seigneur Jésus présente le reflet merveilleux et la participation mystérieuse à la vie intime d'amour du Père, du Fils et de l'Esprit Saint. Pour cette communion, Jésus prie: «Que tous, ils soient un, comme Toi, Père, Tu es en moi, et moi en Toi. Qu'ils soient un en nous, eux aussi, pour que le monde croie que Tu m'as envoyé» (Jn 17, 21).

Cette communion est le mystère même de l'Eglise, comme le rappelle le Concile Vatican II, par le mot bien connu de Saint Cyprien: «L'Eglise universelle apparaît comme "un peuple qui tire son unité de l'unité du Père et du Fils et de l'Esprit Saint"»(52). Ce mystère de l'Eglise-Communion nous est rappelé au début de la célébration eucharistique, quand le prêtre nous accueille par le salut de l'apôtre Paul: «Que la grâce du Seigneur Jésus-Christ, l'amour de Dieu et la communion de l'Esprit Saint soient avec vous tous» (2 Co 13, 13).

Après avoir dessiné la «figure» des fidèles laïcs en exprimant leur dignité, il nous faut à présent réfléchir sur leur mission et leur responsabilité dans l'Eglise et dans le monde: mais cela ne peut se comprendre valablement que dans le contexte vivant de l'Eglise-Communion.

Le Concile et l'ecclésiologie de communion

19. Telle est effectivement l'idée centrale que l'Eglise a remise en lumière pour se définir elle-même dans le Concile Vatican II, comme nous l'a rappelé le Synode extraordinaire de 1985, qui s'est tenu vingt ans après le Concile: «L'ecclésiologie de communion est l'idée centrale et fondamentale des documents du Concile. La koinonia-communion, fondée sur la Sainte Ecriture, est mise à l'honneur dans l'Eglise primitive, et dans les Eglises orientales jusqu'à nos jours. Voilà pourquoi le Concile Vatican II a travaillé intensément afin que l'Eglise soit plus clairement conçue comme une communion et que ce concept soit traduit concrètement dans la vie. Que signifie donc ce mot complexe de "communion"? Il s'agit fondamentalement de la communion avec Dieu par l'intermédiaire de Jésus-Christ, dans l'Esprit Saint. Cette communion s'obtient par la parole de Dieu et par les sacrements. Le Baptême est la porte et le fondement de la communion dans l'Eglise. L'Eucharistie est la source et le sommet de toute la vie chrétienne (cf. LG 11). La communion au Corps eucharistique du Christ signifie et produit, en d'autres termes édifie, l'intime communion de tous les fidèles dans le Corps du Christ qui est l'Eglise (1 Co 10, 16)»(53).

Au lendemain du Concile, Paul VI s'adressait aux fidèles en ces termes: «L'Eglise est une communion. Que signifie ici ce mot communion? Je vous renvoie au passage du catéchisme qui parle de la communion des Saints. Eglise veut dire communion des Saints. Et communion des Saints signifie une double participation vitale: l'incorporation des chrétiens à la vie du Christ, et la circulation de la même charité dans toute la communauté des fidèles, en ce monde et en l'autre. Union au Christ et dans le Christ; et union entre les chrétiens dans l'Eglise»(54).

Les images bibliques, par lesquelles le Concile a voulu nous introduire à la contemplation du mystère de l'Eglise, mettent en lumière la réalité de l'Eglise-Communion dans son indivisible dimension de communion des chrétiens avec le Christ et de communion des chrétiens entre eux. Ces images sont celles de la bergerie, du troupeau, de la vigne, de l'édifice spirituel, de la cité sainte(55). C'est surtout l'image du corps, présentée par l'apôtre Paul, dont la doctrine toujours vivante et attirante anime de nombreuses pages du Concile(56). S'inspirant de toute l'histoire du salut, le Concile présente aussi l'Eglise comme Peuple de Dieu: «Le bon vouloir de Dieu a été que les hommes ne reçoivent pas la sanctification et le salut séparément, hors de tout lien mutuel; Il a voulu au contraire faire d'eux un peuple qui Le connaîtrait selon la vérité et Le servirait dans la sainteté»(57). Dès les premières lignes, la Constitution Lumen gentium résume admirablement cette doctrine: «L'Eglise est, dans le Christ, en quelque sorte le sacrement, c'est-à-dire à la fois le signe et le moyen de l'union intime avec Dieu et de l'unité de tout le genre humain»(58).

La réalité de l'Eglise-Communion est, dès lors, partie intégrante, bien mieux, elle représente le contenu central du «Mystère», c'est à-dire du dessein divin du salut de l'humanité. Voilà pourquoi la communion ecclésiale ne peut se traduire parfaitement si on n'y voit qu'une réalité simplement sociologique et psychologique. L'Eglise-Communion est le peuple «nouveau», le peuple «messianique», le peuple qui «a pour chef le Christ ... La condition de ce peuple, c'est la dignité et la liberté des enfants de Dieu ... Sa loi c'est le commandement nouveau d'aimer comme le Christ Lui-même nous a aimés ... Sa destinée enfin, c'est le Royaume de Dieu ... et ce peuple est constitué par le Christ en une communion de vie, de charité et de vérité»(59). Les liens qui unissent les membres du nouveau Peuple entre eux _ et d'abord avec le Christ _ ne sont Pas ceux de la «chair» et du «sang», mais bien ceux de l'esprit, plus précisément ceux de l'Esprit Saint, que reçoivent tous les baptisés (cf. Jl 3, 1).

En effet cet Esprit qui de toute éternité est le lien de la Trinité, une et indivise, cet Esprit qui «dans la plénitude des temps» (Ga 4, 4) unit indissolublement la chair humaine au Fils de Dieu, ce même Esprit est au cours des générations chrétiennes la source ininterrompue et inépuisable de la communion dans l'Eglise et de l'Eglise.

Une communion organique:
diversité et complémentarité

20. La communion ecclésiale se présente, pour être plus précis, comme une communion «organique», analogue à celle d'un corps vivant et agissant: elle se caractérise, en effet, par la présence simultanée de la diversité et de la complémentarité des vocations et conditions de vie, des ministères, des charismes et des responsabilités. Grâce à cette diversité et complémentarité, chacun des fidèles laïcs se trouve en relation avec le corps tout entier et, au corps, il apporte sa propre contribution.

Sur la communion organique du Corps mystique du Christ, l'apôtre Paul insiste de façon toute particulière; écoutons ici, une fois encore, son enseignement si riche, dans la synthèse que le Concile en a tracée: Jésus-Christ, lisons-nous dans la Constitution Lumen gentium, «en communiquant son Esprit à ses frères, qu'Il rassemblait de toutes les nations, a fait d'eux, mystiquement, comme son Corps. Dans ce Corps, la vie du Christ se répand chez les croyants... Comme tous les membres du corps humain, malgré leur multiplicité, ne forment cependant qu'un seul corps, ainsi les fidèles dans le Christ (cf. 1 Co 12, 12). Dans le travail d'édification du Corps du Christ, règne également une diversité de membres et de fonctions. Unique est l'Esprit, qui distribue ses dons variés pour le bien de l'Eglise à la mesure de ses richesses et des exigences des services (cf. 1 Co 12, 1-11). Parmi ces dons, la grâce accordée aux Apôtres tient la première place: l'Esprit Lui-même soumet à leur autorité jusqu'aux bénéficiaires des charismes (cf. 1 Co 14). Le même Esprit, qui est par lui-même principe d'unité dans le corps où s'exerce sa vertu et où Il réalise la connexion intérieure des membres, produit et stimule entre les fidèles la charité. Aussi un membre ne peut souffrir sans que tous les membres souffrent avec lui; un membre est-il à l'honneur? Tous les membres se réjouissent avec lui (cf. 1 Co 12, 26)»(60).

C'est toujours le même et unique Esprit qui est le principe dynamique de la variété et de l'unité dans l'Eglise et de l'Eglise. Relisons la Constitution Lumen gentium: «Pour que nous puissions nous renouveler en Lui (le Christ) incessamment (cf. Ep 4, 23), Il nous a donné Son Esprit qui, présent identique à lui-même dans le chef et dans les membres, vivifie le corps entier, l'unifie et le meut, si bien que son action a pu être comparée par les saints Pères à la fonction que remplit dans le corps humain l'âme, principe de vie»(61). Dans un autre texte, particulièrement dense et précieux pour saisir «l'organicité» propre de la communion ecclésiale même sous l'aspect de croissance incessante vers la communion parfaite, le Concile écrit: «L'Esprit habite dans l'Eglise et dans le coeur des fidèles comme dans un temple (cf. 1 Co 3, 16; 6, 19), en eux Il prie et atteste leur condition de fils de Dieu par adoption (cf. Ga 4, 6; Rm 8, 15-16. 26). Cette Eglise qu'Il introduit dans la vérité toute entière (cf. Jn 16, 13) et à laquelle Il assure l'unité dans la communion et le service, Il la bâtit et la dirige grâce à la diversité des dons hiérarchiques et charismatiques, Il l'orne de ses fruits (cf. Ep 4, 11-12; 1 Co 12, 4; Ga 5, 22). Par la vertu de l'Evangile, Il rageunit l'Eglise et Il la renouvelle sans cesse, l'acheminant à l'union parfaite avec son Epoux. L'Esprit et l'Epouse, en effet, disent au Seigneur Jésus: Viens! (cf. Ap 22, 17)»(62).

La communion ecclésiale est donc un don, un grand don de l'Esprit Saint; les fidèles sont invités à le recevoir avec reconnaissance et, en même temps, à vivre avec un grand sentiment de responsabilité. Cela se réalise concrètement par leur participation à la vie et à la mission de l'Eglise, au service de qui les fidèles laïcs mettent leurs ministères et leurs charismes variés et complémentaires.

Le fidèle laïc «n'a pas le droit de se renfermer sur lui-même, en s'isolant spirituellement de la communauté, mais il doit vivre en un partage continuel avec les autres, dans un sens très vif de fraternité, dans la joie d'une égale dignité et dans l'intention de faire fructifier avec les autres l'immense trésor reçu en héritage. L'Esprit du Seigneur lui donne à lui, comme aux autres, des charismes multiples, Il l'appelle à divers ministères et diverses charges, Il lui rappelle, comme Il le rappelle aux autres pour leur rapport avec lui, que ce qui le distingue, ce n'est pas un supplément de dignité, mais une habilitation spéciale et complémentaire au service ... C'est ainsi que les charismes, les ministères, les charges et les services du fidèle laïc existent dans la comunion. Ce sont là des richesses complémentaires pour le bien de tous, sous la sage conduite des Pasteurs»(63).

Les ministères et les charismes,
dons de l'Esprit à l'Eglise

21. Le Concile Vatican II présente les ministères et les charismes comme des dons de l'Esprit Saint pour l'édification du Corps du Christ et pour la mission en vue du salut du monde(64). L'Eglise, en effet, est dirigée et guidée par l'Esprit Saint, qui distribue des dons variés, hiérarchiques et charismatiques, à tous les baptisés, en les appelant à être, chacun à sa façon, actifs et co-responsables.

Considérons maintenant les ministères et les charismes en examinant leurs rapports avec les fidèles laïcs et la participation de ceux-ci à la vie de l'Eglise-Communion.

Ministères, offices et fonctions

Les ministères présents et opérants dans l'Eglise sont tous, quoique sous des modalités diverses, une participation au ministère de Jésus Christ, le bon Pasteur qui donne sa vie pour ses brebis (cf. Jn 10, 11), le serviteur humble et totalement sacrifié pour le salut de tous (cf. Mc 10, 45). Paul est extrêmement explicite sur la constitution ministérielle des Eglises apostoliques. Dans sa première lettre aux Corinthiens, il écrit: «Parmi ceux que Dieu a placés ainsi dans l'Eglise, il y a premièrement des apôtres, deuxièmement des prophètes, troisièmement ceux qui sont chargés d'enseigner ...» (1 Co 12, 28). Dans la Lettre aux Ephésiens, nous lisons: «Chacun de nous a reçu le don de la grâce comme le Christ nous l'a partagée ... Et les dons qu'Il a faits aux hommes, ce sont d'abord les apôtres, puis les prophètes et les missionnaires de l'Evangile, et aussi les pasteurs et ceux qui enseignent. De cette manière, le peuple saint est organisé pour que les tâches du ministère soient accomplies et que se construise le Corps du Christ. Au terme, nous parviendrons tous ensemble à l'unité dans la foi et la vraie connaissance du Fils de Dieu, à l'état d'homme parfait, à la plénitude de la stature du Christ» (Ep 4, 7. 11-13; cf. Rm 12, 4-Cool. Comme il ressort de ces textes et d'autres du Nouveau Testament, les ministères, comme aussi les dons et les tâches ecclésiales, sont multiples et variés.

Les ministères dérivant de l'Ordre

22. Dans l'Eglise nous rencontrons, en premier lieu, les ministères ordonnés, c'est-à-dire les ministères qui dérivent du sacrement de l'Ordre. Le Seigneur Jésus, en effet, choisit et établit les Apôtres _ «germes du Nouvel Israël et en même temps origine de la hiérarchie sacrée»(65) _ avec le mandat de Lui susciter des disciples dans toutes les nations (cf. Mt 28, 19), de former et de diriger le peuple sacerdotal. La mission des Apôtres, que le Seigneur Jésus continue de confier aux pasteurs de son peuple, est un vrai service, que la Sainte Ecriture désigne d'un terme significatif: «diakonia», c'est-à-dire service, ministère. Les ministres reçoivent du Christ ressuscité le charisme de l'Esprit Saint, dans la succession apostolique ininterrompue, au moyen du sacrement de l'Ordre: de Lui, ils reçoivent l'autorité et le pouvoir sacré pour servir l'Eglise, agissant alors «in persona Christi Capitis» («au nom du Christ-Tête en personne»(66), et pour la rassembler dans l'Esprit Saint par le moyen de l'Evangile et des Sacrements.

Les ministères ordonnés sont une grâce immense pour la vie et pour la mission de l'Eglise entière, avant même de l'être pour telle ou telle personne en particulier. Ils sont la réalisation et la manifestation d'une participation au sacerdoce du Christ, différente, par sa nature et non simplement par son degré, de la participation donnée par le Baptême et par la Confirmation à tous les fidèles. D'autre part, le sacerdoce ministériel, comme l'a rappelé le Concile Vatican II, a sa finalité essentielle dans le sacerdoce royal de tous les fidèles et est orienté vers celui-ci(67).

Voilà pourquoi, en vue d'assurer et de faire grandir la communion dans l'Eglise, en particulier en ce qui regarde les ministères divers et complémentaires, les pasteurs doivent avoir la conviction la plus ferme que leur ministère est ordonné au service de tout le peuple de Dieu (cf. Hb 5, 1), et les fidèles laïcs, à leur tour, doivent reconnaître que le sacerdoce ministériel est absolument nécessaire pour leur vie dans l'Eglise et pour leur participation à sa mission(68).

Ministères, offices et fonctions des laïcs

23. La mission salvifique de l'Eglise dans le monde est réalisée non seulement par les ministres qui ont reçu le sacrement de l'Ordre, mais aussi par tous les fidèles laïcs: ceux-ci, en effet, en vertu de leur condition de baptisés et de leur vocation spécifique, participent, dans la mesure propre à chacun, à la fonction sacerdotale, prophétique et royale du Christ.

Les pasteurs, en conséquence, doivent reconnaître et promouvoir les ministères, les offices et les fonctions des fidèles laïcs, offices et fonctions qui ont leur fondement sacramentel dans le Baptême, dans la Confirmation, et de plus, pour beaucoup d'entre eux, dans le Mariage.

En outre, lorsque la nécessité ou l'utilité de l'Eglise l'exigent, les pasteurs peuvent, selon les normes établies par le droit universel, confier aux fidèles laïcs certains offices et certaines fonctions qui, tout en étant liés à leur propre ministère de pasteurs, n'exigent pas cependant le caractère de l'Ordre. Le Code de Droit Canon prescrit: «Là où les nécessités de l'Eglise le conseillent, et à défaut de ministres sacrés, des laïcs peuvent, même sans être lecteurs ou acolytes, remplir en suppléance telle ou telle de leurs fonctions: ministère de la parole, présidence des prières liturgiques, administration du Baptême, distribution de la Sainte Communion, suivant les normes du droit»(69). Il faut remarquer toutefois que l'exercice d'une telle fonction ne fait pas du fidèle laïc un pasteur: en réalité, ce qui constitue le ministère, ce n'est par l'activité en elle-même, mais l'ordination sacramentelle. Seul le sacrement de l'Ordre confère au ministre ordonné une participation particulière à la fonction du Christ Chef et Pasteur et à son sacerdoce éternel(70). La fonction exercée en tant que suppléant tire sa légitimité formellement et immédiatement de la délégation officielle reçue des pasteurs et, dans l'exercice concret de cette fonction, le suppléant est soumis à la direction de l'autorité ecclésiastique(71).

La récente Assemblée synodale a présenté un panorama vaste et significatif de la situation ecclésiale en ce qui concerne les ministères, offices et fonctions des baptisés. Les Pères ont vivement manifesté leur estime pour la très importante collaboration apostolique que les fidèles laïcs, hommes et femmes, apportent à la vie de l'Eglise, par leurs charismes et par toute leur activité en faveur de l'évangélisation, de la sanctification et de l'animation chrétienne des réalités temporelles. En même temps, on a beaucoup apprécié leur dévouement habituel dans les communautés ecclésiales et leur généreuse disponibilité à pratiquer des suppléances dans des situations graves ou des besoins chroniques(72).

A la suite du renouveau liturgique promu par le Concile, les fidèles laïcs eux-mêmes, ayant pris plus nettement conscience des tâches qui leur reviennent dans l'assemblée liturgique et dans sa préparation, se sont rendus largement disponibles pour leur célébration: la célébration liturgique, en effet, est une action sacrée de toute l'assemblée et non pas du seul clergé. Il est donc tout naturel que les actes qui ne sont pas propres aux ministres ordonnés soient exécutés par les fidèles laïcs(73). Une fois réalisée la participation effective des fidèles laïcs dans l'action liturgique, on en est venu ensuite spontanément à admettre aussi leur participation à l'annonce de la Parole de Dieu et à la charge pastorale(74).

Dans cette même Assemblée synodale cependant, à côté de jugements positifs, les critiques n'ont pas manqué. Elles ont porté sur l'usage indiscriminé du terme «ministère», sur la confusion et le nivellement pratiqué entre le sacerdoce commun et le sacerdoce ministériel, sur la non application des lois et des normes ecclésiastiques, l'interprétation arbitraire du concept de «suppléance», la tendance à la «cléricalisation» des fidèles laïcs et le risque de créer en fait une structure ecclésiale de service parallèle à celle qui est fondée sur le sacrement de l'Ordre.

Pour remédier, comme il se doit, à ces dangers, les Pères synodaux ont insisté sur la nécessité d'exprimer clairement, en fixant, au besoin, une terminologie plus précise(75), autant l'unité de la mission de l'Eglise, à laquelle participent tous les baptisés, que la diversité substantielle du ministère des pasteurs, qui est fondé sur le sacrement de l'Ordre, diversité par rapport aux autres ministères, offices et fonctions ecclésiales, fondées elles sur les sacrements du Baptême et de la Confirmation.

Il est alors nécessaire, en premier lieu, que les pasteurs, en reconnaissant et en conférant aux fidèles laïcs les divers ministères, offices et fonctions, mettent le plus grand soin à les instruire de la racine baptismale de ces tâches. Il est nécessaire, ensuite, que les pasteurs veillent à éviter un recours facile et abusif aux présumées «situations de nécessité» ou de «sup pléance nécessaire», là où, objectivement, ce n'est pas le cas, ou bien là où il est possible d'y obvier par une programmation pastorale plus rationnelle.

Les différents offices et fonctions que les fidèles laïcs peuvent légitimement exercer, dans la liturgie, dans la transmission de la foi et dans les structures pastorales de l'Eglise, devront l'être en conformité avec leur vocation laïque spécifique, différente de celle des ministères sacrés. En ce sens, l'exhortation Evangelii nuntiandi, qui a eu des conséquences si grandes et si bienfaisantes pour l'éveil d'une collaboration diversifiée des fidèles laïcs à la vie et à la mission évangélique de l'Eglise, cette exhortation rappelle que «le champ propre de l'activité évangélisatrice des laïcs, c'est le monde, vaste et compliqué, de la politique, de la réalité sociale, de l'économie; comme aussi celui de la culture, de la science et des arts, de la vie internationale, des instruments de communication sociale; et encore d'autres réalités particulièrement ouvertes à l'évangélisation, comme celle de l'amour, de la famille, de l'éducation des enfants et des adolescents, le travail professionnel, la souffrance. Plus il y aura de laïcs pénétrés d'esprit évangélique, responsables de ces réalités et explicitement engagés en ces réalités, compétents dans le travail de leur développement et conscients de l'obligation qui leur incombe de développer toute leur capacité chrétienne souvent jusque là tenue cachée et étouffée, alors plus ces réalités, sans rien perdre ni sacrifier de leur coefficient humain, mais révélant une dimension transcendante souvent ignorée, se trouveront au service de l'édification du Royaume de Dieu, et donc du Salut en Jésus-Christ»(76).

Pendant les travaux du Synode, les Pères ont étudié avec grande attention le Lectorat et l'Acolytat. Autrefois, dans l'Eglise latine, ils n'étaient que les étapes spirituelles de l'itinéraire vers les ministères ordonnés; le Motu proprio de Paul VI Ministeria quaedam (15 août 1972) leur a conféré un certain degré d'autonomie et de stabilité et la possibilité d'être donnés aussi aux fidèles laïcs, mais aux hommes seulement. C'est dans ce même sens que s'exprime le Code de Droit Canon(77). Les Pères ont exprimé le désir que «le "Motu proprio" Ministeria quaedam soit revu, en tenant compte de l'usage des Eglises locales et surtout en précisant les critères selon lesquels doivent être choisis les candidats à chaque ministère»(78).

En ce sens, une Commission spéciale a été constituée, qui a pour but non seulement de répondre à ce désir explicite des Pères synodaux, mais aussi et surtout d'étudier, de manière approfondie, les divers problèmes théologiques, liturgiques, juridiques et pastoraux soulevés par l'abondante floraison actuelle des ministères confiés aux fidèles laïcs.

En attendant que la Commission ait conclu son étude, pour que la pratique ecclésiale des ministères confiés aux fidèles soit ordonnée et fructueuse, toutes les Eglises particulières devront respecter fidèlement les principes théologiques rappelés plus haut, en particulier la différence essentielle entre le sacerdoce ministériel et le sacerdoce commun et, en conséquence, la différence entre les ministères qui dérivent du sacrement de l'Ordre et les ministères qui dérivent des sacrements de Baptême et de Confirmation.

Les charismes

24. Le Saint Esprit, en confiant à l'Eglise-Communion les différents ministères, l'enrichit d'autres dons et impulsions particulières, appelés charismes. Ceux-ci peuvent prendre les formes les plus diverses, soit comme expression de la liberté absolue de l'Esprit qui les accorde, soit comme réponse aux multiples exigences de l'histoire de l'Eglise. La description et la classification que nous fournissent de ces dons les textes du Nouveau Testament sont un signe de leur grande variété: «Chacun reçoit le don de manifester l'Esprit, en vue du bien. A celui-ci est donné, grâce à l'Esprit, le langage de la sagesse de Dieu; à un autre, toujours par l'Esprit, le langage de la connaissance de Dieu; un autre reçoit, dans l'Esprit, le don de la foi; un autre encore, des pouvoirs de guérison dans l'unique Esprit; un autre peut faire des miracles; un autre est un prophète, un autre sait reconnaître ce qui vient vraiment de l'Esprit; l'un reçoit le don de dire toutes sortes de paroles mystérieuses, l'autre le don de les interpréter» (1 Co 12, 7-10; cf. 1 Co 12, 4-6. 28-31; Rm 12, 6-8; 1 P 4, 10-11).

Extraordinaires ou simples et humbles, les charismes sont des grâces de l'Esprit Saint qui ont, directement ou indirectement, une utilité ecclésiale, ordonnés qu'ils sont à l'édification de l'Eglise, au bien des hommes et aux besoins du monde.

De nos jours également, nous pouvons voir s'épanouir divers charismes parmi les fidèles laïcs, hommes et femmes. Ils sont donnés à une personne déterminée, mais ils peuvent être partagés par d'autres, de sorte qu'ils se maintiennent à travers le temps comme un héritage vivant et précieux, qui engendre une affinité spirituelle particulière entre de nombreuses personnes. C'est précisément au sujet de l'apostolat des laïcs que le Concile Vatican II écrit: «Pour l'exercice de cet apostolat, le Saint Esprit qui sanctifie le peuple de Dieu par les sacrements et le ministère accorde en outre aux fidèles des dons particuliers (cf. 1 Co 12, 7), les "répartissant à chacun comme Il l'entend" (cf. 1 Co 12, 11), pour que tous et "chacun selon la grâce reçue, se mettant au service des autres, soient eux-mêmes de bons intendants de la grâce multiforme de Dieu" (1 P 4, 10), en vue de l'édification du Corps tout entier dans la charité (cf. Ep 4, 16)»(79).

Selon la logique du dynamisme généreux qui les a fait jaillir, les dons du Saint Esprit exigent de tous ceux qui les ont reçus qu'ils les exercent pour la croissance de toute l'Eglise, comme nous le rappelle le Concile(80).

Les charismes sont à accueillir avec reconnaissance par celui qui les reçoit, mais aussi par tous les membres de l'Eglise. Ils sont, en effet, une merveilleuse richesse de grâce pour la vitalité apostolique et pour la sainteté de tout le Corps du Christ; pourvu cependant qu'il s'agisse de dons qui proviennent véritablement de l'Esprit Saint et qu'ils soient exercés de façon pleinement conforme aux impulsions authentiques de ce même Esprit. C'est dans ce sens qu'apparaît toujours plus nécessaire le discernement des charismes. En réalité, comme l'ont déclaré les Pères du Synode, «l'action de l'Esprit Saint, qui souffle où il veut, n'est pas toujours facile à distinguer ni à recevoir. Nous savons que Dieu agit en tous les fidèles chrétiens et nous avons bien conscience des bienfaits qui procèdent des charismes à la fois en faveur de chacun et pour toute la communauté chrétienne. Toutefois, nous avons également conscience de la puissance du péché et de ses efforts pour semer le trouble et la confusion dans la vie des fidèles et des communautés»(81).

Voilà pourquoi aucun charisme ne dispense de la référence et de la soumission aux Pasteurs de l'Eglise. De façon très claire le Concile écrit: «C'est à ceux qui ont la charge de l'Eglise de porter un jugement sur l'authenticité de ces dons et sur leur usage bien entendu. C'est à eux qu'il convient spécialement, non pas d'éteindre l'Esprit, mais de tout éprouver pour retenir ce qui est bon (cf. 1 Th 5, 12. 19-21)»(82), afin que tous les charismes coopèrent, dans leur diversité et leur complémentarité, au bien commun(83).

La participation des fidèles laïcs à la vie de l'Eglise

25. Les fidèles laïcs participent à la vie de l'Eglise non seulement en exerçant leurs ministères et leurs charismes, mais de bien d'autres façons encore.

Cette participation trouve son expression primordiale et nécessaire dans la vie et la mission des Eglises particulières, les Diocèses, où «est vraiment présente et agissante l'Eglise du Christ, une, sainte, catholique et apostolique»(84).

Eglises particulières et Eglise universelle

Pour une juste participation à la vie de l'Eglise, il est de toute urgence que les fidèles laïcs aient une vision claire et précise de l'Eglise particulière dans sa relation avec l'Eglise universelle. L'Eglise particulière n'est pas le fruit d'une fragmentation de l'Eglise universelle, pas plus que l'Eglise universelle n'est simplement la somme des Eglises particulières; ce qui les unit entre elles, au contraire, c'est un lien vivant, essentiel et permanent, en tant que l'Eglise universelle existe et se manifeste dans les Eglises particulières. C'est pourquoi le Concile affirme que les Eglises particulières «sont formées à l'image de l'Eglise universelle, c'est en elles et à partir d'elles qu'existe l'Eglise Catholique, une et unique»(85).

Le Concile encore stimule les fidèles laïcs à vivre activement leur appartenance à l'Eglise particulière, tout en assumant une inspiration toujours plus «catholique». «Les laïcs développeront sans cesse le sens du diocèse _ lisons-nous dans le Décret sur l'apostolat des laïcs _ dont la paroisse est comme une cellule; ils seront toujours prompts à l'invitation de leur pasteur à participer aux initiatives du diocèse. De plus, pour répondre aux nécessités des villes et des régions rurales, ils ne borneront pas leur coopération aux limites de la paroisse ou du diocèse, mais ils s'efforceront de l'élargir au plan interparoissial, interdiocésain, national et international: d'autant plus que l'accroissement constant des migrations de population, la multiplication des liens mutuels, la facilité des communications ne permettent plus à une partie de la société de demeurer repliée sur elle-même. Les laïcs se préoccuperont donc des exigences du Peuple de Dieu répandu sur toute la terre»(86).

Le dernier Synode a demandé, dans ce même ordre d'idées, que l'on favorise la création de conseils pastoraux diocésains, auxquels on puisse recourir en cas de besoin. Il s'agit ici, en réalité, de la principale forme de collaboration et de dialogue, et en même temps de discernement, sur le plan diocésain. La participation des fidèles laïcs à ces Conseils pourra élargir le recours aux consultations et ainsi le principe de la collaboration_ qui en certains cas peut s'étendre à la prise de décisions _ sera appliqué de manière plus étendue et plus ferme(87).

La participation des fidèles laïcs aux synodes diocésains et aux conciles particuliers, provinciaux ou pléniers, est prévue par le Code de Droit Canon(88); elle pourra favoriser la communion et aider la mission ecclésiale de l'Eglise particulière, autant dans ses propres limites qu'en relation avec les autres Eglises particulières de la province ecclésiastique ou de la conférence épiscopale.

Les conférences épiscopales sont invitées à étudier le moyen le plus pratique pour développer, sur le plan national ou régional, la consultation et la collaboration des fidèles laïcs, hommes et femmes, de façon à bien prendre conscience des problèmes communs et à manifester la communion ecclésiale de tous(89).

La paroisse

26. Tout en ayant une dimension universelle, la communion ecclésiale trouve son expression la plus immédiate et la plus visible dans la paroisse: celle-ci est le dernier degré de la localisation de l'Eglise; c'est, en un certain sens, l'Eglise elle-même qui vit au milieu des maisons de ses fils et de ses filles(90).

Nous devons tous redécouvrir, dans la foi, le vrai visage de la paroisse, c'est-à-dire le «mystère» même de l'Eglise présente et agissante en elle. Si parfois elle n'est pas riche de personnes et de moyens, si même elle est parfois dispersée sur des territoires immenses, ou indiscernable au milieu de quartiers modernes populeux et confus, la paroisse n'est pas, en premier lieu, une structure, un territoire, un édifice; c'est avant tout «la famille de Dieu, fraternité qui n'a qu'une âme»(91). C'est «une maison de famille, fraternelle et accueillante»(92); c'est «la communauté des fidèles»(93). En définitive, la paroisse est fondée sur une réalité théologique, car c'est une communauté eucharistique(94). Cela signifie que c'est une communauté apte à célébrer l'Eucharistie, en qui se trouvent la racine vivante de sa constitution et de sa croissance et le lien sacramentel de son être en pleine communion avec toute l'Eglise. Cette aptitude se fonde sur le fait que la paroisse est une communauté de foi et une communauté organique, c'est-à-dire constituée par des ministres ordonnées et par les autres chrétiens, sous la responsabilité d'un curé qui, représentant l'Evêque du diocèse(95), est le lien hiérarchique avec toute l'Eglise particulière.

Il est certain que le travail de l'Eglise, à notre époque, est immense; pour l'accomplir, la paroisse ne peut évidemment pas suffire à elle seule. C'est pourquoi le Code de Droit Canon prévoit des formes de collaboration entre paroisses dans un même district(96) et il recommande à l'Evêque le soin de toutes les catégories de fidèles, même celles qui ne sont pas touchées par les soins de la pastorale ordinaire(97). Beaucoup de lieux de rencontre, en effet, et divers modes de présence et d'action sont nécessaires pour porter la parole et la grâce de l'Evangile dans les conditions de vie si variées des hommes d'aujourd'hui; beaucoup d'autres modes de rayonnement spirituel et d'apostolat du milieu, dans le domaine culrel, social, éducatif, professionnel, etc., ne peuvent avoir la paroisse pour centre ou point de départ. Et pourtant, aujourd'hui encore, la paroisse vit une époque nouvelle et prometteuse. Paul VI, au début de son Pontificat, s'adressant au clergé romain, déclarait: «Nous croyons bien simplement que cette structure antique et vénérable qu'est la paroisse a une mission indispensable d'une grande actualité; c'est elle qui doit créer la première communauté du peuple chrétien; c'est elle qui doit l'initier à l'expression normale de la vie liturgique et le rassembler dans la célébration de la liturgie; c'est à elle qu'il revient de conserver et de raviver la foi dans les foules d'aujourd'hui; c'est elle encore qui doit leur fournir l'enseignement de la doctrine salvifique du Christ; à elle encore de pratiquer avec coeur et dévouement l'humble charité des oeuvres bonnes et fraternelles»(98).

Les Pères du Synode ont étudié très attentivement la situation actuelle de beaucoup de paroisses, et ont demandé qu'elles se renouvellent plus résolument: «Beaucoup de paroisses, tant dans les régions urbaines qu'en pays de mission, ne peuvent fonctionner avec plein succès par suite du manque de moyens matériels ou de ministres ordonnés, ou encore en raison des conditions spéciales de vie de certains chrétiens (comme, par exemple, les exilés et les immigrés). Pour que toutes ces paroisses soient de vraies communautés chrétiennes, les autorités locales doivent favoriser: a) l'adaptation des structures paroissiales avec la grande souplesse accordée par le Droit Canon, surtout en favorisant la participation des laïcs aux responsabilités pastorales; b) les petites communautés ecclésiales de base, que l'on appelle aussi communautés de vie, où les fidèles puissent se communiquer mutuellement la Parole de Dieu et s'exprimer dans le service de l'amour; ces communautés sont d'authentiques expressions de la communion ecclésiale et des centres d'évangélisation, en communion avec leurs Pasteurs»(99). Pour le renouveau des paroisses et pour mieux assurer leur efficacité opératoire, on devra favoriser des formes de coopération, mêmes institutionelles, entre les différentes paroisses d'un même territoire.

Engagement apostolique dans la paroisse

27. Voyons maintenant de plus près la communion et la participation des fidèles laïcs à la vie de la paroisse. Il faut ici rappeler à l'attention de tous les fidèles laïcs, hommes et femmes, une parole si vraie, si pleine de sens et stimulante, du Concile: «Dans les communautés ecclésiales, leur action est si nécessaire que, sans elle, l'apostolat des pasteurs ne peut, la plupart du temps, obtenir son plein effet»(100). C'est là une affirmation fondamentale, qui doit, de toute évidence, être comprise à la lumière de «l'ecclésiologie de communion»: parce qu'ils sont divers et complémentaires, les ministères et les charismes sont tous nécessaires à la croissance de l'Eglise, chacun selon sa propre modalité.

Les fidèles laïcs doivent être toujours plus convaincus du sens que prend leur engagement apostolique dans leur paroisse. C'est encore le Concile qui le souligne avec raison: «La paroisse offre un exemple remarquable d'apostolat communautaire, car elle rassemble dans l'unité toutes les diversités humaines qui se trouvent en elle et elle les insère dans l'universalité de l'Eglise. Que les laïcs prennent l'habitude de travailler dans la paroisse en étroite union avec leurs prêtres, d'apporter à la communauté ecclésiale leurs propres problèmes, ceux du monde et les questions qui concernent le salut des hommes, pour les examiner et les résoudre en tenant compte de l'avis de tous. Selon leurs possibilités, ils apporteront leur concours à toute entreprise apostolique et missionnaire de leur famille ecclésiale»(101).

L'allusion du Concile à l'examen et à la solution des problèmes pastoraux «avec le concours de tous» doit trouver son développement adéquat et bien structuré dans la mise en valeur la plus sincère, la plus large et la plus ferme des conseils pastoraux paroissiaux, sur lesquels les Pères du Synode ont à juste titre nettement insisté(102).

Dans la situation actuelle, les fidèles laïcs peuvent et doivent faire énormément pour la croissance d'une authentique communion ecclésiale à l'intérieur de leurs paroisses et pour éveiller l'élan missionnaire vers les incroyants et aussi vers ceux, parmi les croyants, qui ont abandonné ou laissé s'affaiblir la pratique de la vie chrétienne.

Si la paroisse est l'Eglise implantée au milieu des maisons des hommes, elle vit et agit insérée profondément dans la société humaine et intimement solidaire de ses aspirations et de ses drames. Bien souvent le contexte social, surtout en certains pays et certains milieux, subit les secousses violentes des forces de désagrégation et de déshumanisation: l'homme est égaré et désorienté, mais dans son coeur subsiste toujours plus le désir de pouvoir expérimenter et cultiver des rapports plus fraternels et plus humains. La réponse à ce désir, la paroisse peut la fournir si, grâce à la participation active des fidèles laïcs, elle reste fidèle à sa vocation et mission originelles: être dans le monde le «lieu» de la communion des croyants, et tout à la fois le «signe» et l'«instrument» de la vocation de tous à la communion; en un mot, la paroisse doit être la maison ouverte à tous, et au service de tous, ou, comme se plaisait à dire Jean XXIII, la fontaine du village à laquelle tout le monde vient étancher sa soif.

Formes de participation des fidèles laïcs dans la vie de l'Eglise

28. Les fidèles laïcs, unis aux prêtres, aux religieux et aux religieuses, forment l'unique Peuple de Dieu, l'unique Corps du Christ.

Etre «membre» de l'Eglise, cela n'empêche pas chaque chrétien d'être un «être unique et irremplaçable»; tout au contraire cela donne son sens le plus profond à l'unicité irremplaçable de chacun, en tant que celle-ci est source de diversité et de richesse pour l'Eglise entière. C'est en ce sens que Dieu en Jésus-Christ appelle chacun de nous par son nom propre, qui ne peut prêter à confusion. L'appel du Seigneur: «Allez vous aussi à ma vigne» s'adresse à chacun personnellement et signifie: «Viens, toi aussi, à ma vigne!».

C'est ainsi que chacun de nous, dans son unicité irremplaçable, s'offre pour la croissance de la communion ecclésiale, par son être et par son agir, tout comme, par ailleurs, il reçoit et assimile, d'une façon qui lui est propre, la richesse de l'Eglise entière. C'est cela la «Communion des Saints» que nous affirmons dans le Credo: le bien de tous devient le bien de chacun et le bien de chacun devient le bien de tous. «Dans la Sainte Eglise _ écrit Saint Grégoire le Grand _ chacun est le soutien des autres et les autres sont le soutien de chacun»(103).

Formes personnelles de participation

Il est absolument nécessaire que chaque fidèle laïc ait toujours vive conscience d'être un «membre de l'Eglise», à qui est confiée une tâche originale, irremplaçable et qu'il ne peut déléguer, une tâche à remplir pour le bien de tous. Dans cette perspective, prend tout son sens l'affirmation du Concile sur la nécessité absolue de l'apostolat de chaque personne: «L'apostolat que chacun doit exercer personnellement et qui découle toujours d'une vie vraiment chrétienne (cf. Jn 4, 14) est le principe et la condition de tout apostolat des laïcs, même collectif, et rien ne peut le remplacer. Cet apostolat individuel est toujours et partout fécond, il est en certaines circonstances le seul adapté et le seul possible. Tous les laïcs y sont appelés et en ont le devoir, quelle que soit leur condition, même s'ils n'ont pas l'occasion ou la possibilité de collaborer dans des mouvements»(104).

L'apostolat personnel renferme de grandes richesses qui demandent à être découvertes pour une intensification du dynamisme missionnaire de chaque fidèle laïc. Grâce à cette forme d'apostolat, le rayonnement de l'Evangile peut s'exercer d'une façon très capillaire, en atteignant tous les lieux et les milieux avec qui est en contact la vie quotidienne et concrète des laïcs. Il s'agit, au surplus, d'un rayonnement constant, parce que lié à la cohérence continuelle de la vie personnelle avec la foi, et en même temps d'un rayonnement particulièrement incisif, parce que, dans un partage total des conditions de vie, de travail, des difficultés et des espérances de leurs frères, les fidèles laïcs peuvent atteindre le coeur de leurs voisins, de leurs amis, de leurs collègues, et l'ouvrir à l'horizon total, au sens plénier de l'existence: la communion avec Dieu et entre les hommes.

Formes collectives de participation

29. La communion ecclésiale, déjà présente et opérante dans l'action de chaque personne, trouve une expression spécifique dans l'action en commun des fidèles laïcs, c'est-à-dire une action solidaire menée dans une participation responsable à la vie et à la mission de l'Eglise.

Ces derniers temps, le phénomène d'association entre laïcs a pris des formes particulièrement variées et une grande vitalité. Si, dans l'histoire de l'Eglise, les associations de fidèles ont constitué une ligne continue, comme en témoignent jusqu'à nos jours les diverses confréries, les tiers-ordres et les fraternités, dans les temps modernes, ce phénomène a pris un essor spécial; on a vu naître et se répandre différentes formes de groupements: associations, groupes, communautés, mouvements. On peut parler d'une nouvelle saison d'association des fidèles laïcs. En effet, «à côté des groupements traditionnels, et parfois à leurs racines mêmes, ont germé des mouvements et groupements nouveaux, dotés d'une physionomie et d'une finalité spécifiques: tant sont grandes la richesse et la variété des ressources de l'Esprit Saint, dans le tissu ecclésial, tant sont grandes également la capacité d'initiative et la générosité de notre laïcat»(105).

Ces groupements de laïcs apparaissent souvent très différents les uns des autres en divers aspects, comme leur forme extérieure, les cheminements et les méthodes d'éducation, et les champs d'action. On y découvre cependant les lignes d'une convergence large et profonde dans la finalité qui les inspire: celle de participer de façon responsable à la mission de l'Eglise, qui est de porter l'Evangile du Christ comme source d'espérance pour l'homme et de renouveau pour la société.

Que des fidèles laïcs se regroupent pour des motifs spirituels et apostoliques, cela découle de plusieurs sources et correspond à des exigences diverses: c'est l'expression, en effet, de la nature sociale de la personne, et la réponse à un besoin d'efficacité plus vaste et plus mordante. En réalité, l'incidence «culturelle», source et aiguillon mais aussi fruit et signe de toute autre transformation du milieu et de la société, ne peut s'obtenir que par le travail non pas tant d'individus isolés que d'un «sujet social», c'est-à-dire d'un groupe, d'une communauté, d'une association, d'un mouvement. C'est surtout vrai dans le contexte d'une société pluraliste et fractionnée _ comme elle l'est aujourd'hui en tant de pays du monde _ et aussi en face de problèmes devenus excessivement complexes et difficiles. Par ailleurs, surtout lorsqu'il s'agit d'un monde sécularisé, les différentes formes de regroupement peuvent représenter pour beaucoup de gens une aide précieuse en vue d'une vie chrétienne fidèle aux exigences de l'Evangile et pour un engagement missionnaire et apostolique.

Au-delà de ces motifs, la raison la plus profonde qui justifie et exige le regroupement des fidèles laïcs est d'ordre théologique: c'est une raison ecclésiologique, comme le reconnaît ouvertement le Concile Vatican II, qui voit dans l'apostolat associé un «signe de la communion et de l'unité de l'Eglise dans le Christ»(106).

C'est un «signe» qui doit se manifester dans les rapports de «communion» autant à l'intérieur qu'à l'extérieur des diverses formes d'associations, dans le contexte très large de la communauté chrétienne. C'est précisément la raison ecclésiologique dont nous parlions plus haut qui explique, d'une part, le «droit» d'association propre aux fidèles laïcs et, d'autre part, la nécessité de «critères» de discernement pour vérifier l'authenticité ecclésiale des formes d'association.

Il faut avant tout reconnaître la liberté d'association des fidèles laïcs dans l'Eglise. Cette liberté est à proprement parler un droit véritable, qui ne dérive pas d'une sorte de «concession» de l'autorité, mais qui découle du Baptême, qui, en tant que sacrement, appelle les fidèles laïcs à participer activement à la communion et à la mission de l'Eglise. Sur ce point, le Concile parle clairement: «Le lien nécessaire avec l'autorité ecclésiastique étant assuré, les laïcs ont le droit de fonder des associations, de les diriger, et d'adhérer à celles qui existent»(107). Et le Code de Droit Canon affirme: «Les fidèles ont le droit de fonder et de diriger librement des associations de charité ou de piété, ou qui se proposent de travailler à l'extension de la vocation chrétienne dans le monde; ils ont aussi le droit de tenir des réunions afin de poursuivre ensemble ces mêmes fins»(108).

Il s'agit ici d'une liberté reconnue et garantie par l'autorité ecclésiastique et qui doit s'exercer toujours et uniquement dans la communion de l'Eglise; en ce sens, le droit des fidèles laïcs à se réunir est essentiellement lié à la vie de communion et à la mission de l'Eglise elle-même.

Critères d'ecclésialité pour les associations de laïcs

30. C'est toujours dans cette perspective de la communion et de la mission de l'Eglise, et non pas en opposition avec la liberté d'association, qu'il faut comprendre la nécessité de critères bien clairs et précis de discernement et de reconnaissance des associations de laïcs, qu'on nomme aussi «critères d'ecclésialité».

Comme critères fondamentaux pour le discernement de toute association de fidèles laïcs dans l'Eglise on peut retenir, en les prenant ensemble, les critères suivants:

_ Le primat donné à la vocation de tout chrétien à la sainteté, manifesté «par les fruits de grâce que l'Esprit produit dans les fidèles»(109), comme croissance vers la plénitude de la vie chrétienne et la perfection de la charité(110).

En ce sens toute association de fidèles laïcs est appelée à être toujours davantage un moyen de sanctification dans l'Eglise, un moyen qui favorise et encourage «une union plus intime entre la vie concrète de leurs membres et leur foi»(111).

_ L'engagement à professer la foi catholique en accueillant et proclamant la vérité sur le Christ, sur l'Eglise et sur l'homme, en conformité avec l'enseignement de l'Eglise, qui l'interprète de façon authentique. Toute association de fidèles laïcs devra donc être un lieu d'annonce et de proposition de la foi et d'éducation à cette même foi dans son contenu intégral.

_ Le témoignage d'une communion solide et forte dans sa conviction, en relation filiale avec le Pape, centre perpétuel et visible de l'unité de l'Eglise universelle(112), et avec l'Evêque, «principe visible et fondement de l'unité»(113) de l'Eglise particulière, et dans «l'estime mutuelle de toutes les formes apostoliques de l'Eglise»(114).

La communion avec le Pape et avec l'Evêque doit s'exprimer dans une disponibilité loyale à recevoir leurs enseignements doctrinaux et leurs directives pastorales. La communion ecclésiale exige, de plus, la reconnaissance du légitime pluralisme des fidèles laïcs dans l'Eglise et, en même temps, la disponibilité à une mutuelle collaboration.

_ L'accord et la coopération avec le but apostolique de l'Eglise, qui est «l'évangélisation et la sanctification des hommes, et la formation chrétienne de leur conscience, afin qu'ils soient en mesure de pénétrer de l'esprit de l'Evangile les diverses communautés et les divers milieux»(115).

Dans cette perspective, à toutes les formes d'association des fidèles laïcs et à chacune d'elles on demande qu'elles soient animées d'un élan missionnaire qui en fasse des instruments toujours plus actifs d'une nouvelle évangélisation.

_ L'engagement à être présents dans la société humaine pour le service de la dignité intégrale de l'homme, conformément à la doctrine sociale de l'Eglise.

En ce sens, les associations de fidèles laïcs doivent devenir des courants vivants de participation et de solidarité pour créer des conditions plus justes et plus fraternelles à l'intérieur de la société.

Les critères fondamentaux que nous venons d'exposer trouvent une vérification dans les fruits concrets qui accompagnent la vie et les oeuvres des diverses formes associatives, en particulier le goût renouvelé pour la prière, la contemplation, la vie liturgique et sacramentelle; l'aide à la prise de conscience des vocations au mariage chrétien, au sacerdoce ministériel, à la vie consacrée; la disponibilité à prendre part aux programmes et aux activités de l'Eglise tant sur le plan national que sur le plan international; l'engagement dans la catéchèse et la capacité pédagogique pour la formation des chrétiens; l'impulsion à assurer une présence chrétienne dans les différents milieux de la vie sociale; la création et l'animation d'oeuvres caritatives, culturelles et spirituelles; l'esprit de détachement et de pauvreté évangélique en vue d'une plus généreuse charité envers tous; la conversion à la vie chrétienne ou le retour à la communion de baptisés «lointains».

Le service des Pasteurs pour la communion

31. Même dans le cas où certaines formes d'associations éprouvent de bien compréhensibles difficultés et où de nouvelles formes tendent à s'imposer, les Pasteurs de l'Eglise ne peuvent pas renoncer à l'exercice de leur autorité, non seulement pour le bien de l'Eglise, mais aussi pour le bien des associations de laïcs elles-mêmes. Il faut donc qu'ils doublent leur oeuvre de discernement d'un effort pour guider et surtout pour encourager la croissance des associations de fidèles laïcs dans la communion et la mission de l'Eglise.

Il est extrêmement opportun que certaines associations nouvelles et certains mouvements nouveaux, étant donné leur diffusion souvent nationale et même internationale, reçoivent une reconnaissance officielle, une approbation explicite de l'autorité ecclésiastique compétente. C'est dans ce sens déjà que le Concile affirmait: «Les liens de l'apostolat des laïcs avec la hiérarchie peuvent revêtir des modalités différentes selon la diversité des formes et des buts de cet apostolat... Certaines formes de l'apostolat des laïcs sont reconnues explicitement par la hiérarchie sous une forme ou sous une autre. En outre, eu égard aux exigences du bien commun de l'Eglise, l'autorité ecclésiastique peut choisir et promouvoir d'une façon spéciale certaines associations et institutions apostoliques, visant directement un but spirituel, et assumer à leur égard une responsabilité particulière»(116).

Parmi les diverses formes d'apostolat des laïcs qui ont un rapport particulier avec la Hiérarchie, les Pères du Synode ont rappelé explicitement divers mouvements et associations d'Action catholique, dans lesquels «les laïcs s'associent librement d'une manière organique et stable, sous l'impulsion de l'Esprit Saint, en communion avec l'Evêque et avec les prêtres, pour pouvoir travailler, de la manière la plus propre à leur vocation et avec une méthode particulière, à l'expansion de toute la communauté chrétienne, aux projets pastoraux et à l'animation évangélique de tous les milieux de vie, avec fidélité et zèle»(117).

Le Conseil Pontifical des Laïcs est chargé de préparer un tableau des associations qui reçoivent l'approbation officielle du Saint-Siège et de définir, avec le Secrétariat pour l'Unité des Chrétiens, les conditions auxquelles peut être approuvée une association oecuménique où il y aurait une majorité catholique et une minorité non catholique; il doit aussi déterminer les cas où il est impossible de porter un jugement positif(118).

Tous, Pasteurs et fidèles, nous sommes tenus de favoriser et d'entretenir sans cesse l'existence de liens et de rapports fraternels d'estime, de cordialité, de collaboration entre les différentes formes d'associations de laïcs. C'est de cette façon seulement que la richesse des dons et des charismes que le Seigneur nous offre peut porter sa contribution féconde et ordonnée à l'édification de la maison commune: «Pour l'édification solidaire de la maison commune, il faut, en outre, que l'on renonce à tout esprit d'antagonisme et de contestation; qu'on rivalise plutôt dans l'estime mutuelle (cf. Rm 12, 10), dans le souci de se manifester affection et volonté de collaboration, avec la patience, la clairvoyance, la disponibilité au sacrifice que tout cela peut comporter» (119).

Revenons encore une fois aux paroles de Jésus: «Je suis la vigne et vous êtes les sarments» (Jn 15, 5), pour rendre grâce à Dieu du grand don de la communion ecclésiale, reflet dans le temps de l'éternelle et ineffable communion d'amour du Dieu Unique et Trinitaire. La conscience du don doit être accompagnée d'un sens très fort de responsabilité: en effet c'est un don qui, comme le talent évangélique, exige d'être transformé en une vie de communion croissante.

Etre responsable du don de la communion signifie, avant tout, être engagé à vaincre toute tentation de division et d'opposition, qui menace la vie et l'engagement apostolique des chrétiens. Le cri de douleur et de déception de l'apôtre Paul _ «J'entends que chacun de vous dit: "moi je suis à Paul, et moi à Apollos, et moi à Céphas, et moi au Christ"; le Christ est-il divisé?» (1 Co 1, 12-13) _ continue à retentir comme un reproche face aux «déchirements du corps du Christ». Par contre, que résonnent comme un appel persuasif les autres paroles de l'Apôtre: «Je vous en prie, frères, par le nom de notre Seigneur Jésus-Christ, ayez tous le même langage; qu'il n'y ait point parmi vous de divisions; soyez étroitement unis dans le même esprit et dans la même pensée» (1 Co 1, 10).

Ainsi la vie de communion ecclésiale devient un signe pour le monde et une force d'attraction qui conduit à croire au Christ: «Comme toi, Père, Tu es en moi et moi en Toi, qu'eux aussi soient en nous un seul être, afin que le monde croie que Tu m'as envoyé» (Jn 17, 21). De cette manière, la communion s'ouvre à la mission, elle se fait elle-même mission.
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Apostolat des Laïcs - Vocation et Mission des Laïcs dans l'Eglise et dans le Monde Empty Re: Apostolat des Laïcs - Vocation et Mission des Laïcs dans l'Eglise et dans le Monde

Message par Her Dim 3 Avr - 21:25

EXHORTATION APOSTOLIQUE
POST-SYNODALE
CHRISTIFIDELES LAICI
DE SA SAINTETE LE PAPE
JEAN-PAUL II
SUR LA VOCATION
ET LA MISSION DES LAÏCS
DANS L'EGLISE ET DANS LE MONDE

Donné à Rome, près de Saint-Pierre, le 30 Décembre 1988, en la fête de la Sainte Famille de Jésus, Marie et Joseph. (Suite 2) :


CHAPITRE III

JE VOUS AI ETABLIS POUR QUE VOUS ALLIEZ ET QUE VOUS PORTIEZ DU FRUIT
La co-responsabilité des fidèles laïcs dans l'Eglise-Mission

Communion missionnaire

32. Reprenons l'image biblique de la vigne et des sarments. Elle nous introduit de façon immédiate et naturelle à la considération de la fécondité et de la vie. Enracinés dans la vigne, vivifiés par elle, les sarments sont appelés à porter du fruit: «Moi, je suis la vigne, et vous, les sarments. Celui qui demeure en moi et en qui je demeure, celui-là donne beaucoup de fruit» (Jn 15, 5). Porter du fruit est une exigence essentielle de la vie chrétienne et ecclésiale. Celui qui ne porte pas de fruit ne reste pas dans la communion: «Tout sarment qui est en moi, mais qui ne porte pas de fruit, (mon Père) l'enlève» (Jn 15, 2).

La communion avec Jésus, d'où découle la communion des chrétiens entre eux, est absolument indispensable pour porter du fruit: «En dehors de moi, vous ne pouvez rien faire» (Jn 15, 5) Et la communion avec les autres est le fruit le plus beau que les sarments peuvent porter: c'est, en effet, un don du Christ et de son Esprit.

Or, la communion engendre la communion et se présente essentiellement comme communion missionnaire .Jésus, en effet, dit à ses disciples: «Ce n'est pas vous qui m'avez choisi, c'est moi qui vous ai choisis et établis afin que vous alliez, que vous donniez du fruit et que votre fruit demeure» (Jn 15, 16).

La communion et la mission sont profondément unies entre elles, elles se compénètrent et s'impliquent mutuellement, au point que la communion représente la source et tout à la fois le fruit de la mission: la communion est missionnaire et la mission est pour la communion. C'est toujours le même et identique Esprit qui appelle et unit l'Eglise et qui l'envoie prêcher l'Evangile «jusqu'aux extrémités de la terre» (Ac 1, Cool. De son côté, l'Eglise sait que la communion, reçue en don, a une destination universelle. Ainsi donc, l'Eglise se sent débitrice, envers l'humanité entière et envers chaque homme, du don reçu de l'Esprit Saint, qui répand dans le coeur des croyants la charité de Jésus-Christ, force de cohésion interne et tout à la fois d'expansion au dehors. La mission de l'Eglise dérive de sa nature même, telle que le Christ l'a voulue: celle d'être «le signe et le moyen... de l'unité de tout le genre humain»(120). Cette mission a pour but de faire connaître et de faire vivre par tous la «nouvelle» communion qui, par le Fils de Dieu fait homme, est entrée dans l'histoire du monde. C'est en ce sens que le témoignage de l'évangéliste Jean définit de façon désormais irrévocable le terme «béatifiant» vers lequel tend l'entière mission de l'Eglise: «Ce que nous avons contemplé, ce que nous avons entendu, nous vous l'annonçons à vous aussi, pour que, vous aussi, vous soyez en communion avec nous. Et nous, nous sommes en communion avec le Père et avec son Fils, Jésus-Christ» (1 Jn 1, 3).

Or, dans le contexte de la mission de l'Eglise, le Seigneur confie aux fidèles laïcs, en communion avec tous les autres membres du Peuple de Dieu, une grande part de responsabilité. Les Pères du Concile Vatican II en avaient bien conscience: «Les pasteurs savent bien l'importance de la contribution des laïcs au bien de l'Eglise entière. Ils savent qu'ils n'ont pas été eux-mêmes institués par le Christ pour assumer à eux seuls tout l'ensemble de la mission salutaire de l'Eglise à l'égard du monde, leur tâche magnifique consistant à remplir leur mission de pasteurs à l'égard des fidèles et à reconnaître les ministères et les grâces propres à ceux-ci d'une manière telle que tout le monde à sa façon et dans l'unité apporte son concours à l'oeuvre commune»(121). Leur conviction a été reprise ensuite,avec une clarté et une vigueur nouvelles, dans tous les travaux du Synode.

Annoncer l'Evangile

33. Les fidèles laïcs, précisément parce qu'ils sont membres de l'Eglise, ont la vocation et la mission d'annoncer l'Evangile: à cette activité ils sont habilités et engagés par les sacrements de l'initiation chrétienne et par les dons du Saint Esprit.

Nous lisons déjà dans un texte clair et dense du Concile Vatican II: «Participant à la fonction du Christ, prêtre, prophète et roi, les laïcs ont leur part active dans la vie et l'action de l'Eglise ... Nourris par leur participation active à la vie liturgique de leur communauté, ils s'emploient avec zèle à ses oeuvres apostoliques; ils acheminent vers l'Eglise des hommes qui en étaient peut-être fort éloignés; ils collaborent avec ardeur à la diffusion de la parole de Dieu, particulièrement par les catéchismes; en apportant leur compétence, ils rendent plus efficace le ministère auprès des âmes, de même que l'administration des biens de l'Eglise»(122).

Or c'est dans l'évangélisation que se concentre et se déploie toute la mission de l'Eglise, dont le chemin historique se déroule sous la grâce et le commandement de Jésus-Christ: «Allez dans le monde entier. Proclamez la Bonne Nouvelle à toute la création» (Mc 16, 15). «Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu'à la fin du monde» (Mt 28, 20). «Evangéliser _ écrit Paul VI _ c'est la grâce et la vocation propre de l'Eglise, son identité la plus profonde»(123).

Par le moyen de l'évangélisation, l'Eglise se construit et se forme comme communauté de foi; plus précisément, comme communauté d'une foi confessée dans l'adhésion à la Parole de Dieu, célébrée dans les sacrements, vécue dans la charité, qui est comme l'âme de l'existence morale chrétienne. En effet, la «bonne nouvelle» tend à éveiller dans le coeur et dans la vie de l'homme la conversion et l'attachement personnel à Jésus-Christ, Sauveur et Seigneur; elle dispose au Baptême et à l'Eucharistie et elle se renforce dans la résolution et la réalisation de la vie nouvelle selon l'Esprit.

Il est bien certain que le commandement de Jésus _ «Allez et prêchez l'Evangile» _ garde toujours vivante sa valeur et s'impose avec une urgence qui ne faiblit pas. Toutefois la situation actuelle, non seulement du monde mais aussi de tant de secteurs de l'Eglise, exige absolument que la parole du Christ reçoive une obéissance plus prompte et généreuse. Chaque disciple est appelé personnellement; aucun ne peut refuser de donner sa réponse personnelle: «Malheur à moi si je n'annonçais pas l'Evangile» (1 Co 9, 16).

L'heure est venue d'entreprendre une nouvelle évangélisation

34. Des pays et des nations entières où la religion et la vie chrétienne étaient autrefois on ne peut plus florissantes et capables de faire naître des communautés de foi vivante et active sont maintenant mises à dure épreuve et parfois sont même radicalement transformées, par la diffusion incessante de l'indifférence religieuse, de la sécularisation et de l'athéisme. Il s'agit en particulier des pays et des nations de ce qu'on appelle le Premier Monde, où le bien-être économique et la course à la consommation, même s'ils côtoient des situations effrayantes de pauvreté et de misère, inspirent et alimentent une vie vécue «comme si Dieu n'existait pas». Actuellement l'indifférence religieuse et l'absence totale de signification qu'on attribue à Dieu, en face des problèmes graves de la vie, ne sont pas moins préoccupantes ni délétères que l'athéisme déclaré. La foi chrétienne, même lorsqu'elle survit en certaines de ses manifestations traditionnelles et rituelles, tend à être arrachée des moments les plus importants de l'existence, comme les moments de la naissance, de la souffrance et de la mort. De là vient que se posent forcément des questions et des énigmes terribles; elles restent sans réponse, et l'homme d'aujourd'hui se trouve exposé à la déception désespérée ou à la tentation de détruire la vie humaine elle-même, qui pose de tels problèmes.

En d'autres pays ou nations, au contraire, on conserve encore beaucoup de traditions très vivantes de piété et de sentiment chrétien; mais ce patrimoine moral et spirituel risque aussi de disparaître sous la poussée de nombreuses influences, surtout celles de la sécularisation et de la diffusion des sectes. Seule une nouvelle évangélisation peut garantir la croissance d'une foi claire et profonde, capable de faire de ces traditions une force de réelle liberté.

Assurément il est urgent partout de refaire le tissu chrétien de la société humaine. Mais la condition est que se refasse le tissu chrétien des communautés ecclésiales elles-mêmes qui vivent dans ces pays et ces nations.

Les fidèles laïcs sont donc aujourd'hui, en vertu de leur participation à la fonction prophétique du Christ, pleinement engagés dans cette tâche de l'Eglise. A eux, en particulier, il revient de témoigner que la foi constitue la seule réponse pleinement valable, que tous, plus ou moins consciemment, entrevoient et appellent, aux problèmes et aux espoirs que la vie suscite en chaque homme et en toute société. Cela sera possible si les fidèles laïcs savent surmonter en eux-mêmes la rupture entre l'Evangile et la vie, en sachant créer dans leur activité de chaque jour, en famille, au travail, en société, l'unité d'une vie qui trouve dans l'Evangile inspiration et force de pleine réalisation.

A tous les hommes d'aujourd'hui, je répète, une fois encore, le cri passionné par lequel j'ai ouvert mon service pastoral: «N'ayez pas peur, ouvrez, ouvrez toutes grandes les portes au Christ! A sa puissance salvatrice, ouvrez les frontières des Etats, les systèmes économiques comme les systèmes politiques, les vastes domaines de la culture, de la civilisation, du développement. N'ayez pas peur! Le Christ sait "ce qu'il y a dans l'homme". Seul Lui le sait. Aujourd'hui, bien souvent, l'homme ne sait pas ce qu'il porte au-dedans de lui-même, dans l'intime de son âme, dans les profondeurs de son coeur. De là vient que bien souvent il est incertain du sens de sa vie sur cette terre. Il est envahi par le doute, qui se change en désespoir. Permettez _ je vous en prie, je vous implore en toute humilité et confiance _ permettez au Christ de parler à l'homme. Seul Lui a des paroles de vie, oui, de vie éternelle»(124).

Ouvrir toutes grandes les portes au Christ, l'accueillir dans l'espace de sa propre existence humaine ne comporte aucune menace pour l'homme; bien au contraire, c'est le seul chemin à parcourir si l'on veut reconnaître l'homme dans sa vérité totale et l'exalter dans ses valeurs.

La synthèse vitale que les fidèles laïcs sauront opérer entre l'Evangile et les devoirs quotidiens de la vie sera le témoignage le plus beau et le plus convaincant pour montrer que ce n'est pas la peur, mais la recherche du Christ et l'attachement à sa personne qui sont le facteur déterminant pour que l'homme vive et grandisse, et pour que naissent de nouveaux modèles de vie plus conformes à la dignité humaine.

L'homme est aimé de Dieu! Telle est l'annonce si simple et si bouleversante que l'Eglise doit donner à l'homme. La parole et la vie de chaque chrétien peuvent et doivent faire retentir ce message: Dieu t'aime. Le Christ est venu pour toi, pour toi le Christ est «le Chemin, la Vérité et la Vie!» (Jn 14, 6).

Cette nouvelle évangélisation, qui s'adresse non seulement à chacune des personnes, mais aussi à des groupes entiers de populations dans la diversité de leurs situations, de leurs milieux, de leurs cultures, est destinée à la formation de communions ecclésiales mûres, c'est-à-dire où la foi répand et réalise tout son sens originel d'adhésion à la personne du Christ et à son Evangile, de rencontre et de communion sacramentelle avec Lui, d'existence vécue dans la charité et le service.

Les fidèles laïcs ont leur rôle à jouer dans la formation de ces communautés ecclésiales, non seulement par une participation active et responsable à la vie communautaire, et donc par leur témoignage irremplaçable, mais aussi par l'élan et l'action missionnaires en direction de tous ceux qui n'ont pas encore la foi ou qui ne vivent pas selon la foi reçue au Baptême.

En faveur des nouvelies générations, les fidèles laïcs ont à apporter une contribution précieuse, plus nécessaire que jamais, par un effort systématique de catéchèse. Les Pères du Synode ont manifesté leur gratitude pour le travail des catéchistes, reconnaissant qu'ils ont «une tâche de grande valeur dans l'animation des communautés ecclésiales»(125). Il va de soi que les parents chrétiens sont les premiers catéchistes, irremplaçables, de leurs enfants, habilités qu'ils sont à cette tâche par le sacrement du Mariage. Mais nous devons tous, en même temps, être convaincus du «droit» qui est celui de tout baptisé d'être instruit, éduqué, accompagné dans la foi et dans la vie chrétienne.

Allez dans le monde entier

35. L'Eglise, qui observe et vit l'urgence actuelle d'une nouvelle évangélisation, ne peut esquiver la mission permanente qui est celle de porter l'Evangile à tous ceux qui _ et ils sont des millions et des millions d'hommes et de femmes _ ne connaissent pas encore le Christ Rédempteur de l'homme. C'est là la tâche la plus spécifiquement missionnaire que Jésus a confiée et de nouveau confie chaque jour à Son Eglise.

Le travail des fidèles laïcs, qui par ailleurs n'a jamais fait défaut dans ce domaine, se révèle aujourd'hui toujours plus nécessaire et de plus grand prix. En fait, l'ordre du Seigneur _ «Allez dans le monde entier» _ continue à trouver beaucoup de laïcs généreux, prêts à quitter leur milieu de vie, leur travail, leur province, et leur patrie, pour se rendre, au moins pour une période déterminée, en pays de mission. Même des couples chrétiens, à l'exemple d'Aquila et de Priscille (cf. Ac 18; Rm 16, 3 et suiv.), offrent un témoignage réconfortant d'amour passionné du Christ et de l'Eglise par leur présence active dans des pays de mission. Autre présence missionnaire authentique, celle de chrétiens qui, vivant pour des motifs divers dans des pays ou des milieux où l'Eglise n'est pas encore établie, témoignent de leur propre foi.

Mais le problème missionnaire se présente de nos jours à l'Eglise avec une ampleur et une gravité telles que seule une prise en charge vraiment solidaire des responsabilités de la part de tous les membres de l'Eglise, individuellement ou en groupe, peut donner l'espoir d'une réponse plus efficace.

L'invitation que le Concile Vatican II a adressée aux Eglises particulières garde toute sa valeur; elle demande même aujourd'hui un accueil plus étendu et plus décidé: «L'Eglise particulière, étant tenue de représenter le plus parfaitement possible l'Eglise universelle, doit savoir nettement qu'elle a été envoyée aussi ceux qui ne croient pas au Christ» (126).

L'Eglise doit faire aujourd'hui un grand pas en avant dans l'évangélisation, elle doit entrer dans une nouvelle étape historique de son dynamisme missionnaire. En un monde où ont été éliminées les distances et qui se fait plus petit, les communautés ecclésiales doivent s'unir entre elles, échanger leurs énergies et leurs moyens, s'engager ensemble dans l'unique et commune mission d'annoncer et de vivre l'Evangile. «Les Eglises qu'on appelle jeunes Eglises _ ont déclaré les Pères du Synode _ ont besoin de la force des Eglises anciennes, et en même temps celles-ci ont besoin du témoignage et de la poussée des jeunes Eglises, de sorte que chacune de ces Eglises puise aux richesses des autres»(127).

Au cours de cette nouvelle étape, la formation non seulement d'un clergé local mais aussi d'un laïcat mûr et responsable se pose dans les jeunes Eglises comme élément essentiel et inéluctable de l'implantation de l'Eglise(128). Et ainsi les communautés évangélisées s'élancent elles-mêmes vers de nouveaux pays du monde pour répondre à leur tour à la mission d'annoncer l'Evangile du Christ et d'en porter témoignage.

Par l'exemple de leur vie et par leur action, les fidèles laïcs peuvent améliorer les rapports entre les adeptes des différentes religions, comme l'ont noté fort à propos les Pères du Synode: «Aujourd'hui l'Eglise vit partout au milieu d'hommes pratiquant des religions différentes ... Tous les fidèles, spécialement les laïcs qui vivent au milieu de peuples d'autres religions, que ce soit leur pays d'origine ou un pays où ils ont émigré, ces laïcs devront être pour les habitants de ces pays un signe du Seigneur et de son Eglise, d'une façon adaptée aux circonstances de vie de chaque pays. Le dialogue entre les religions est de toute première importance parce qu'il conduit à l'amour et au respect réciproque; il efface ou tout au moins atténue les préjugés entre les adeptes des diverses religions et promeut l'unité et l'amitié entre les peuples»(129).

Pour l'évangélisation des peuples, il faut avant tout des apôtres. A cette fin, nous devons tous, à commencer par les familles chrétiennes, percevoir la responsabilité qui est la nôtre de favoriser l'essor et la maturation de vocations spécifiquement missionnaires, sacerdotales, religieuses ou laïques, en usant de tous les moyens favorables, sans jamais négliger le moyen privilégié qu'est la prière, selon la parole même du Seigneur Jésus: «La moisson est abondante, et les ouvriers sont peu nombreux. Priez donc le Maître de la moisson d'envoyer des ouvriers pour sa moisson» (Mt 9, 37-38).

Vivre l'Evangile en servant les personnes et la société

36. En recevant et en annonçant l'Evangile dans la force de l'Esprit, l'Eglise devient une communauté évangélisée et évangélisante, et par là elle se fait la servante des hommes. En son sein, les fidèles laïcs participent à la mission de servir la personne et la société. Il est certain que l'Eglise a comme fin suprême le Royaume de Dieu, dont «elle constitue sur terre le germe et le commencement»(130), elle est donc totalement consacrée à la glorification du Père. Mais le Royaume est source de complète libération et de salut total pour les hommes: l'Eglise avance donc avec les hommes et vit dans une solidarité totale et intime avec leur histoire.

Ayant reçu la charge de manifester au monde le mystère de Dieu qui resplendit en Jésus-Christ, l'Eglise, en même temps, révèle l'homme à l'homme lui-même; elle lui enseigne le sens de son existence, elle l'introduit dans la vérité totale sur lui-même et sur son destin(131). Dans cette perspective, l'Eglise est appelée, en vertu même de sa mission évangélisatrice, à servir l'homme. Ce service s'enracine tout d'abord dans le fait prodigieux et bouleversant que, «par son Incarnation, le Fils de Dieu s'est en quelque sorte uni Lui-même à tout homme»(132).

C'est pourquoi l'homme «est la première route que l'Eglise doit suivre pour l'accomplissement de sa mission: il est la première route fondamentale de l'Eglise, route tracée par le Christ, route qui passe à travers le mystère de l'Incarnation et de la Rédemption»(133).

C'est précisément dans ce sens qu'à plusieurs reprises et avec une clarté et une force particulières, le Concile Vatican II s'est exprimé dans ses divers documents. Relisons le texte singulièrement éclairant de la Constitution Gaudium et spes: «L'Eglise, en poursuivant la fin salvifique qui lui est propre, ne communique pas seulement à l'homme la vie divine; elle répand aussi, et d'une certaine façon sur le monde entier, la lumière que cette vie divine irradie, notamment en guérissant et en élevant la dignité de la personne humaine, en affermissant la cohésion de la société et en procurant à l'activité quotidienne des hommes un sens plus profond, la pénétrant d'une signification plus haute. Ainsi, par chacun de ses membres comme par toute la communauté qu'elle forme, l'Eglise croit pouvoir largement contribuer à humaniser toujours plus la famille des hommes et son histoire»(134).

Dans cette contribution apportée à la famille des hommes, dont l'Eglise porte la responsabilité, une place spéciale revient aux fidèles laïcs, en raison de leur «caractère séculier» qui les engage, selon des modalités propres et irremplaçables, «dans l'animation chrétienne de l'ordre temporel».

Promouvoir la dignité de la personne

37. Découvrir et faire découvrir la dignité inviolable de toute personne humaine constitue une tâche essentielle et même, en un certain sens, la tâche centrale et unifiante du service que l'Eglise, et en elle les fidèles laïcs, est appelée à rendre à la famille des hommes.

Parmi toutes les créatures terrestres, seul l'homme est une «personne, sujet conscient et libre», et, pour cela, «centre et sommet» de tout ce qui existe sur la terre(135).

Sa dignité de personne est le bien le plus précieux que l'homme possède, grâce à quoi il dépasse en valeur tout le monde matériel. La parole de Jésus _ «Que sert à l'homme de gagner le monde entier, s'il se porte tort à lui-même?» (Mc 8, 36) _ implique une affirmation anthropologique lumineuse et stimulante: l'homme ne vaut pas par ce qu'il «a» _ même s'il possédait le monde entier! _ mais par ce qu'il «est».Les biens du monde ne comptent pas autant que le bien de la personne, le bien qui est la personne même.

La dignité de la personne se manifeste dans tout son éclat quand on en considère l'origine et la destinée: créé par Dieu à son image et à sa ressemblance, et racheté par le Sang très précieux du Christ, l'homme est appelé à être «fils dans le Fils» et temple vivant de l'Esprit, et destiné à l'éternelle vie de communion béatifiante avec Dieu. Pour ces raisons, toute violation de la dignité personnelle de l'être humain crie vengeance en présence de Dieu et devient une offense au Créateur de l'homme.

En vertu de sa dignité personnelle, l'être humain est toujours une valeur en lui-même et pour lui-même, et il doit être considéré et traité comme tel; jamais il ne peut être considéré et traité comme un objet dont on se sert, un instrument, une chose.

La dignité personnelle constitue le fondement de l'égalité de tous les hommes entre eux. De là la nécessité absolue de refuser toutes les formes, si diverses, de discrimination, qui, hélas! continuent à diviser et à humilier la famille humaine, discriminations raciales, économiques, sociales, culturelles, politiques, géographiques, etc. Toute discrimination constitue une injustice absolument intolérable, non pas tant en raison des tensions et des conflits qu'elle peut engendrer dans le tissu social qu'en raison du déshonneur infligé à la dignité de la personne: et non seulement à la dignité de qui est victime de l'injustice, mais, davantage encore, de qui la commet.

Base de l'égalité de tous les hommes entre eux, la dignité de la personne est aussi le fondement de la participation et de la solidarité des hommes entre eux: le dialogue et la communion s'enracinent finalement en ce que les hommes «sont», plus encore qu'en ce que les hommes «ont».

La dignité personnelle est une propriété indestructible de tout être humain. Il est fondamental de noter toute la force explosive de cette affirmation qui se base sur l'unicité irremplaçable de toute personne. Il en découle que l'individu résiste de façon absolument irréductible à toute tentative d'écrasement ou d'anéantissement dans l'anonymat de la collectivité, de l'institution, de la structure, du système. La personne, dans son individualité, n'est pas un numéro, elle n'est pas un anneau dans une chaîne, ni un engrenage dans un système. L'affirmation la plus radicale et la plus exaltante de la valeur de tout être humain a été établie par le Fils de Dieu lorsqu'Il s'est incarné dans le sein d'une femme. De cela le Noël chrétien continue à nous parler(136).

Respecter le droit inviolable à la vie

38. La reconnaissance effective de la dignité personnelle de tout être humain exige le respect, la défense et la promotion des droits de la personne humaine. Il s'agit de droits naturels, universels et inviolables: personne, ni l'individu, ni le groupe, ni l'autorité, ni l'Etat, ne peut les modifier, encore moins les supprimer, parce que ces droits procèdent de Dieu Lui-même.

Or l'inviolabilité de la personne, reflet de l'absolue inviolabilité de Dieu Lui-même, trouve son expression première et fondamentale dans l'inviolabilité de la vie humaine. Il est juste, assurément, de parler des droits de l'homme _ comme, par exemple, le droit à la santé, au logement, au travail, à la famille, à la culture _ mais c'est propager l'erreur et l'illusion que d'en parler, comme on le fait souvent, sans défendre avec la plus grande vigueur le droit à la vie, comme droit premier, origine et condition de tous les autres droits de la personne.

L'Eglise ne s'est jamais avouée vaincue en face de toutes les violations que le droit à la vie, droit précisément de tout être humain, a subies et continue à subir de la part des particuliers ou des autorités elles-mêmes. Le sujet de ce droit c'est l'être humain, à tout moment de son développement, depuis sa conception jusqu'à sa mort naturelle; et en toutes les conditions, en santé ou en maladie, en état de perfection physique ou de handicap, de richesse ou de misère. Le Concile Vatican II le proclame très haut: «Tout ce qui s'oppose à la vie elle-même, comme toute espèce d'homicide, le génocide, l'avortement, l'euthanasie et même le suicide délibéré; tout ce qui constitue une violation de l'intégrité de la personne humaine, comme les mutilations, la torture physique ou morale, les contraintes psychologiques; tout ce qui est offense à la dignité de l'homme, comme les conditions de vie sous-humaines, les emprisonnements arbitraires, les déportations, l'esclavage, la prostitution, le commerce des femmes et des jeunes; ou encore les conditions de travail dégradantes qui réduisent les travailleurs au rang de purs instruments de rapport, sans égard pour leur personnalité libre et responsable: toutes ces pratiques et d'autres analogues sont, en vérité, infâmes. Tandis qu'elles corrompent la civilisation, elles déshonorent ceux qui s'y livrent plus encore que ceux qui les subissent et insultent gravement à l'honneur du Créateur»(137).

Or si chacun a la mission et la responsabilité de reconnaître la dignité personnelle de tout être humain et de défendre son droit à la vie, certains fidèles laïcs sont appelés à le faire à un titre particulier: les parents, les éducateurs, le personnel médical et infirmier, et tous ceux qui assument le pouvoir économique et politique.

En accueillant avec amour et générosité toute vie humaine, surtout si elle est faible et malade, l'Eglise vit aujourd'hui un moment capital de sa mission, d'autant plus nécessaire que s'affirme davantage une «culture de mort». En effet «l'Eglise croit fermement que la vie humaine, même faible et souffrante, est toujours un magnifique don du Dieu de bonté. Contre le pessimisme et l'égoïsme qui obscurcissent le monde, l'Eglise prend parti pour la vie, et dans chaque vie humaine elle sait découvrir la splendeur de ce "Oui", de cet "Amen" qu'est le Christ (cf. 2 Co 1, 19; Ap 3, 14). Au "non" qui envahit et attriste l'homme et le monde, elle oppose ce "oui" vivant, défendant ainsi l'homme et le monde contre ceux qui menacent la vie et lui portent atteinte»(138). Il revient aux fidèles laïcs qui sont plus directement, par vocation ou par profession, responsables de l'accueil de la vie, de rendre concret et efficace le «Oui» de l'Eglise à la vie humaine.

Aux frontières de la vie humaine, de nouvelles possibilités et responsabilités se sont largement ouvertes grâce à l'énorme développement des sciences biologiques et médicales, qui va de pair avec les progrès étonnants de la technologie: l'homme est en mesure aujourd'hui non seulement «d'observer» mais aussi de «manipuler»la vie humaine dès sa première origine et dans les premiers stades de son développement.

La conscience morale de l'humanité ne peut rester étrangère ni indifférente devant les pas de géant réalisés par un pouvoir technologique qui conquiert une emprise toujours plus vaste et plus profonde sur les dynamismes qui président à la procréation et aux premières phases du développement de la personne humaine. Jamais peut-être autant qu'aujourd'hui et qu'en ce domaine la Sagesse ne s'est révélée la seule ancre de salut, pour que l'homme, dans la recherche scientifique et dans la recherche appliquée, puisse agir toujours avec intelligence et amour, ce qui veut dire en respectant, ou mieux encore, en vénérant l'inviolable dignité personnelle de tout être humain, dès le premier moment de son existence. C'est ce qui se réalise lorsque, avec des moyens licites, la science et la technique s'engagent dans la défense de la vie et dans le soin des maladies dès le commencement, se refusant au contraire _ au nom de la dignité même de la recherche _ aux interventions qui altéreraient le patrimoine génétique de l'individu et de la race humaine(139).

Les fidèles laïcs qui se trouvent, à des titres et à des plans divers, engagés dans la science et la technique, comme aussi ceux qui ont une responsabilité médicale, sociale, législative ou économique, doivent avec courage accepter «les défis» lancés par les nouveaux problèmes de la bioéthique. Comme l'ont affirmé les Pères du Synode: «Les chrétiens doivent exercer leur responsabilité comme maîtres de la science et de la technologie et non pas comme leurs esclaves ... Dans la perspective des "défis" moraux qui vont être provoqués par la formidable puissance technologique nouvelle et qui mettent en péril non seulement les droits fondamentaux des hommes, mais jusqu'à l'essence biologique de l'espèce humaine, il est de la plus haute importance que les laïcs chrétiens _ avec l'aide de l'Eglise entière _ assument la charge de rappeler la culture aux principes d'un authentique humanisme, afin que la promotion et la défense des droits de l'homme puissent trouver un fondement dynamique et solide dans son essence même, cette essence que la prédication évangélique a révélée aux hommes»(140).

Aujourd'hui, la plus grande vigilance s'impose à tous de façon urgente devant le phénomène de la concentration du pouvoir, et en premier lieu, du pouvoir technologique. Cette concentration, en effet, tend à manipuler non seulement l'essence biologique, mais encore l'intérieur même de la conscience des hommes, et leurs modes de vie, et aggrave ainsi la discrimination et la marginalisation de peuples entiers.

Libres d'invoquer le Nom du Seigneur

39. Le respect de la dignité de la personne, qui comporte la défense et la promotion des droits de l'homme, exige que soit reconnue la dimension religieuse de l'homme. Ce n'est pas là une exigence simplement «confessionnelle», mais bien une exigence qui trouve sa racine indestructible dans la réalité même de l'homme. Le rapport avec Dieu, en effet, est un élément constitutif de l'«être» et de l'«existence» de l'homme: c'est en Dieu qu'il «nous est donné de vivre, de nous mouvoir et d'exister» (Ac 17, 28). Si tous n'admettent pas cette vérité, tous ceux qui en sont pénétrés ont le droit au respect de leur foi et des choix de vie, individuelle ou communautaire, qui en dérivent. C'est cela le droit à la liberté de conscience et à la liberté religieuse; le reconnaître effectivement, c'est l'un des biens les plus nobles et l'un des devoirs les plus graves de chaque peuple, s'il veut vraiment assurer le bien de la personne et de la société: «La liberté religieuse, exigence indestructible de la dignité de tout homme, est une pierre angulaire de l'édifice des droits de l'homme, et donc un facteur irremplaçable du bien de la personne et de toute la société, comme elle l'est de l'épanouissement personnel de chacun. Il en découle que la liberté pour les individus et les communautés de professer et de pratiquer sa religion est un élément essentiel de la cohabitation pacifique des hommes ... Le droit civil et social à la liberté religieuse, parce qu'il touche à la sphère la plus intime de l'esprit, se manifeste comme le point de référence et, en un certain sens, devient la mesure des autres droits fondamentaux»(141).

Le Synode n'a pas oublié les nombreux frères et soeurs qui ne jouissent pas encore de ce droit, et qui doivent affronter tant de difficultés, de marginalisations, de souffrances, de persécutions et parfois la mort, à cause de la confession de leur foi. Le plus grand nombre d'entre eux sont des frères et des soeurs qui appartiennent au laïcat chrétien. L'annonce de l'Evangile et le témoignage d'une vie chrétienne dans la souffrance et dans le martyre constituent le sommet de l'apostolat des disciples du Christ, tout comme l'amour du Seigneur Jésus jusqu'au don de sa propre vie constitue une source extraordinairement féconde pour l'édification de l'Eglise. La vigne mystique témoigne ainsi de sa vigueur, comme le notait Saint Augustin: «Cette vigne, comme l'avaient annoncé les Prophètes et le Seigneur Lui-même, répandait sur le monde entier ses sarments chargés de fruits et devenait d'autant plus vigoureuse qu'elle était davantage arrosée du sang abondant des martyrs»(142).

L'Eglise tout entière est profondément reconnaissante pour cet exemple et pour ce don: en ces chrétiens si généreux, elle trouve un motif de renouveler son élan de vie sainte et apostolique. C'est dans ce sens que les Pères du Synode ont estimé qu'il était de leur devoir spécialement «de remercier les laïcs qui vivent en infatigables témoins de la foi, fidèlement unis au Siège Apostolique, en dépit des restrictions imposées à leur liberté et de la privation où ils sont de ministres sacrés. Ils mettent tout en jeu, jusqu'à leur vie. Ainsi les laïcs fournissent le témoignage d'une caractéristique essentielle de l'Eglise, à savoir: l'Eglise de Dieu naît de la grâce de Dieu, et nous en voyons la manifestation la plus sublime dans le martyre»(143).

Tout ce que nous avons dit jusqu'ici sur le respect de la dignité de la personne et sur la reconnaissance des droits de l'homme concerne bien sûr la responsabilité de chaque chrétien, de chaque homme. Mais il nous faut noter aussitôt que ce problème a une dimension mondiale: c'est, en effet, une question qui touche des groupes humains entiers, et même des peuples entiers, qui sont violemment frappés dans leurs droits fondamentaux. Ces formes d'inégalité dans le développement entre les différents Mondes sont très nettement dénoncées dans la récente Encyclique Sollicitudo rei socialis.

Le respect de la personne humaine dépasse l'exigence d'une morale individuelle et elle s'établit comme un critère de base, comme le pilier fondamental, pour ainsi dire, en vue de la structuration de la société elle-même, étant donné que la société tout entière a comme finalité la personne.

Ainsi donc, c'est en liaison étroite avec la responsabilité de servir la personne que se situe la responsabilité de servir la société. On peut définir globalement de cette manière la mission d'animation chrétienne de l'ordre temporel que les fidèles sont appelés à remplir selon leurs modalités propres et spécifiques.

La famille, premier espace de l'engagement social

40. La personne humaine a dans sa structure naturelle une dimension sociale, car, au plus profond d'elle-même, elle est appelée à vivre en communion avec les autres, et à se donner aux autres: «Dieu, qui veille paternellement sur tous, a voulu que tous les hommes constituent une seule famille et se traitent mutuellement comme des frères»(144). Ainsi la société, fruit et signe du caractère social de l'homme, manifeste sa pleine réalité lorsqu'elle est une communauté de personnes.

Il existe une interdépendance et une réciprocité entre personne et société: tout ce qui se fait en faveur de la personne est fait au service de la société, et tout ce qui se fait pour la société tourne aussi au bien de la personne. C'est pourquoi l'engagement apostolique des fidèles laïcs dans l'ordre temporel prend toujours et inséparablement le sens d'un service rendu à la personne individuelle, dans son unicité irremplaçable, et le sens d'un service rendu à tous les hommes.

L'expression première et originelle de la dimension sociale de la personne, c'est le couple et la famille: «Mais Dieu n'a pas créé l'homme solitaire: dès l'origine, "Il les créa homme et femme" (Gn 1, 27). Cette société de l'homme et de la femme est l'expression première de la communion des personnes»(145). Jésus a eu soin de restituer au couple toute sa dignité et à la famille sa solidité (cf. Mt 19, 3-9); Saint Paul a montré le rapport profond du mariage avec le mystère du Christ et de l'Eglise (cf. Ep 5, 22 et 6, 4; Col 3, 18-21; 1 P 3, 1-7).

Le couple et la famille constituent le premier espace pour l'engagement social des fidèles laïcs. C'est un engagement qui ne peut être assumé de façon valable que dans la conviction de la valeur unique et irremplaçable de la famille pour le développement de la société et de l'Eglise elle-même.

Berceau de la vie et de l'amour, dans lequel l'homme «naît» et «grandit», la famille est la cellule fondamentale de la société. A cette communauté, il faut réserver une sollicitude privilégiée, chaque fois surtout que l'égoïsme humain, les campagnes contre la natalité, et aussi les conditions de pauvreté et de misère physique, culturelle et morale, et encore la mentalité de recherche du plaisir et de course à la consommation, tarissent les sources de la vie, pendant que les idéologies et différents systèmes, ainsi que des formes d'absence d'intérêt et de manque d'affection, s'attaquent à la fonction éducative propre à la famille.

Dans ces conditions, il est urgent de déployer une activité vaste, profonde et systématique, soutenue non seulement par la culture mais encore par des moyens économiques et des institutions législatives, dans le but d'assurer à la famille sa place de lieu premier d'«humanisation» de la personne et de la société.

L'engagement apostolique des fidèles laïcs envers la famille est avant tout de rendre celleci consciente de son identité, qui est d'être le premier noyau social de base, et aussi de son rôle original dans la société, afin qu'elle devienne elle-même toujours davantage la protagoniste active et responsable de sa propre croissance et de sa propre participation à la vie sociale. De cette façon, la famille pourra et devra exiger de tous, et d'abord des autorités publiques, le respect de ses droits qui, en sauvant la famille, sauvent la société elle-même.

Ce que tous peuvent lire dans l'Exhortation Familiaris consortio au sujet de la participation de la famille au développement de la société(146) et ce que le Saint-Siège, à l'invitation du Synode des Evêques en 1980, a formulé dans la «Charte des Droits de la Famille» constitue un programme d'action complet et organique pour tous les fidèles laïcs qui, à des titres divers, sont intéressés à la promotion des valeurs et des exigences de la famille: un programme dont la réalisation est à mener avec d'autant plus de promptitude et de décision que se font plus graves les menaces contre la stabilité et la fécondité de la famille et que plus lourde et plus systématique se révèle la tendance à marginaliser la famille et à annihiler son importance sociale.

L'expérience le montre, la civilisation et la solidité des peuples dépendent surtout de la qualité humaine de leurs familles. De là vient que l'engagement apostolique envers la famille a une valeur sociale incomparable. L'Eglise en est profondément convaincue; elle sait bien que «l'avenir de l'humanité passe par la famille»(147).

La charité, âme et soutien de la solidarité

41. Le service de la société s'exprime et se réalise de manières très variées: depuis celles qui sont libres et informelles jusqu'à celles qui ont un caractère institutionnel, depuis le secours porté aux personnes en particulier à celui qui va à des groupes divers et à des communautés de personnes.

L'Eglise entière comme telle est directement appelée au service de la charité: «La Sainte Eglise en joignant l'agapè à la Cène eucharistique se manifestait tout entière réunie autour du Christ par le lien de la charité; ainsi en tout temps elle se fait reconnaître à ce signe d'amour; tout en se réjouissant des initiatives d'autrui, elle tient aux oeuvres charitables comme à une partie de sa mission propre et comme à un droit inaliénable. C'est pourquoi la miséricorde envers les pauvres et les faibles, les oeuvres dites de charité et de secours mutuel pour le soulagement de toutes les souffrances humaines sont en particulier honneur»(148). La charité envers le prochain, sous les formes anciennes et toujours nouvelles des oeuvres de miséricorde corporelle et spirituelle, représente le contenu le plus immédiat, le plus commun et le plus habituel de l'animation chrétienne de l'ordre temporel, qui constitue l'engagement spécifique des fidèles laïcs.

Par leur charité envers le prochain les fidèles laïcs vivent et manifestent leur participation à la royauté de Jésus-Christ, c'est-à-dire au pouvoir du Fils de l'homme qui «n'est pas venu pour être servi, mais pour servir» (Mc 10, 45): ils vivent et manifestent cette royauté de la façon la plus simple, à la portée de tous et toujours, et tout à la fois de la façon la plus exaltante, parce que la charité est le don le plus élevé que l'Esprit offre pour l'édification de l'Eglise (cf. 1 Co 13, 13) et pour le bien de l'humanité: La charité, en effet, anime et soutient une solidarité active, très attentive à la totalité des besoins de l'être humain.

Une pareille charité, pratiquée non pas seulement par des particuliers, mais aussi solidairement par des groupes et des communautés, est et sera toujours nécessaire: rien ni personne ne pourra en tenir lieu, pas même les nombreuses institutions et les initiatives publiques, qui cependant s'efforcent de répondre aux besoins _ souvent graves et étendus aujourd'hui _ d'une population. Paradoxalement, cette charité se fait plus nécessaire du fait que les institutions, qui deviennent compliquées dans leur organisation et prétendent gérer tout domaine disponible, finissent par être neutralisées par un fonctionnarisme impersonnel, une bureaucratie exagérée, des intérêts privés excessifs, un désintéressement facile et généralisé.

C'est justement dans ce contexte que continuent à surgir et à se répandre, en particulier dans les sociétés organisées, différentes formes de bénévolat, qui s'expriment en une multitude de services et d'oeuvres. Bien vécu dans sa vérité de service désintéressé en faveur des personnes, spécialement des plus nécessiteuses et des plus négligées par les services sociaux eux-mêmes, le bénévolat doit être considéré comme une expression importante d'apostolat où les fidèles laïcs, hommes et femmes, ont un rôle de premier plan.

Destinataires et participants de la vie politique

42. La charité qui aime et qui sert la personne ne doit pas se séparer de la justice: l'une et l'autre, chacune à sa manière, exigent la reconnaissance totale et effective des droits de la personne, à laquelle est ordonnée la société avec toutes ses structures et ses institutions(149). Pour une animation chrétienne de l'ordre temporel, dans le sens que nous avons dit, qui est celui de servir la personne et la société, les fidèles laïcs ne peuvent absolument pas renoncer à la participation à la «politique», à savoir à l'action multiforme, économique, sociale, législative, administrative, culturelle, qui a pour but de promouvoir, organiquement et par les institutions, le bien commun. Les Pères du Synode l'ont affirmé à plusieurs reprises: tous et chacun ont le droit et le devoir de participer à la politique; cette participation peut prendre une grande diversité et complémentarité de formes, de niveaux, de tâches et de responsabilités. Les accusations d'arrivisme, d'idolâtrie du pouvoir, d'égoïsme et de corruption, qui bien souvent sont lancées contre les hommes du gouvernement, du parlement, de la classe dominante, des partis politiques, comme aussi l'opinion assez répandue que la politique est nécessairement un lieu de danger moral, tout cela ne justifie pas le moins du monde ni le scepticisme ni l'absentéisme des chrétiens pour la chose publique.

A l'inverse, la parole du Concile Vatican II est des plus significatives: «L'Eglise tient en grande considération et estime l'activité de ceux qui se consacrent au bien de la chose publique et en assument les charges pour le service de tous»(150).

Une politique pour la personne et pour la société trouve son critère fondamental dans la poursuite du bien commun, en tant que bien de tous les hommes et bien de tout homme, bien offert et garanti à l'accueil libre et responsable des personnes, individuellement ou en association: «La communauté politique existe pour le bien commun; elle trouve en lui sa pleine justification et sa signification, et c'est de lui qu'elle tire l'origine de son droit propre. Quant au bien commun, il comprend l'ensemble des conditions de vie sociale qui permettent aux hommes, aux familles et aux groupements de s'accomplir plus complètement et plus facilement»(151).

Au surplus, une politique pour la personne et pour la société prend comme orientation constante la défense et la promotion de la justice, comprise comme une «vertu» à laquelle il faut former tout le monde, et comme une «force» morale qui soutient ceux qui s'efforcent de favoriser les droits et les devoirs de tous et de chacun sur la base de la dignité personnelle de l'être humain.

L'exercice du pouvoir politique doit se baser sur l'esprit de service qui, joint à la compétence et à l'efficacité nécessaires, est indispensable pour rendre «transparente» et «propre» l'activité des hommes politiques, comme du reste le peuple l'exige fort justement. Cela requiert la lutte ouverte et la victoire contre certaines tentations, comme le recours à des manoeuvres déloyales, au mensonge, le détournement des fonds publics au profit de quelques-uns ou à des fins de «clientélisme», l'usage de procédés équivoques et illicites pour conquérir, maintenir et élargir le pouvoir à tout prix.

Les fidèles laïcs engagés dans la politique doivent sans le moindre doute respecter l'autonomie des réalités terrestres, à comprendre dans le sens où la définit la Constitution Gaudium et spes: «... Il est d'une haute importance que l'on ait une vue juste des rapports entre la communauté politique et l'Eglise; et que l'on distingue nettement entre les actions que les fidèles, isolément ou en groupe, posent en leur nom propre comme citoyens, guidés par leur conscience chrétienne, et les actions qu'ils mènent au nom de l'Eglise, en union avec leurs pasteurs. L'Eglise, qui, en raison de sa charge et de sa compétence, ne se confond d'aucune manière avec la communauté politique et n'est liée à aucun système politique, est à la fois le signe et la sauvegarde du caractère transcendant de la personne humaine»(152). En même temps _ et ceci est ressenti comme une urgence et une responsabilité _ les fidèles laïcs doivent porter témoignage des valeurs humaines et évangéliques qui sont intimement liées avec l'activité politique elle-même, comme la liberté et la justice, la solidarité, le dévouement fidèle et désintéressé au bien de tous, le style de vie simple, l'amour préférentiel pour les pauvres et les plus petits. Cela exige que les fidèles laïcs trouvent toujours plus d'élan spirituel grâce à une participation réelle à la vie de l'Eglise et qu'ils soient éclairés par sa doctrine sociale. En cette tâche, ils pourront être accompagnés et aidés par les communautés chrétiennes et leurs pasteurs(153).

Le style et le moyen pour réaliser une politique qui veuille viser un véritable développement humain, c'est la solidarité: cette solidarité requiert la participation active et responsable de tous à la vie politique, de la part de chaque citoyen et des groupements les plus variés, depuis les syndicats jusqu'aux partis; ensemble, tous et chacun, nous sommes à la fois destinataires et participants actifs de la politique. En de telles coordonnées, comme je l'ai écrit dans l'Encyclique Sollicitudo rei socialis, la solidarité «n'est pas un sentiment de vague compassion ou d'attendrissement superficiel devant les maux de tant de personnes, proches ou lointaines. Tout au contraire, c'est la détermination ferme et persévérante d'un engagement pour le bien commun, en d'autres termes pour le bien de tous et de chacun, afin que tous nous soyons vraiment responsables de tous»(154).

La solidarité politique doit aujourd'hui se réaliser à la hauteur d'une ligne d'horizon qui, dépassant chaque nation ou chaque bloc de nations, se présente avec des dimensions proprement continentales ou mondiales.

Le fruit de l'activité politique solidaire, si désiré de tous, mais jusqu'ici toujours loin de son point de maturité, c'est la paix. Les fidèles laïcs ne peuvent rester indifférents, étrangers ou paresseux devant tout ce qui est négation et compromission de la paix: violence et guerre, torture et terrorisme, camps de concentration, militarisation de la politique, course aux armements, menace nucléaire. Au contraire, en tant que disciples de Jésus-Christ, «Prince de la paix» (Is 9, 5) et «notre Paix» (Ep 2, 14), les fidèles laïcs doivent assumer la tâche d'être des «artisans de paix» (Mt 5, 9), autant par la conversion du coeur que par l'action en faveur de la vérité, de la liberté, de la justice et de la charité, qui sont les fondements inaliénables de la paix(155).

En collaborant avec tous ceux qui cherchent vraiment la paix et en utilisant les organismes spécifiques et les institutions nationales et internationales, les fidèles laïcs doivent promouvoir une oeuvre éducative capillaire, destinée à vaincre la culture dominatrice de l'égoïsme, de la haine, de la vengeance et de l'inimitié, et à développer la culture de la solidarité à tous les niveaux. Cette solidarité, en effet, «est le chemin de la paix et du développement» (156).Dans cette perspective, les Pères du Synode ont invité les chrétiens à repousser les formes inacceptables de violence, et à promouvoir des attitudes de dialogue et de paix, et aussi à s'engager pour instaurer un ordre social et international juste(157).

Situer l'homme au centre de la vie économico-sociale

43. Le service pour la société de la part des fidèles laïcs trouve un point d'action essentiel dans la question économico-sociale, dont la clé nous est fournie par l'organisation du travail.

La gravité actuelle de ces problèmes, saisie dans le panorama du développement et selon la proposition de solution offerte par la doctrine sociale de l'Eglise, a été rappelée récemment par l'Encyclique Sollicitudo rei socialis; je désire vivement vous y renvoyer tous, en particulier les fidèles laïcs.

Parmi les point forts de la doctrine sociale de l'Eglise se trouve le principe de la destination universelle des biens: les biens de la terre sont, dans le dessein de Dieu, offerts à tous les hommes et à chaque homme comme un moyen pour le développement d'une vie authentiquement humaine. Au service de cette destination, se place la propriété privée qui, précisément à cette fin, possède une fonction sociale intrinsèque. Concrètement, le travail de l'homme et de la femme représente l'instrument le plus commun et le plus immédiat du développement de la vie économique, instrument qui constitue à la fois un droit et un devoir pour chaque personne humaine.

Tout cela rentre de façon particulière dans la mission des fidèles laïcs. La fin et le critère de leur présence et de leur action sont formulés en termes généraux par le Concile Vatican II: «Dans la vie économico-sociale aussi, il faut honorer et promouvoir la dignité de la personne humaine, sa vocation intégrale et le bien de toute la société. C'est l'homme en effet qui est l'auteur, le centre et le but de toute la vie économico-sociale»(158).

Dans le contexte des transformations qui se produisent dans le monde du travail et de l'économie et le bouleversent, que les fidèles laïcs soient parmi les premiers à s'employer à la solution des problèmes très graves du chômage croissant, qu'ils luttent pour venir à bout des nombreuses injustices qui découlent d'organisations incorrectes du travail, qu'ils s'efforcent de faire du lieu de travail un lieu où vit une communauté de personnes respectées dans leur particularité et dans leur droit à la participation, qu'ils tâchent de développer de nouvelles solidarités entre ceux qui participent au travail commun, de susciter de nouvelles formes d'entreprises et de provoquer une révision des systèmes de commerce, de finance et d'échanges technologiques.

Dans ce but, les fidèles laïcs doivent remplir leur tâche avec compétence professionnelle, avec honnêteté humaine, avec esprit chrétien, comme moyen de leur propre sanctification(159), selon l'invitation qui nous est adressée par le Concile: «Par son travail, l'homme assure habituellement sa subsistance et celle de sa famille, s'associe à ses frères et leur rend service, peut pratiquer une vraie charité et coopérer à l'achèvement de la création divine. Bien plus, par l'hommage de son travail à Dieu, nous tenons que l'homme est associé à l'oeuvre rédemptrice de Jésus-Christ qui a donné au travail une dignité éminente en oeuvrant de ses propres mains à Nazareth»(160).

En rapport avec la vie économico-sociale et le travail, aujourd'hui se pose, et de façon toujours plus aiguë, la question dite de «l'écologie». Assurément, l'homme a reçu de Dieu la tâche de «dominer» les choses créées et de «cultiver le jardin» du monde; mais cette tâche, l'homme doit s'en acquitter dans le respect de l'image divine qu'il a reçue, et donc avec intelligence et amour: il doit se sentir responsable des dons que Dieu lui a prodigués et lui prodigue sans cesse. L'homme dispose d'un don qui doit passer _ si possible, amélioré _ aux générations futures, qui sont, elles aussi, les destinataires des dons du Seigneur: «La domination accordée par le Créateur à l'homme ... n'est pas un pouvoir absolu, et l'on ne peut parler de liberté "d'user et d'abuser", ou de disposer des choses comme on l'entend. La limitation imposée symboliquement par l'interdiction de "manger le fruit de l'arbre" (cf. Gn 2, 16-17), montre avec suffisamment de clarté que, dans le cadre de la nature visible, ... nous sommes soumis à des lois non seulement biologiques mais aussi morales, que l'on ne peut transgresser impunément. Une juste conception du développement ne peut faire abstraction de ces considérations _ relatives à l'usage des éléments de la nature, au renouvellement des ressources et aux conséquences d'une industrialisation désordonnée _; elles proposent encore une fois à notre conscience la dimension morale qui doit marquer le développement»(161).

Evangéliser la culture et les cultures de l'homme

44. Le service de la personne et de la société humaine se traduit et se réalise à travers la création et la transmission de la culture, qui, surtout de nos jours, constitue l'une des tâches les plus graves de la cohabitation des hommes et de l'évolution sociale. A la lumière du Concile, nous entendons par «culture» «tout ce par quoi l'homme affine et développe les multiples capacités de son esprit et de son corps; s'efforce de soumettre l'univers par la connaissance et le travail; humanise la vie sociale, aussi bien la vie familiale que l'ensemble de la vie civile, grâce au progrès des moeurs et des institutions; traduit, communique et conserve enfin dans ses oeuvres, au cours des temps, les grandes expériences spirituelles et les aspirations majeures de l'homme, afin qu'elles servent au progrès d'un grand nombre et même de tout le genre humain»(162). En ce sens, la culture doit être considérée comme le bien commun de chaque peuple, l'expression de sa dignité, de sa liberté et de sa créativité, le témoignage de son cheminement historique. En particulier, c'est seulement à l'intérieur et par le moyen de la culture que la foi chrétienne devient historique et créatrice d'histoire.

En face d'une culture qui se présente comme détachée non seulement de la foi chrétienne mais même des valeurs humaines(163), comme aussi devant une certaine culture scientifique et technologique impuissante à fournir une réponse à la demande de vérité et de bien qui brûle dans le coeur des hommes, l'Eglise a pleinement conscience qu'il est urgent, du point de vue pastoral, de réserver à la culture une attention toute particulière.

C'est pourquoi l'Eglise demande aux fidèles laïcs dêtre présents, guidés par le courage et la créativité intellectuelle, dans les postes privilégiés de la culture, comme le sont le monde de l'école et de l'université, les centres de la recherche scientifique et technique, les lieux de la création artistique et de la réflexion humaniste. Cette présence a pour but non seulement de reconnaître et éventuellement de purifier les éléments de la culture existante, en les soumettant à une sage critique, mais aussi à accroître leur valeur, grâce aux richesses originales de l'Evangile et de la foi chrétienne. Ce que le Concile Vatican II écrit au sujet du rapport entre l'Evangile et la culture correspond à un fait historique constant et constitue en même temps un idéal d'action d'une actualité et d'une urgence particulières; c'est un programme important proposé à la responsabilité pastorale de toute l'Eglise, et par là à la responsabilité spécifique des fidèles laïcs: «La Bonne Nouvelle du Christ rénove constamment la vie et la culture de l'homme déchu; elle combat et écarte les erreurs et les maux qui proviennent de la séduction permanente du péché. Elle ne cesse de purifier et d'élever la moralité des peuples. Par les richesses d'en-haut, elle féconde comme de l'intérieur les qualités spirituelles et les dons propres à chaque peuple et à chaque âge, elle les fortifie, les parfait et les restaure dans le Christ. Ainsi l'Eglise, en remplissant sa propre mission, concourt déjà, par là même, à l'oeuvre civilisatrice et elle y pousse; son action, même liturgique, contribue à former la liberté intérieure de l'homme»(164).

Il est utile de réentendre ici certaines expressions particulièrement significatives de l'Exhortation Evangelii nuntiandi de Paul VI: «L'Eglise évangélise lorsque, par la seule puissance divine du Message qu'elle proclame (cf. Rm 1, 16; 1 Co 1, 18; 2, 4), elle cherche à convertir en même temps la conscience personnelle et collective des hommes, l'activité dans laquelle ils s'engagent, la vie et le milieu concret qui sont les leurs. Des zones d'humanité se transforment: pour l'Eglise il ne s'agit pas seulement de prêcher l'Evangile dans des tranches géographiques toujours plus vastes ou à des populations toujours plus massives, mais aussi d'atteindre et comme de bouleverser par la force de l'Evangile les critères de jugement, les valeurs déterminantes, les centres d'intérêt, les lignes de pensée, les sources inspiratrices et les modèles de vie de l'humanité, lorsqu'elles sont en contraste avec la Parole de Dieu et le dessein du salut. Nous pourrions exprimer tout cela en disant: il importe d'évangéliser _ non pas de façon décorative, comme par un vernis superficiel, mais de façon vitale, en profondeur et jusque dans leurs racines _ la culture et les cultures de l'homme ... La rupture entre Evangile et culture est sans doute le drame de notre époque, comme ce fut aussi celui d'autres époques. Aussi faut-il faire tous les efforts en vue d'une généreuse évangélisation de la culture, plus exactement des cultures»(165).

La voie actuellement la plus favorable pour la création et la transmission de la culture, ce sont les instruments de communication sociale (166). Le monde des mass-media, à la suite du développement accéléré des inventions, et de leur influence tout à la fois planétaire et capillaire sur la formation de la mentalité et des moeurs, représente une nouvelle frontière de la mission de l'Eglise. En particulier, la responsabilité professionnelle des fidèles laïcs en ce domaine, qu'elle s'exerce à titre personnel ou à travers des initiatives et des institutions communautaires, doit être reconnue dans toute sa valeur et soutenue par des ressources matérielles, intellectuelles et pastorales mieux adaptées.

Concernant l'utilisation des instruments de communication, qu'il s'agisse de la production des programmes ou de leur réception, il est urgent d'exercer, d'une part, une activité éducative du sens critique, animé par la passion de la vérité, et, d'autre part, une action visant à défendre la liberté et le respect de la dignité de la personne, et à favoriser la culture authentique des peuples, par un refus ferme et courageux de toute forme de monopolisation et de manipulation.

La responsabilité apostolique des fidèles laïcs ne s'arrête pas à ce seul travail de défense: sur toutes les routes du monde, même sur les grandes routes de la presse, du cinéma, de la radio, de la télévision, du théâtre, doit être annoncé l'Evangile qui nous sauve.
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Apostolat des Laïcs - Vocation et Mission des Laïcs dans l'Eglise et dans le Monde Empty Re: Apostolat des Laïcs - Vocation et Mission des Laïcs dans l'Eglise et dans le Monde

Message par Her Dim 3 Avr - 21:28

EXHORTATION APOSTOLIQUE
POST-SYNODALE
CHRISTIFIDELES LAICI
DE SA SAINTETE LE PAPE
JEAN-PAUL II
SUR LA VOCATION
ET LA MISSION DES LAÏCS
DANS L'EGLISE ET DANS LE MONDE

Donné à Rome, près de Saint-Pierre, le 30 Décembre 1988, en la fête de la Sainte Famille de Jésus, Marie et Joseph. (Suite 3) :


CHAPITRE IV

LES OUVRIERS DE LA VIGNE DU SEIGNEUR
Excellents administrateurs de la grâce multiforme de Dieu

La variété des vocations

45. Selon la parabole évangélique, le «maître du domaine» appelle les ouvriers à sa vigne aux différentes heures de la journée: certains au lever du jour, d'autres vers neuf heures du matin, d'autres encore vers midi et vers trois heures, les derniers vers cinq heures (cf. Mt 20, 1 et suiv.). En commentant cette page de l'Evangile, Saint Grégoire le Grand interprète les différentes heures de l'appel, en les rapprochant des ages de la vie: «On peut appliquer la diversité des heures _ dit-il _ aux divers âges de l'homme. Le matin peut certainement représenter, selon notre interprétation, l'enfance. La troisième heure ensuite peut représenter l'adolescence: le soleil se déplace vers le haut du ciel, ce qui signifie que l'ardeur de l'âge augmente. La sixième heure, c'est la jeunesse: le soleil se trouve comme au milieu du ciel, en cet âge, disons, où se renforce la plénitude de la vigueur. La vieillesse représente la neuvième heure, parce que, de même que le soleil décline de son point le plus haut, cet âge aussi commence à perdre l'ardeur de la jeunesse. La onzième heure indique ceux qui sont avancés en âge... Les ouvriers donc sont appelés à la vigne à des heures différentes, comme pour signifier que l'un est appelé à la sainteté au moment de son enfance, un autre dans sa jeunesse, un autre dans son âge mûr, et un autre à un âge plus avancé»(167).

Nous pouvons reprendre le commentaire de Saint Grégoire le Grand et l'étendre encore plus à la variété extraordinaire des personnes présentes dans l'Eglise, qui sont, toutes et chacune, appelées à travailler pour l'avénement du Royaume de Dieu, selon la diversité des vocations et des situations, des charismes et des ministères. C'est une variété liée, non pas seulement à l'âge, mais aussi à la différence du sexe et à la diversité des qualités, comme aussi aux vocations et aux conditions de vie: c'est une variété qui rend plus vive et plus concrète la richesse de l'Eglise.

Jeunes, enfants, personnes âgées

Les jeunes, espoir de l'Eglise

46. Le Synode a voulu réserver une attention particulière aux jeunes. Et très justement. En beaucoup de pays du monde, ils représentent la moitié de la population totale, et, souvent, la moitié en chiffre du peuple de Dieu lui-même qui vit dans ces pays. Sous cet aspect, les jeunes forment déjà une force exceptionnelle et sont un grand défi pour l'avenir de l'Eglise. Dans les jeunes, en effet, l'Eglise lit la voie à suivre vers l'avenir qui l'attend, et elle trouve là l'image et le rappel de cette jeunesse joyeuse dont l'esprit du Christ l'enrichit sans cesse. C'est dans ce sens que le Concile a défini les jeunes «l'espérance de l'Eglise»(168).

Dans la Lettre aux jeunes gens et jeunes filles du monde, le 31 mars 1985, nous lisons: «L'Eglise regarde les jeunes; mieux, l'Eglise, d'une manière spéciale, se regarde elle-même dans les jeunes, en vous tous et en même temps en chacun et chacune de vous. Il en fut ainsi dès les débuts, dès les temps apostoliques. Les paroles de Saint Jean dans sa Première Lettre peuvent en être une preuve spéciale: "Je vous l'écris, jeunes gens: Vous avez vaincu le Mauvais. Je vous l'ai écrit, petits enfants: Vous connaissez le Père ... Je vous l'ai écrit à vous, jeunes gens: Vous êtes forts, la parole de Dieu demeure en vous" (1 Jn 2, 13 et suiv.). Dans notre génération, au terme du second millénaire après Jésus-Christ, l'Eglise elle aussi se regarde dans les jeunes»(169).

Les jeunes gens ne doivent pas être regardés simplement comme l'objet de la sollicitude pastorale de l'Eglise: ils sont en fait, et ils doivent être encouragés à «devenir des sujets actifs, qui prennent part à l'évangélisation et à la rénovation sociale»(170). La jeunesse est le temps d'une découverte particulièrement intense du propre «moi» et du propre «projet de vie»; c'est le temps d'une croissance qui doit se réaliser «en sagesse, âge et grâce devant Dieu et devant les hommes» (Lc 2, 52).

Comme l'ont dit les Pères du Synode: «La sensibilité des jeunes perçoit profondément les valeurs de la justice, de la non violence et de la paix. Leur coeur est ouvert à la fraternité, à l'amitié et à la solidarité. Ils se mobilisent au maximum en faveur des causes qui regardent la qualité de la vie et la conservation de la nature. Mais ils sont aussi chargés d'inquiétudes, de déceptions, d'angoisses et de peurs du monde, en plus des tentations propres à leur état»(171).

L'Eglise doit revivre l'amour de prédilection dont Jésus a donné témoignage au jeune homme: «Posant alors son regard sur lui, Jésus se mit à l'aimer» (Mc 10, 21). Voilà pourquoi l'Eglise inlassablement annonce Jésus-Christ; elle proclame son Evangile comme l'unique et surabondante réponse aux aspirations les plus radicales des jeunes, comme une proposition exaltante d'adhésion personnelle: «viens et suis-moi» (Mc 10, 21), qui comporte le partage de l'amour filial de Jésus pour le Père et la participation à sa mission de salut pour l'humanité.

L'Eglise a tant de choses à dire aux jeunes et les jeunes ont tant de choses à dire à l'Eglise. Ce dialogue réciproque, qu'il faut mener avec une grande cordialité, dans la clarté, avec courage, favorisera la rencontre des générations et des échanges entre elles, il sera une source de richesse et de jeunesse pour l'Eglise et pour la société civile. Dans son message aux jeunes, le Concile déclare: «L'Eglise vous regarde avec confiance et avec amour ... Elle est la vraie jeunesse du monde ... Regardez-la et vous retrouverez en elle le visage du Christ»(172).

Les enfants et le Royaume des cieux

47. Les enfants sont, assurément, le terme de l'amour délicat et généreux du Seigneur Jésus: c'est à eux qu'il réserve sa bénédiction et, qui plus est, qu'il assure le Royaume des Cieux (cf. Mt 19, 13-15; Mc 10, 14). En particulier, Jésus exalte le rôle actif que les petits jouent dans le Royaume de Dieu: ils sont le symbole éloquent et l'image splendide des conditions morales et spirituelles qui sont essentielles pour entrer dans le Royaume de Dieu et pour vivre une vie de confiance totale au Seigneur: «En vérité, je vous le dis, si vous ne changez pas pour devenir comme les petits enfants, vous n'entrerez point dans le Royaume des cieux. Mais celui qui se fera petit comme cet enfant, c'est celui-là qui est le plus grand dans le Royaume des cieux. Et celui qui accueillera un enfant comme celui-ci en mon Nom, c'est moi qu'il accueille» (Mt 18, 3-5; cf. Lc 9, 48).

Les enfants nous rappellent que la fécondité missionnaire de l'Eglise a sa racine vivifiante non pas dans les moyens ou les mérites humains, mais dans le don absolument gratuit de Dieu. La vie d'innocence et de grâce des enfants, mais aussi les souffrances qu'on leur inflige injustement, deviennent, en vertu de la Croix du Christ, une source d'enrichissement spirituel pour eux et pour l'Eglise entière: de cela, tous, nous devons avoir une conscience très vive et pleine de gratitude.

Il faut reconnaître, au surplus, qu'à l'âge de l'enfance s'ouvrent de précieuses possibilités d'action, autant pour l'édification de l'Eglise que pour l'humanisation de la société. Tout ce qu'affirme le Concile quand il parle de la présence bénéfique des enfants à l'intérieur de la famille, «Eglise domestique» _ «Membres vivants de la famille, les enfants concourent, à leur manière, à la sanctification des parents»(173) _ peut se dire aussi des petits enfants par rapport à l'Eglise particulière et universelle. Déjà Jean Gerson, théologien et éducateur du xvème siècle, le notait en ces termes: «Les enfants et les jeunes sont loin d'être une part négligeable de l'Eglise»(174).

Les personnes âgées et le don de la sagesse

48. Aux personnes âgées, que souvent, bien à tort, on considère comme des êtres inutiles, quand ce n'est pas comme un poids insupportable, je rappelle que l'Eglise demande et attend d'elles qu'elles poursuivent leur mission apostolique et missionnaire, mission qui non seulement est une tâche possible et un devoir, même à cet âge, mais qui, à cet âge précisément, prend une forme spécifique et originale.

La Bible nous présente l'homme âgé comme le symbole de la personne riche de sagesse et de crainte de Dieu (cf. Si 25, 4-6). En ce sens, le «don» de l'homme âgé pourrait se définir comme celui d'être, dans l'Eglise et la société, le témoin de la tradition de foi (cf. Ps 44, 2; Ex 12, 26-27), le maître de vie (cf. Si 6, 34; 8, 11-12), l'artisan de charité.

De nos jours l'accroissement du nombre des personnes âgées en différents pays du monde et le départ anticipé à la retraite ouvrent de nouveaux espaces au travail apostolique des personnes âgées: c'est là une tâche à assumer avec courage, en surmontant résolument la tentation de se replier nostalgiquement sur un passé qui ne reviendra plus et de se refuser à un engagement présent, à cause des difficultés rencontrées dans un monde sans cesse nouveau; il s'agit, au contraire, de prendre sans cesse une conscience plus claire de son rôle personnel dans l'Eglise et dans la société, car ce rôle ne connaît pas d'arrêt provoqué par l'âge, mais ne fait que prendre des aspects nouveaux. Comme le chante le psalmiste: «Dans la vieillesse, ils portent encore du fruit, ils restent pleins de sève et de verdeur, proclamant la droiture du Seigneur» (Ps 92, 15-16). Je répète ce que j'ai dit au cours de la célébration pour le Jubilé des Personnes âgées: «L'entrée dans le troisième âge doit être regardée comme un privilège: non seulement parce que tout le monde n'a pas la chance d'atteindre cette étape, mais aussi et surtout parce que c'est le temps où il est concrètement possible de mieux examiner le passé, de mieux connaître et de vivre plus intensément le mystère pascal, de devenir un exemple dans l'Eglise pour le peuple de Dieu tout entier... Malgré la complexité des problèmes à résoudre, la diminution progressive des forces, malgré les insuffisances des organismes sociaux, les lenteurs de la législation officielle, les incompréhensions d'une société égoïste, vous n'êtes pas et vous ne devez pas vous croire en marge de la vie de l'Eglise, ni éléments passifs d'un monde en excès de vitesse, mais sujets actifs d'une période humainement et spirituellement féconde de l'existence humaine. Vous avez encore une mission à remplir, une contribution à apporter. Selon le dessein de Dieu, chaque être humain est une vie en croissance, depuis la première étincelle de son existence jusqu'à son dernier soupir»(175).

Femmes et hommes

49. Les Pères du Synode ont porté une attention spéciale à la condition et au rôle de la femme, dans une double intention: reconnaître eux-mêmes et inviter chacun, une fois de plus, à reconnaître l'indispensable contribution de la femme à l'édification de l'Eglise et au développement de la société; procéder, en outre, à une analyse plus spécifique de la participation de la femme à la vie et à la mission de l'Eglise.

En faisant référence à Jean XXIII, qui voyait un signe des temps dans la conscience que la femme avait de sa propre dignité et dans l'entrée des femmes dans la vie publique(176), les Pères du Synode ont affirmé à plusieurs reprises et avec vigueur, en face des formes les plus variées de discrimination et de marginalisation auxquelles est soumise la femme du seul fait qu'elle est femme, l'urgence de défendre et de promouvoir la dignité personnelle de la femme, et donc son égalité avec l'homme.

Si telle est, dans l'Eglise et dans la société, la tâche de tous, c'est, en particulier, celle des femmes elles-mêmes; elles doivent se sentir engagées comme protagonistes au premier rang. Il y a encore tant d'efforts à faire, en de nombreuses parties du monde et en divers milieux, pour que soit détruite la mentalité injuste et délétère qui considère l'être humain comme une chose, une marchandise, un instrument mis au service de l'intérêt égoïste et de la recherche du plaisir, d'autant plus que, de pareille mentalité, c'est la femme qui est la première victime. La reconnaissance franche et nette de la dignité personnelle de la femme constitue le premier pas à faire pour promouvoir sa pleine participation tant à la vie de l'Eglise qu'à la vie sociale et publique. Il faut que soit apportée une réponse plus résolue à la demande qui a été faite par l'Exhortation Apostolique Familiaris consortio au sujet des nombreuses discriminations dont les femmes sont victimes: «Je demande donc à tous de s'engager dans une action pastorale spécifique plus vigoureuse et plus incisive afin que ces discriminations soient définitivement éliminées et que l'on arrive à une pleine estime de l'image de Dieu qui resplendit en tout être humain sans aucune exception»(177). Dans le même ordre d'idées, les Pères synodaux ont affirmé: «L'Eglise, dans l'expression de sa mission, doit s'opposer avec fermeté à toutes les formes de discrimination et d'abus dont les femmes sont victimes»(178). Et encore: «La dignité de la femme, gravement blessée dans l'opinion publique, doit être retrouvée, grâce au respect réel des droits de la personne humaine et à la mise en pratique de la doctrine de l'Eglise»(179).

Pour ce qui regarde, en particulier, la participation active et responsable à la vie et à la mission de l'Eglise, il faut noter que déjà le Concile Vatican II a été explicite dans son invitation: «Comme, de nos jours, les femmes ont une part de plus en plus active dans toute la vie de la société, il est très important que grandisse aussi leur participation dans les divers secteurs de l'apostolat de l'Eglise»(180).

La prise de conscience des dons et des responsabilités particulières de la femme, ainsi que de sa vocation spéciale, a grandi et s'est approfondie dans cette période de l'après-Concile; cette prise de conscience trouve son inspiration la plus originale dans l'Evangile et dans l'histoire de l'Eglise. Pour qui a la foi, en effet, l'Evangile, c'est-à-dire la parole et l'exemple de Jésus-Christ, reste le point de référence nécessaire et déterminant, un point de référence on ne peut plus fécond et rénovateur dans le moment historique que nous vivons.

Sans être appelées à l'apostolat propre aux Douze, et donc au sacerdoce ministériel, beaucoup de femmes accompagnent Jésus dans son ministère et assistent le groupe des Apôtres (cf. Lc 8, 2-3); elles sont présentes près de la Croix (cf. Lc 23, 49); elles assistent à la sépulture de Jésus (cf. Lc 23, 55) et le matin de Pâques elles recoivent et transmettent l'annonce de la Résurrection (cf. Lc 24, 1-10); elles prient avec les Apôtres au Cénacle dans l'attente de la Pentecôte (cf. Ac 1, 14).

Dans le sillage de l'Evangile, l'Eglise des origines se détache de la culture du temps et invite la femme à des tâches liées à l'évangélisation. Dans ses Lettres, l'apôtre Paul cite par leur nom un certain nombre de femmes en raison de leurs fonctions diverses à l'intérieur et au service des premières communautés ecclésiales (cf. Rm 16, 1-15; Ph 4, 2-3; Col 4, 15; 1 Co 11, 5; 1 Tm 5, 16). «Si le témoignage des Apôtres fonde l'Eglise _ a dit Paul VI _ celui des femmes contribue grandement à nourrir la foi des communautés chrétiennes»(181).

De même qu'aux origines, ainsi également dans le développement qui a suivi, l'Eglise a toujours connu _ avec, évidemment, des différences d'aspect et d'accents _ des femmes qui ont rempli un rôle parfois décisif et assumé des tâches de valeur considérable pour l'Eglise elle-même. C'est là une histoire d'activité immense, le plus souvent humble et discrète, mais qui n'en a pas moins été décisive pour la croissance et pour la sainteté de l'Eglise. Il faut que cette histoire se poursuive, bien mieux, qu'elle s'élargisse et s'intensifle, allant de pair avec la prise de conscience élargie et universalisée de la dignité personnelle de la femme et de sa vocation, et, d'autre part, avec l'urgence d'une «nouvelle évangélisation» et d'une plus vaste «humanisation» des relations sociales.

Reprenant la consigne du Concile Vatican II qui reflète le message de l'Evangile et aussi l'histoire de l'Eglise, les Pères du Synode ont, entre autres choses, formulé cette «recommandation» précise: «Il faut que l'Eglise, par sa vie et par sa mission, reconnaisse tous les dons des femmes et des hommes et les traduise dans la pratique»(182). Et encore: «Ce Synode proclame que l'Eglise exige la reconnaissance et l'emploi de tous ces dons, de ces expériences et aptitudes des hommes et des femmes pour que sa mission soit plus efficace (cf. Congrégation pour la Doctrine de la Foi, Instruction sur la liberté chrétienne et la libération, 72)»(183).

Fondements anthropologiques et théologiques

50. Si l'on veut assurer aux femmes la place à laquelle elles ont droit dans l'Eglise et dans la société, une condition s'impose: l'étude sérieuse et approfondie des fondements anthropologiques de la condition masculine et féminine, visant à préciser l'identité personnelle propre de la femme dans sa relation de diversité et de complémentarité réciproque avec l'homme, et cela, non seulement pour ce qui regarde les rôles à jouer et les fonctions à assurer, mais aussi et plus profondément pour ce qui regarde la structure de la personne et sa signification. Les Pères du Synode ont ressenti vivement cette exigence en affirmant que «les fondements anthropologiques et théologiques ont besoin d'études approfondies en vue de la solution des problèmes relatifs au vrai sens et à la dignité des deux sexes»(184).

En s'engageant dans une réflexion sur les fondements anthropologiques et théologiques de la condition féminine, l'Eglise assure sa présence dans le processus historique des divers mouvements de promotion de la femme et, pénétrant jusqu'aux racines de l'être personnel de la femme, elle y apporte sa contribution la plus précieuse. Mais avant tout et plus fortement encore, l'Eglise entend, de cette façon, obéir à Dieu qui, en créant l'homme «à son image», «les créa homme et femme» (Gn 1, 27); elle entend accueillir l'appel de Dieu à connaître, à admirer et à vivre son dessein de Créateur. C'est un dessein qui «au commencement» a été imprimé de façon indélébile dans l'être même de la personne humaine _ homme et femme _ et, par conséquent, dans ses structures signifiantes et dans ses profonds dynamismes. Et justement, ce dessein, plein de sagesse et d'amour, demande à être exploré dans toute sa richesse qui, à partir du «commencement», s'est progressivement manifestée et réalisée tout au long de l'histoire du salut, et a atteint son sommet dans la «plénitude du temps», lorsque «Dieu a envoyé son Fils, né d'une femme» (Ga 4, 4). Cette «plénitude» continue dans l'histoire: la lecture du dessein de Dieu se poursuit et doit se poursuivre sans cesse dans la foi de l'Eglise, grâce aussi à la vie de tant de femmes chrétiennes. L'apport offert par les différentes sciences humaines et les diverses cultures n'est pas à négliger; grâce à un discernement éclairé, cet apport pourra aider à recevoir et à préciser les valeurs et les exigences qui appartiennent à l'essence durable de la femme, ainsi que celles qui sont liées à l'évolution historique des cultures. Comme nous le rappelle le Concile Vatican II: «L'Eglise affirme que, sous tous les changements, bien des choses demeurent qui ont leur fondement ultime dans le Christ, le même hier, aujourd'hui et à jamais (cf. He 13, Cool»(185).

Les fondements anthropologiques et théologiques de la dignité personnelle de la femme sont considérés dans la Lettre Apostolique sur la dignité et la vocation de la femme. Ce document, qui reprend, développe et spécifie les réflexions de la catéchèse du mercredi consacrée pendant une longue période à la «théologie du corps», veut être à la fois l'accomplissement d'une promesse formulée dans l'Encyclique Redemptoris Mater(186) et la réponse à la demande des Pères du Synode.

La lecture de la Lettre Mulieris dignitatem, du fait même de son caractère de méditation biblico-théologique, pourra être inspirante pour tous, hommes et femmes, et stimuler en particulier les représentants des sciences humaines et des disciplines théologiques à poursuivre leur étude critique, afin d'approfondir toujours mieux, sur la base de la dignité personnelle de l'homme et de la femme et de leur relation réciproque, les valeurs et les dons spécifiques de la féminité et de la masculinité, non seulement dans le domaine de la vie sociale, mais encore et surtout dans celui de l'existence chrétienne et ecclésiale.

La méditation sur les fondements anthropologiques et théologiques de la féminité doit éclairer et guider la réponse chrétienne à la demande que l'on pose si souvent, et parfois de façon si incisive, au sujet de «l'espace» que la femme peut et doit occuper dans l'Eglise et dans la société.

De la parole et de l'attitude du Christ, qui sont des normes pour l'Eglise, il ressort très clairement qu'aucune discrimination n'existe sur le plan du rapport avec le Christ, en qui «il n'y a plus l'homme et la femme, car tous vous ne faites plus qu'un dans le Christ Jésus» (Ga 3, 28), et sur le plan de la participation à la vie et à la sainteté de l'Eglise, comme l'atteste merveilleusement la prophétie de Joël, réalisée par la Pentecôte: «Je répandrai mon Esprit sur toute chair et vos fils et filles prophétiseront» (Jl 3, 1; cf. Ac 2, 17 et suiv.). Comme on le lit dans la Lettre Apostolique sur la dignité et la vocation de la femme: «Tous deux _ la femme comme l'homme _ ... sont au même titre susceptibles de bénéficier de la vérité divine et de l'amour dans l'Esprit Saint. L'un et l'autre accueillent sa "venue" salvifique et sanctifiante»(187).

Mission dans l'Eglise et dans le monde

51. Quant à ce qui est de la participation à la mission apostolique de l'Eglise, il est certain qu'en vertu du Baptême et de la Confirmation, la femme _ comme l'homme _ participe à la triple fonction de Jésus-Christ, Prêtre, Prophète et Roi, et, par conséquent, est habilitée et engagée dans l'apostolat fondamental de l'Eglise: l'évangélisation. D'autre part, dans l'accomplissement précisément de cet apostolat, la femme est invitée à user de ses propres «dons»: avant tout, le don qui est sa dignité personnelle elle-même, le don de la parole, du témoignage de sa vie, et puis les dons liés à sa vocation féminine.

Dans la participation à la vie et à la mission de l'Eglise, la femme ne peut recevoir le sacrement de l'Ordre, et donc, ne peut remplir les fonctions propres du sacerdoce ministériel. C'est là une disposition que l'Eglise a toujours reconnue dans la volonté précise, totalement libre et souveraine, de Jésus-Christ qui a appelé des hommes seulement à être ses Apôtres(188); c'est une disposition qui peut s'éclairer par le rapport entre le Christ Epoux et l'Eglise son Epouse(189). Nous sommes dans le concept de la fonction, non de la dignité et de la sainteté. On doit, en fait, affirmer: «Même si l'Eglise possède une structure "hiérarchique", cette structure est cependant totalement ordonnée à la sainteté des membres du Christ»(190).

Mais, comme le disait déjà Paul VI, si «nous ne pouvons changer l'attitude de Notre Seigneur, ni l'appel qu'Il adresse aux femmes, nous pouvons tout de même reconnaître et promouvoir le rôle de la femme dans la mission évangélisatrice et dans la vie de la communauté chrétienne» (191).

Il est bien nécessaire que nous passions de la reconnaissance théorique de la présence active et responsable de la femme dans l'Eglise à sa réalisation pratique. C'est dans ce sens très précis qu'il faut lire cette Exhortation qui s'adresse aux fidèles laics, par la spécification voulue et répétée «hommes et femmes». Au surplus, le Code de Droit Canon contient de nombreuses dispositions sur la participation de la femme à la vie et à la mission de l'Eglise: ce sont des dispositions qui demandent à être connues plus largement, et, tout en respectant les différences des sensibilités culturelles et des nécessités pastorales,réalisées avec plus d'à-propos et de netteté.

Que l'on songe, par exemple, à la participation des femmes aux Conseils pastoraux diocésains et paroissiaux, comme également aux Synodes diocésains et aux Conciles particuliers. C'est en ce sens que les Pères du Synode ont écrit: «Que les femmes participent à la vie de l'Eglise sans aucune discrimination, même pour les consultations et l'élaboration de décisions»(192). Et encore: «Les femmes, qui ont déjà une une place importante dans la transmission de la foi et dans l'accomplissement de services de tout genre dans la vie de l'Eglise, doivent être associées à la préparation des documents pastoraux et des initiatives missionnaires; elles doivent être reconnues comme des coopératrices de la mission de l'Eglise dans la famille, dans la profession et dans la société civile»(193).

Dans le domaine plus spécial de l'évangélisation et de la catéchèse, il faut promouvoir plus vivement la tâche complémentaire qui est celle de la femme dans la transmission de la foi, non seulement dans la famille, mais aussi dans les lieux les plus divers de l'éducation et, de façon plus générale, partout où il s'agit d'accueillir la Parole de Dieu, sa compréhension et sa communication, y compris par le moyen de l'étude, de la recherche et de l'enseignement de la théologie.

A mesure que se développera son engagement dans le travail d'évangélisation, la femme sentira plus vivement le besoin d'être évangélisée. Ainsi, par les yeux illuminés de la foi (cf. Ep 1, 18), la femme pourra distinguer ce qui correspond vraiment à sa dignité personnelle et à sa vocation de tout ce qui, fût-ce sous le prétexte de «dignité» et au nom de la «liberté» et du «progrès», amène la femme à ne pas favoriser le renforcement des véritables valeurs, mais, au contraire, à se rendre responsable de la dégradation morale des personnes, des milieux et de la société. Opérer un pareil «discernement» est une urgence historique qu'on ne saurait repousser et, en même temps, c'est une possibilité et une exigence qui découlent de la participation de la femme chrétienne au ministère prophétique du Christ et de son Eglise. Le «discernement» dont parle à plusieurs reprises l'apôtre Paul n'est pas seulement appréciation des réalités et des événements à la lumière de la foi; il est aussi décision concrète et engagement actif, non seulement dans l'Eglise, mais encore dans la société humaine.

On peut affirmer que tous les problèmes de notre temps dont il était déjà question dans la seconde partie de la Constitution conciliaire Gaudium et spes _ problèmes que le temps écoulé depuis n'a aucunement résolus ni simplifiés _ exigent la présence active des femmes et, précisons-le, leur contribution typique et irremplaçable.

En particulier, deux grandes tâches confiées à la femme méritent d'être rappelées à l'attention de tous.

En premier lieu, celle de donner toute sa dignité à la vie d'épouse et de mère. De nouvelles possibilités se présentent à la femme aujourd'hui pour une compréhension et une réalisation plus riche des valeurs humaines et chrétiennes impliquées dans la vie conjugale et dans l'expérience de la maternité; l'homme lui-même _ mari et père _ peut être amené à se corriger des diverses formes d'absentéisme ou de présence épisodique ou insuffisante, mieux, à nouer des relations nouvelles et significatives de communion interpersonnelle, grâce, précisément, à l'intervention intelligente, amoureuse et ferme de la femme.

Une autre tâche est celle d'assurer la dimension morale de la culture, c'est-à-dire une dimension vraiment humaine, conforme à la dignité de l'homme dans sa vie personnelle et sociale. Le Concile Vatican II a, semble-t-il, fait le lien entre la dimension morale de la culture et la participation des laïcs à la mission royale du Christ: «Que les laïcs unissent leurs forces pour apporter aux institutions et aux conditions de vie dans le monde, quand elles provoquent au péché, les assainissements convenables, pour qu'elles deviennent toutes conformes aux règles de la justice et favorisent l'exercice des vertus au lieu d'y faire obstacle. En agissant ainsi, les laïcs imprégneront de valeur morale la culture et les oeuvres humaines»(194).

Dans la mesure où la femme participe activement et de façon responsable au fonctionnement des institutions, dont dépend la sauvegarde de la priorité qu'on doit donner aux valeurs humaines dans la vie des communautés politiques, les paroles du Concile que nous venons de citer définissent un champ d'apostolat important de la femme: dans toutes les dimensions de la vie de ces communautés, depuis la dimension socio-économique jusqu'à la dimension socio-politique, il faut respecter et promouvoir la dignité personnelle de la femme et sa vocation spécifique: dans le domaine non seulement individuel mais aussi communautaire, non seulement dans des formes laissées à la liberté responsable des personnes, mais encore dans les formes garanties par les lois civiles justes.

«Il n'est pas bon que l'homme soit seul; je veux lui faire une aide qui lui soit assortie» (Gn 2, 18). A la femme Dieu Créateur a confié l'homme. Assurément l'homme a été confié a tout homme, mais d'une façon particulière il a été confié à la femme, parce que précisément la femme, grâce à l'expérience spéciale de sa maternité, semble dotée d'une sensibilité spécifique pour l'homme et pour ce qui constitue son véritable bien, à commencer par la valeur fondamentale de la vie. Qu'elles sont grandes, les possibilités et les responsabilités de la femme en ce domaine, en un temps où le développement de la science et de la technique n'est pas toujours inspiré et mesuré selon la véritable Sagesse, avec le risque inévitable de «déshumaniser» la vie humaine, surtout quand elle exigerait un amour plus intense et un accueil plus généreux!

Lorsqu'elle met ses dons au service de l'Eglise et de la société, la femme, tout à la fois, trouve son véritable épanouissement personnel _ sur lequel on insiste tant de nos jours _ et apporte sa contribution originale à la communion ecclésiale et au dynamisme apostolique du peuple de Dieu.

Dans la même perspective, il faut parler aussi de l'homme, et non seulement de la femme.

Co-présence et collaboration des hommes et des femmes

52. Au cours des réunions du Synode, plus d'une voix a exprimé la crainte qu'une insistance excessive sur la condition et le rôle des femmes puisse aboutir à un oubli inacceptable: l'oubli des hommes. Effectivement, en diverses situations ecclésiales, on a à déplorer l'absence ou la présence insuffisante des hommes, dont un certain nombre se soustrait à ses propres responsabilités ecclésiales, de sorte que, seules, des femmes s'emploient à y faire face: ainsi, par exemple, pour la participation à la prière liturgique à l'église, l'éducation et en particulier la catéchèse des enfants, la présence aux rencontres religieuses et culturelles, la collaboration aux initiatives de charité et aux entreprises missionnaires.

Un effort pastoral s'impose donc en vue d'obtenir la présence coordonnée des hommes et des femmes pour que soit rendue plus complète, plus harmonieuse et plus riche la participation des fidèles laïcs à la mission salvifique de l'Eglise.

La raison fondamentale qui exige et explique la présence coordonnée et la collaboration des hommes et des femmes n'est pas uniquement que cela assure, comme nous venons de le dire, un surcroît de signification et d'efficacité à l'action pastorale de l'Eglise; ni, moins encore, que cela correspond à un aspect sociologique de la convivialité humaine faite, naturellement, d'hommes et de femmes. C'est, tout d'abord, qu'ainsi se réalise le dessein originel du Créateur qui, «dès le commencement», a voulu que l'être humain soit «comme l'unité de deux» et qui a créé l'homme et la femme comme la première communauté de personnes, la racine de toute autre communauté, et, en même temps, comme un «signe» de cette communauté interpersonnelle d'amour qui constitue le mystère de la vie intime du Dieu Unique et Trinitaire.

C'est particulièrement pour cela que le mode le plus commun et le plus capillaire, et en même temps le plus fondamental, pour assurer cette présence coordonnée et harmonieuse des hommes et des femmes dans la vie et dans la mission de l'Eglise, c'est l'accomplissement des tâches et l'exercice des responsabilités du couple et de la famille chrétienne, dans lequel transparaît et se communique la variété des diverses formes d'amour et de vie: la forme conjugale, paternelle et maternelle, filiale et fraternelle. Comme le dit l'exhortation Familiaris consortio: «Si la famille chrétienne est une communauté dont les liens sont renouvelés par le Christ à travers la foi et les sacrements, sa participation à la mission de l'Eglise doit se réaliser d'une façon communautaire; c'est donc ensemble que les époux, en tant que couple, les parents et les enfants, en tant que famille, doivent vivre leur service de l'Eglise et du monde ... La famille chrétienne, par ailleurs, édifie le Royaume de Dieu dans l'histoire à travers les réalités quotidiennes qui concernent et qui caractérisent sa condition de vie: c'est dès lors dans l'amour conjugal et familial _ vécu dans sa richesse extraordinaire de valeurs et avec ses exigences de totalité, de fidélité et de fécondité _ que s'exprime et se réalise la participation de la famille chrétienne à la mission prophétique, sacerdotale et royale de Jésus-Christ et de son Eglise»(195).

En se plaçant dans cette perspective, les Pères du Synode ont rappelé le sens que doit assumer le sacrement de Mariage dans l'Eglise et dans la société pour éclairer et inspirer toutes les relations entre l'homme et la femme. C'est dans ce sens qu'ils ont soùligné «la nécessité urgente que chaque chrétien vive et annonce le message d'espoir contenu dans la relation entre l'homme et la femme. Le sacrement de Mariage qui consacre cette relation dans sa forme conjugale et la révèle comme signe de la relation du Christ avec son Eglise, contient un enseignement de grande importance pour la vie de l'Eglise; cet enseignement, par l'intermédiaire de l'Eglise, doit atteindre le monde d'aujourd'hui; toutes les relations entre l'homme et la femme doivent s'inspirer de cet enseignement. L'Eglise doit utiliser ces richesses encore plus largement»(196). Les mêmes Pères ont à juste titre relevé que «l'estime de la virginité et le respect de la maternité doivent tous deux être revalorisés»(197), afin, encore une fois, de favoriser le développement des vocations diverses et complémentaires dans le contexte vivant de la communion et au service de sa crissance incessante.

Malades et souffrants

53. L'homme est appelé à la joie, mais, chaque jour, il fait l'expérience de très nombreuses formes de souffrances et de douleurs. Aux hommes et aux femmes frappés de formes de souffrance et de douleur si variées, les Pères du Synode se sont adressés dans leur Message final en ces termes: «Vous, les abandonnés, vous qui êtes rebutés par notre société de consommation, malades, handicapés, pauvres, affamés, les émigrés, les exilés, les prisonniers, les chômeurs, les personnes âgées, les enfants abandonnés et les personnes seules, vous, victimes de la guerre et de toute sorte de violence, conséquences de notre société permissive: l'Eglise participe à votre souffrance qui vous conduit au Seigneur, qui vous associe à sa Passion rédemptrice, qui vous fait vivre à la lumière de sa Rédemption. Nous comptons sur vous pour enseigner au monde entier ce qu'est l'amour. Nous ferons tout notre possible pour que vous trouviez la place à laquelle vous avez droit dans la société et dans l'Eglise»(198).

Dans le contexte d'un monde sans frontières comme celui de la souffrance humaine, tournons nous vers tous ceux qui sont frappés par la maladie sous ses différentes formes: les malades, en effet, sont l'expression la plus fréquente et la plus commune de l'homme qui souffre.

A tous et à chacun s'adresse l'appel du Seigneur: Les malades eux aussi sont envoyés comme des ouvriers dans sa vigne. Le poids qui fatigue les membres du corps et ébranle la sérénité de l'âme, loin de les détourner d'aller travailler à la vigne, les invite à vivre leur vocation humaine et chrétienne et à participer à la croissance du Royaume de Dieu sous des modalités nouvelles et même plus précieuses. Les paroles de l'apôtre Paul doivent devenir leur programme et, tout d'abord, elles sont une lumière qui fait briller à leurs yeux le sens de grâce de leur situation elle-même: «Ce qu'il reste à souffrir des épreuves du Christ, je l'accomplis dans ma propre chair, pour son Corps qui est l'Eglise» (Col 1, 24). C'est en faisant cette découverte que l'Apôtre est arrivé à la joie: «Je trouve la joie dans les souffrances que je supporte pour vous» (Col 1, 24). Pareillement, beaucoup de malades peuvent devenir porteurs de «la joie de l'Esprit Saint au milieu de bien des épreuves» (1 Th 1, 6) et être témoins de la Résurrection de Jésus. Comme l'a exprimé un handicapé au cours de son intervention dans une séance du Synode, «il est très important de mettre en lumière le fait que les chrétiens qui vivent dans des situations de maladie, de souffrances, de vieillesse, sont invités par Dieu non pas seulement à unir leur propre douleur à la Passion du Christ, mais aussi à accueillir dès maintenant en eux-mêmes et à transmettre aux autres la force de renouveau et la joie du Christ ressuscité (cf. 2 Co 4, 10-11; 1 P 4, 13; Rm 8, 18 et suiv.)»(199).

L'Eglise, de son côté, comme on le lit dans la Lettre Apostolique Salvifici doloris, «elle qui naît du mystère de la rédemption dans la Croix du Christ, a le devoir de chercher à rencontrer l'homme d'une façon particulière sur le chemin de la souffrance. En cette rencontre, l'homme "devient le chemin de l'Eglise" et c'est là l'un des chemins les plus importants»(200). L'homme qui souffre est le chemin de l'Eglise, parce qu'il est, avant tout, le chemin du Christ Lui-même, bon Samaritain, qui «ne passe pas son chemin», mais qui «a compassion de lui ..., s'approche de lui ..., bande ses plaies ..., prend soin de lui» (Lc 10, 32-34).

La communauté chrétienne a transcrit, de siècle en siècle, dans l'immense multitude des personnes malades et souffrantes, la parabole du bon Samaritain, en révélant et en communiquant l'amour de guérison et de consolation du Christ. Cela s'est fait par le moyen du témoignage de la vie religieuse consacrée au service des malades et par l'engagement infatigable de toutes les personnes qui s'occupent des services de la santé. Aujourd'hui, même dans les hôpitaux et les maisons de soins catholiques, on voit s'accroître, jusqu'à devenir parfois totale et exclusive, la présence des fidèles laïcs, hommes et femmes: c'est justement eux, médecins, infirmiers et infirmières, tout le personnel de la santé et les aides bénévoles, qui sont appelés à être l'image vivante du Christ et de son Eglise dans l'amour envers les malades et les souffrants.

Action pastorale rénovée

54. Il faut que cet héritage si précieux que l'Eglise a reçu de Jésus-Christ, «médecin de la chair et de l'âme»(201), ne diminue pas, mais qu'il soit de plus en plus mis en valeur et enrichi grâce à une reprise et un nouvel élan de l'action pastorale pour et avec les malades et les personnes qui souffrent. Ce doit être une action capable de soutenir et de promouvoir attention, présence, écoute, dialogue, partage et assistance concrète apportés à la personne dans les moments où, par la maladie et la souffrance, est mise à rude épreuve non seulement sa confiance dans la vie mais aussi sa foi même en Dieu et en son amour de Père. Ce renouveau pastoral trouve son expression la plus signifiante dans la célébration sacramentelle avec et pour les malades, comme force dans la douleur et dans la faiblesse, comme espérance dans le désespoir, comme lieu de rencontre et de fête.

Un des objectifs fondamentaux de cette action pastorale renouvelée et intensifiée, qui ne peut pas ne pas englober, et de façon coordonnée, toutes les composantes de la communauté ecclésiale, c'est de considérer le malade, l'handicapé, la personne qui souffre, non pas simplement comme bénéficiaire de l'amour et du service offerts par l'Eglise, mais aussi comme sujet actif et responsable de l'oeuvre d'évangélisation et de salut.

Dans cette perspective, l'Eglise a la bonne nouvelle à publier à l'intérieur de la société et des cultures qui, ayant perdu le sens de la souffrance humaine, «censurent» tous les discours qui parlent de cette réalité de la vie. La bonne nouvelle, c'est l'annonce que souffrir peut avoir un sens positif pour l'homme et pour la société elle-même, étant donné que souffrir est orienté à devenir une forme de participation à la souffrance salvifique du Christ et à sa joie de ressuscité, que c'est donc une force de sanctification et d'édification de l'Eglise.

L'annonce de cette bonne nouvelle devient crédible lorsqu'elle n'est pas seulement un discours dit du bout des lèvres, mais passe à travers le témoignage de la vie, que ce soit celui de tous ceux qui prennent soin de la santé des malades, des handicapés et de ceux qui souffrent, mais aussi celui des malades eux-mêmes, rendus plus conscients et responsables de leur place et de leur tâche dans l'Eglise et pour l'Eglise.

Pour que la «civilisation de l'amour» puisse fleurir et porter du fruit dans le monde immense de la douleur humaine, il sera utile de relire et aussi de méditer à nouveau la Lettre Apostolique Salvifici doloris, dont nous rappelons ici la conclusion: «Il est donc nécessaire qu'au pied de la Croix du Calvaire se rassemblent en esprit tous ceux qui souffrent et qui croient au Christ, en particulier ceux qui souffrent à cause de leur foi en Lui, crucifié et ressuscité, afin que l'oblation de leurs souffrances hâte la réalisation de la prière du Sauveur Lui-même pour l'unité de tous. Que se rassemblent là aussi les hommes de bonne volonté, car sur la Croix se tient le "Rédempteur de l'homme", l'Homme de douleur qui a assumé en lui les souffrances physiques et morales des hommes de tous les temps, afin qu'ils puissent trouver dans l'amour le sens salvifique de leurs souffrances et des réponses fondées à toutes leurs interrogations. Avec Marie, Mère du Christ, qui se tenait au pied de la Croix, nous nous arrêtons près de toutes les croix de l'homme d'aujourd'hui. Nous invoquons tous les saints qui au cours des siècles ont participé spécialement aux souffrances du Christ. Nous leur demandons de nous soutenir. Et nous demandons à vous tous qui souffrez de nous aider. A vous précisément qui êtes faibles, nous demandons de devenir une source de force pour l'Eglise et pour l'humanité. Dans le terrible combat entre les forces du bien et du mal dont le monde contemporain nous offre le spectacle, que votre souffrance unie à la Croix du Christ soit victorieuse!»(202).

Etats de vie et vocations

55. Les ouvriers de la Vigne sont tous les membres du Peuple de Dieu: les prêtres, les religieux et les religieuses, les fidèles laïcs, tous ceux qui sont à la fois objet et sujet de la communion de l'Eglise et de la participation à sa mission de salut. Tous et chacun, nous travaillons à l'unique Vigne du Seigneur commune à tous, avec des charismes et des ministères divers et complémentaires.

Déjà sur le plan de l'être, avant même celui de l'agir, les chrétiens sont les sarments de l'unique vigne féconde, qui est le Christ; ils sont les membres vivants de l'unique Corps du Seigneur, édifié dans la force de l'Esprit. Sur le plan de l'être: cela ne veut pas dire seulement par la vie de grâce et de sainteté, qui est la première et la plus abondante source de la fécondité apostolique et missionnaire de notre Sainte Mère l'Eglise; cela signifie aussi par le moyen de la sainteté de vie qui caractérise les prêtres et les diacres, les religieux et les religieuses, les membres des instituts séculiers, les fidèles laïcs.

Dans l'Eglise-Communion, les états de vie sont si unis entre eux qu'ils sont ordonnés l'un à l'autre. Leur sens profond est le même, il est unique pour tous: celui d'être une façon de vivre l'égale dignité chrétienne et la vocation universelle à la sainteté dans la perfection de l'amour. Les modalités sont tout à la fois diverses et complémentaires, de sorte que chacune d'elles a sa physionomie originale et qu'on ne saurait confondre, et, en même temps, chacune se situe en relation avec les autres et à leur service.

Ainsi l'état de vie du fidèle laïc a comme trait spécifique son caractère séculier et il réalise un service ecclésial en attestant et en rappelant, à sa manière, aux prêtres, aux religieux et aux religieuses, le sens que les réalités terrestres et temporelles possèdent dans le dessein salvifique de Dieu. A son tour, le sacerdoce ministériel représente la garantie permanente de la présence sacramentelle, dans la diversité des temps et des lieux, du Christ Rédempteur. L'état religieux témoigne du caractère eschatologique de l'Eglise ou, en d'autres termes, de sa tension vers le Royaume de Dieu, qui est préfiguré et en quelque sorte anticipé et déjà goûté par les voeux de chasteté, de pauvreté et d'obéissance.

Tous les états de vie, tant dans leur ensemble que chacun d'eux par rapport aux autres, sont au service de la croissance de l'Eglise; ce sont des modalités diverses qui s'unifient profondément dans le «mystère de communion» de l'Eglise et qui se coordonnent, avec un profond dynamisme, dans sa mission unique.

De cette façon, le mystère unique et identique de l'Eglise révèle et revit, dans la diversité des états de vie et dans la variété des vocations, l'infinie richesse du mystère du Christ. Comme se plaisent à le répéter les Pères, l'Eglise est comme un champ où l'on trouve une merveilleuse, une fascinante variété d'herbes, de plantes, de fleurs et de fruits. Saint Ambroise écrit: «Un champ produit beaucoup de fruits, mais le meilleur est celui qui produit des fruits et des fleurs. Or le champ de l'Eglise porte en abondance les uns et les autres. Ici, vous pouvez voir la virginité se mettre à fleurir, là, le veuvage manifester son austérité comme les forêts dans la plaine; ailleurs, la riche moisson des noces bénies par l'Eglise remplir les immenses greniers du monde d'une abondante récolte, et les pressoirs du Seigneur Jésus déborder comme des fruits d'une vigne florissante, fruits qui sont la richesse des noces chrétiennes»(203).

Les diverses vocations laïques

56. La riche variété de l'Eglise trouve sa dernière manifestation à l'intérieur de chacun des états de vie. Ainsi à l'intérieur de l'état de vie laïque se trouvent différentes «vocations», en d'autres termes, des chemins spirituels et apostoliques différents qui concernent chacun des fidèles laïcs. Dans le sillon d'une vocation laïque «commune», fleurissent des vocations laïques «particulières». A ce propos, nous pouvons mentionner ici l'expérience spirituelle qui a mûri récemment dans l'Eglise et a produit une floraison de différentes formes d'Instituts séculiers: aux fidèles laïcs, mais aussi aux prêtres eux-mêmes, s'est ouverte la possibilité de pratiquer les conseils évangéliques de pauvreté, de chasteté et d'obéissance par le moyen des voeux ou de promesses, en conservant pleinement leur condition propre de laïcs et de clercs(204). Comme l'ont noté les Pères du Synode: «L'Esprit suscite encore d'autres formes d'offrande de soi même auxquelles se consacrent des personnes qui restent entièrement dans la vie laïque»(205).

Nous pouvons conclure en relisant une belle page de Saint François de Sales, qui a tant promu la spiritualité des laïcs(206). Parlant de la «dévotion», c'est-à-dire de la perfection chrétienne ou de «la vie selon l'Esprit», il présente d'une manière simple et splendide la vocation de tous les chrétiens à la sainteté et, en même temps, la forme spécifique dans laquelle la réalise chaque chrétien: «Dieu commanda à la création, aux plantes de porter leurs fruits, chacune selon son genre (Gn 1, 11): ainsi commande-t-il aux chrétiens, qui sont les plantes vivantes de son Eglise, qu'ils produisent des fruits de dévotion, un chacun selon sa qualité et vocation. La dévotion doit être différemment exercée par le gentilhomme, par l'artisan, par le valet, par le prince, par la veuve, par la fille, par la mariée; et non seulement cela, mais il faut accommoder la pratique de la dévotion aux forces, aux affaires et aux devoirs de chaque particulier ... C'est une erreur, même une hérésie, de vouloir bannir la vie dévote de la compagnie des soldats, de la boutique des artisans, de la cour des princes, du ménage des gens mariés. Il est vrai, Philothée, que la dévotion purement contemplative, monastique et religieuse, ne peut être exercée en ces vocations-là; mais aussi, outre ces trois sortes de dévotion, il y en a plusieurs autres, propres à perfectionner ceux qui vivent en états séculiers... Où que nous soyons, nous pouvons et devons aspirer à vie parfaite»(207).

Se situant dans la même ligne, le Concile Vatican II écrit: «Cette spiritualité des laïcs doit revêtir des caractéristiques particulières suivant les conditions de vie de chacun: vie conjugale et familiale, célibat et veuvage, état de maladie, activité professionnelle et sociale. Chacun doit donc développer sans cesse les qualités et les dons reçus et en particulier ceux qui sont adaptés à ses conditions de vie et se servir des dons personnels de l'Esprit Saint»(208).

Ce qui vaut des vocations spirituelles vaut aussi, et en un certain sens à plus forte raison, de l'infinie variété des modalités selon lesquelles tous les membres de l'Eglise, et chacun d'eux, sont des ouvriers qui travaillent dans la Vigne du Seigneur, édifiant le Corps mystique du Christ. En vérité, chacun est appelé personnellement, dans l'unicité de son histoire personnelle, à apporter sa propre contribution pour l'avènement du Royaume de Dieu. Aucun talent, fût-ce le plus petit, ne peut rester caché et inutilisé (cf. Mt 25, 24-27).

L'apôtre Pierre nous adresse cet avertissement: «Ce que chacun de vous a reçu comme don de la grâce, mettez-le au service des autres, comme de bons gérants de la grâce de Dieu sous toutes ses formes» (1 P 4, 10).
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Apostolat des Laïcs - Vocation et Mission des Laïcs dans l'Eglise et dans le Monde Empty Re: Apostolat des Laïcs - Vocation et Mission des Laïcs dans l'Eglise et dans le Monde

Message par Her Dim 3 Avr - 21:29

EXHORTATION APOSTOLIQUE
POST-SYNODALE
CHRISTIFIDELES LAICI
DE SA SAINTETE LE PAPE
JEAN-PAUL II
SUR LA VOCATION
ET LA MISSION DES LAÏCS
DANS L'EGLISE ET DANS LE MONDE

Donné à Rome, près de Saint-Pierre, le 30 Décembre 1988, en la fête de la Sainte Famille de Jésus, Marie et Joseph. (Suite 4) :


CHAPITRE V

POUR QUE VOUS PORTIEZ DU FRUIT
La formation des fidèles laïcs

Acquérir toujours plus de maturité

57. L'image évangélique de la vigne et des sarments nous révèle un autre aspect fondamental de la vie et de la mission des fidèles laïcs: l'appel à grandir, et à murir sans cesse, à porter toujours plus de fruit.

Comme un vigneron diligent, le Père prend soin de sa vigne. La présence empressée de Dieu est ardemment implorée par Israël qui fait cette prière: «Dieu de l'univers, reviens! Du haut des cieux regarde et vois, visite cette vigne: protège-la, celle qu'a plantée ta main puissante» (Ps 80, 15-16). Jésus à son tour parle de l'oeuvre du Père: «Moi, je suis la vraie vigne, et mon Père est le vigneron. Tout sarment qui est en moi, mais qui ne porte pas de fruit, mon Père l'enlève; tout sarment qui donne du fruit, Il le nettoie, pour qu'il en donne davantage» (Jn 15, 1-2).

La vitalité des sarments dépend de leur insertion dans la vigne, qui est Jésus-Christ: «Celui qui demeure en moi et en qui je demeure,celui-là donne beaucoup de fruit, car, en dehors de moi, vous ne pouvez rien faire» (Jn 15, 5).

L'homme est interpellé dans sa liberté par l'appel de Dieu à croître, à mûrir et à porter du fruit. Il ne peut pas ne pas répondre, il ne peut pas ne pas assumer sa responsabilité. Et c'est à cette responsabilité, effrayante et exaltante, que font allusion ces paroles de Jésus: «Si quelqu'un ne demeure pas en moi, il est comme un sarment qu'on a jeté dehors, et qui se dessèche. Les sarments secs, on les ramasse, on les jette au feu, et ils brûlent» (Jn 15, 6).

En ce dialogue entre Dieu qui appelle et la personne interpellée dans sa responsabilité se situe la possibilité, et même la nécessité, d'une formation intégrale et permanente des fidèles laïcs, à laquelle les Pères du Synode ont consacré à juste titre une large part de leur travail. En particulier, après avoir décrit la formation chrétienne comme «un processus personnel continuel de maturation dans la foi et de ressemblance au Christ, selon la volonté du Père, sous la conduite de l'Esprit Saint», ils ont clairement affirmé que «la formation des fidèles laïcs doit se situer parmi les priorités du diocèse et trouver sa place dans les programmes d'action pastorale, de sorte que tous les efforts de la communauté (prêtres, laïcs, religieux) convergent à cette fin»(209).

Découvrir et vivre sa vocation et sa mission personnelles

58. La formation des fidèles laïcs a comme objectif fondamental la découverte toujours plus claire de leur vocation personnelle et la disponibilité toujours plus grande à la vivre dans l'accomplissement de leur propre mission.

Dieu m'appelle et Il m'envoie comme ouvrier à sa vigne; Il m'appelle et Il m'envoie travailler à l'avènement de son Règne dans l'histoire: cette vocation et cette mission personnelles définissent la dignité et la responsabilité de chaque fidèle laïc, et elles constituent la ligne de force de toute l'oeuvre de formation. Celle-ci a pour but d'aider à reconnaître avec joie et gratitude cette dignité et à faire face fidèlement et généreusement à cette responsabilité.

Dieu, en effet, a pensé à nous de toute éternité et Il nous a aimés comme des personnes uniques et irremplacables, appelant chacun de nous par son nom propre, comme le Bon Pasteur, qui «appelle ses brebis par leur nom» (Jn 10, 3). Mais le plan éternel de Dieu ne se révèle à chacun de nous que dans le développement historique de sa vie et de ses vicissitudes, et de ce fait, graduellement: en un certain sens, jour après iour.

Or, pour pouvoir découvrir la volonté concrète du Seigneur sur notre vie, les conditions indispensables sont: l'écoute prompte et docile de la parole de Dieu, la prière fidèle et constante, la relation avec un guide spirituel sage et aimant, la lecture, dans la foi, des dons et des talents recus et, en même temps, des diverses situations sociales et historiques où l'on est place.

Dans la vie de chaque fidèle laïc, il y a, en outre, des moments particulièrement significatifs et décisifs pour discerner l'appel de Dieu et pour recevoir la mission qu'Il confie: parmi ces moments, il y a le temps de l'adolescence et de la jeunesse. Que personne cependant n'oublie que le Seigneur, comme le maître du domaine dans la parabole, appelle _ dans le sens qu'Il fait connaître sa sainte volonté de façon concrète et précise _ à toutes les heures de la vie; voilà pourquoi la vigilance, dans le sens d'attention empressée à la voix de Dieu, est une attitude fondamentale et constante du disciple.

Quoiqu'il en soit, il ne s'agit pas simplement de savoir ce que Dieu veut de nous, de chacun de nous, dans les différentes situations de la vie. Il faut faire ce que Dieu veut; c'est ce que nous rappelle la parole de Marie, la Mère de Dieu, s'adressant aux serviteurs à Cana: «Faites tout ce qu'il vous dira» (Jn 2, 5).

Et pour agir en toute fidélité à la volonté de Dieu, il faut en être capables, et s'en rendre toujours plus capables. Avec la grâce du Seigneur, assurément: Elle ne manque jamais, comme le dit Saint Léon le Grand: «Celui qui vous a donné la dignité, vous donnera la force!»(210). Mais aussi avec la coopération libre et responsable de chacun de nous.

Telle est la tâche merveilleuse et absorbante qui attend tous les fidèles laïcs, tous les chrétiens, sans aucun répit: connaître toujours plus les richesses de la foi et du Baptême et les vivre en une plénitude sans cesse croissante, comme nous y exhorte l'apôtre Pierre, qui parle de naissance et de croissance comme de deux étapes de la vie chrétienne: «Soyez semblables à des enfants nouveau-nés, soyez avides de la Parole, comme d'un lait pur qui vous fera grandir pour arriver au salut» (1 P 2, 2).

Une formation intégrale à vivre dans l'unité

59. La découverte et la réalisation de leur vocation et leur mission personnelles comportent, pour les fidèles laïcs, l'exigence d'une formation à la vie dans l'unité, dont ils portent la marque dans leur être même de membres de l'Eglise et de citoyens de la société humaine.

Dans leur existence, il ne peut y avoir deux vies parallèles: d'un côté, la vie qu'on nomme «spirituelle» avec ses valeurs et ses exigences; et de l'autre, la vie dite «séculière», c'est-à-dire la vie de famille, de travail, de rapports sociaux, d'engagement politique, d'activités culturelles. Le sarment greffé sur la vigne qui est le Christ donne ses fruits en tout secteur de l'activité et de l'existence. Tous les secteurs de la vie laïque, en effet, rentrent dans le dessein de Dieu, qui les veut comme le «lieu historique» de la révélation et de la réalisation de la charité de Jésus Christ à la gloire du Père et au service des frères. Toute activité, toute situation, tout engagement concret _ comme, par exemple, la compétence et la solidarité dans le travail, l'amour et le dévouement dans la famille et dans l'éducation des enfants, le service social et politique, la présentation de la vérité dans le monde de la culture _ tout cela est occasion providentielle pour «un exercice continuel de la foi, de l'espérance et de la charité»(211).

C'est à cette unité de vie que le Concile Vatican II a invité tous les fidèles laïcs en dénonçant avec force la gravité de la fracture entre la foi et la vie, entre l'Evangile et la Culture: «Le Concile exhorte les chrétiens, citoyens de l'une et l'autre cité, à remplir avec zèle et fidélité leurs tâches terrestres, en se laissant conduire par l'esprit de l'Evangile. Ils s'éloignent de la vérité ceux qui, sachant que nous n'avons point ici-bas de cité permanente, mais que nous mar chons vers la cité future, croient pouvoir, pour cela, négliger leurs tâches humaines, sans s'apercevoir que la foi même, compte tenu de la vocation de chacun, leur en fait un devoir plus pressant. Mais ils ne se trompent pas moins ceux qui, à l'inverse, croient pouvoir se livrer entièrement à des activités terrestres, en agissant comme si elles étaient tout à fait étrangères à leur vie religieuse _ celle-ci se limitant alors pour eux à l'exercice du culte et à quelques obligations morales déterminées. Ce divorce entre la foi dont ils se réclament et le comportement quotidien d'un grand nombre est à compter parmi les plus graves erreurs de notre temps»(212).

C'est pourquoi j'ai affirmé qu'une foi qui ne devient pas culture est une foi «qui n'est pas pleinement reçue, pas entièrement pensée, pas fidèlement vécue»(213).

Aspects de la formation

60. En cette synthèse de vie se situent les nombreux aspects coordonnés de la formation intégrale des fidèles laïcs.

Il n'est pas douteux que la formation spirituelle ne doive occuper une place privilégiée dans la vie de chacun, car chacun est appelé à grandir sans cesse dans l'intimité avec Jésus-Christ, dans la conformité à la volonté du Père,dans le dévouement à ses frères dans la charité et dans la justice. Le Concile écrit: «Cette vie d'intime union avec le Christ dans l'Eglise est alimentée par des nourritures spirituelles communes à tous les fidèles, en particulier par la participation active à la sainte Liturgie. Les laïcs doivent les employer de telle sorte que, remplissant parfaitement les obligations du monde dans les conditions ordinaires de l'existence, ils ne séparent pas l'union au Christ et leur vie, mais grandissent dans cette union en accomplissant leurs travaux selon la volonté de Dieu»(214).

La formation doctrinale des fidèles se révèle de nos jours de plus en plus urgente, du fait non seulement du dynamisme naturel d'approfondissement de la foi, mais aussi de la nécessité de «rendre raison de l'espérance» qui est en eux en face du monde et de ses problèmes graves et complexes. De là découle l'absolue nécessité d'une action systématique de catéchèse, adaptée à l'âge et aux diverses situations de vie, et d'une promotion chrétienne plus résolue de la culture, afin de répondre aux questions éternelles et aux problèmes nouveaux qui agitent l'homme et la société d'aujourd'hui.

Il est tout à fait indispensable, en particulier, que les fidèles laïcs, surtout ceux qui sont engagés de diverses façons sur le terrain social ou politique, aient une connaissance plus précise de la doctrine sociale de l'Eglise, comme les Pères synodaux l'ont demandé à plusieurs reprises dans leurs interventions. Parlant de la participation politique des fidèles laïcs, le Synode s'est exprimé en ces termes: «Pour que les laïcs puissent réaliser activement ce noble projet dans la politique ( à savoir le projet de faire reconnaître et apprécier les valeurs humaines et chrétiennes), il ne suffit pas de les exhorter, il faut leur offrir les moyens voulus pour former leur conscience sociale, spécialement dans la doctrine sociale de l'Eglise, qui renferme des principes de réflexion, des critères de jugement et des directives pour l'action (cf. Congrégation pour la Doctrine de la Foi, "Instruction sur Liberté chrétienne et libération", 72). Cette doctrine doit se trouver déjà dans le programme de base de la catéchèse et être expliquée dans des sessions spécialisées ainsi que dans les écoles et universités. Il convient de noter que la doctrine sociale de l'Eglise est dynamique, c'est-à-dire qu'elle s'adapte aux circonstances de temps et de lieux. Les pasteurs ont le droit et le devoir de proposer des principes de moralité en matière d'ordre social comme en d'autres domaines; tous les chrétiens doivent s'employer à la défense des droits de l'homme; mais l'engagement actif dans les partis politiques est réservé aux laïcs»(215).

Dans le contexte de la formation intégrale et unitaire des fidèles laïcs, le souci de cultiver les valeurs humaines doit avoir sa place; il est important pour l'action missionnaire et apostolique. C'est précisément en ce sens que le Concile a écrit: «(Les laïcs) estimeront beaucoup la compétence professionnelle, le sens familial et civique, et les vertus qui regardent la vie sociale telles que la probité, l'esprit de justice, la sincérité, la délicatesse, la force d'âme; sans elles il n'y a pas de vraie vie chrétienne»(216).

Collaborateurs de Dieu éducateur

61. Quels sont les lieux et les moyens de formation des fidèles? Quelles sont les personnes et les communautés appelées à remplir ce devoir de la formation intégrale et unitaire des laïcs?

De même que l'oeuvre de l'éducation de l'homme est intimement liée à la paternité et à la maternité, ainsi la formation chrétienne trouve sa racine et sa force en Dieu; Il est le Père qui aime et éduque ses enfants. Oui, Dieu est le premier et le grand éducateur de son Peuple, comme le dit l'étonnant passage du Chant de Moïse: «Au pays de la steppe, Il l'adopte, dans la solitude éclatante du désert. Il l'entoure, Il l'élève, Il le garde comme la prunelle de son oeil. Tel un vautour qui veille sur son nid, plane au-dessus de ses petits, Il déploie ses ailes et le prend, Il le soutient sur son pennage. Le Seigneur est seul pour le conduire, point de Dieu étranger avec lui» (Dt 32, 10-12; cf. 8, 5).

L'oeuvre éducative de Dieu se révèle et s'achève en Jésus, le Maître, et elle touche, par le dedans, le coeur de tout homme, grâce à la présence dynamique de l'Esprit. L'Eglise-mère est appelée à s'associer à cette oeuvre d'éducation divine, l'Eglise tant en elle-même que dans ses diverses articulations et expressions. C'est ainsi que les fidèles laïcs sont formés par l'Eglise et dans l'Eglise, dans une communion et collaboration réciproque de tous ses membres: prêtres, religieux et fidèles laïcs. C'est ainsi que la communauté ecclésiale tout entière, dans la variété de ses membres, reçoit la fécondité de l'Esprit et y apporte sa collaboration. C'est en ce sens que Méthode d'Olympe écrivait: «Les imparfaits ... sont portés et formés, comme dans le sein d'une mère, par ceux qui sont plus parfaits, afin qu'ils soient conçus et engendrés par la grandeur et la beauté de la vertu»(217); c'est ce qui se produisit pour Saint Paul, porté et introduit dans l'Eglise par les chrétiens formés (en la personne d'Ananie) et devenu ensuite à son tour parfait et père spirituel de tant de fils!

L'oeuvre éducative est avant tout le fait de l'Eglise universelle; le Pape y exerce son rôle de premier formateur des fidèles laïcs. A lui, parce que successeur de Pierre, revient le ministère de «confirmer dans la foi ses frères» en enseignant à tous les croyants les éléments essentiels de la vocation et de la mission chrétiennes et ecclésiales. Non seulement les paroles qu'il prononce lui-même, mais aussi celles que transmettent les documents des divers Dicastères du Saint-Siège demandent à être écoutées avec une docilité aimante par les fidèles laïcs.

L'Eglise Une et universelle est présente en chacune des diverses parties du monde, dans les Eglises particulières. En chacune d'elles, l'Evêque a une responsabilité personnelle par rapport aux fidèles laïcs; il doit les former par l'annonce de la parole, la célébration de l'Eucharistie et des sacrements, l'animation et la direction de leur vie chrétienne.

A l'intérieur de l'Eglise particulière ou diocèse, se situe et agit la paroisse, qui a un rôle essentiel dans la formation plus immédiate et personnelle des fidèles laïcs. En effet, ayant plus de facilité à atteindre chaque personne en particulier et chaque groupe, la paroisse est appelée à former ses membres à l'écoute de la Parole de Dieu, au dialogue liturgique et personnel avec Dieu, à la vie de charité fraternelle, et à faire percevoir d'une façon plus directe et concrète le sens de la communion ecclésiale et de la responsabilité missionnaire.

A l'intérieur encore de certaines paroisses, surtout de celles qui sont vastes et dispersées, les petites communautés ecclésiales présentes peuvent être de grande utilité dans la formation des chrétiens, en rendant plus capillaires et pénétrantes la conscience et l'expérience de la communion et de la mission ecclésiale. Une autre forme d'aide peut être offerte, comme l'ont déclaré les Pères synodaux, par une catéchèse post baptismale sous forme de catéchuménat, consistant à proposer de nouveau certains éléments du Rituel de l'Initiation Chrétienne des Adultes, de façon à faire accueillir et vivre les richesses immenses et extraordinaires du baptême reçu, ainsi que les responsabilités qui en découlent(218).

Dans la formation que les fidèles laïcs reçoivent dans leur diocèse ou dans leur paroisse, spécialement pour ce qui regarde le sens de la communion et de la mission, le soutien que s'apportent réciproquement les différents membres de l'Eglise est d'une importance particulière: c'est un soutien qui, tout à la fois, révèle et réalise le mystère de l'Eglise Mère et Educatrice. Les prêtres et les religieux doivent aider les fidèles laïcs dans leur formation. En ce sens, les Pères du Synode ont invité les prêtres et les candidats aux Ordres à «se préparer avec soin à être capables de favoriser la vocation et la mission des laïcs»(219). A leur tour, les fidèles laïcs eux-mêmes peuvent et doivent aider les prêtres et les religieux dans leur cheminement spirituel et pastoral.

Autres milieux d'éducation

62. La famille chrétienne, elle aussi, en tant qu'«Eglise domestique», constitue une école naturelle et fondamentale pour la formation de la foi: le père et la mère reçoivent du sacrement de Mariage la grâce et le ministère de l'éducation chrétienne de leurs enfants, devant lesquels ils portent témoignage et à qui ils transmettent à la fois les valeurs humaines et les valeurs religieuses. En apprenant les premiers mots, les enfants apprennent aussi à louer Dieu, qu'ils sentent près d'eux comme un Père plein d'amour et de prévenance; en apprenant les premiers gestes d'affection, les enfants apprennent aussi à s'ouvrir aux autres et à percevoir dans le don d'eux-mêmes le sens de la vie humaine. La vie quotidienne elle-même d'une famille authentiquement chrétienne constitue la première «expérience d'Eglise», destinée à trouver confirmation et développement dans l'insertion active et responsable des enfants dans une plus vaste communauté ecclésiale et dans la société civile. Plus les époux et les parents chrétiens grandiront dans la conscience que leur «Eglise domestique» participe à la vie et à la mission de l'Eglise universelle, plus aussi leurs enfants pourront être formés au «sens de l'Eglise» et comprendront la beauté qu'il y a à consacrer leur énergie au service du Royaume de Dieu.

Les écoles et les universités catholiques sont aussi des lieux importants de formation, et de même les centres de renouveau spirituel qui, aujourd'hui, vont se multipliant. Comme l'ont relevé les Pères du Synode, dans notre contexte actuel, social et historique, marqué par une profonde évolution culturelle, la participation des parents chrétiens à la vie de l'école est loin de suffire; il faut préparer des fidèles laïcs qui se consacrent à l'oeuvre d'éducation comme à une mission ecclésiale proprement dite; il faut constituer et développer des «communautés éducatives» formées à la fois de parents, d'enseignants, de prêtres, de religieux et religieuses, de représentants des jeunes. Et pour que l'école puisse exercer dignement sa fonction d'éducation, les fidèles laïcs doivent se sentir engagés à exiger de tous et à promouvoir en faveur de tous une véritable liberté d'éducation, y compris au moyen d'une législation civile adaptée(220).

Les Pères du Synode ont eu des paroles d'estime et d'encouragement à l'adresse de tous les fidèles laïcs, hommes et femmes, qui, avec un profond esprit civique et chrétien, assument une tâche éducative dans l'école et dans des instituts de formation. Ils ont, en outre, marqué l'urgente nécessité que les fidèles laïcs maîtres ou professeurs dans les diverses écoles, catholiques ou non, soient de vrais témoins de l'Evangile, par l'exemple de leur vie, leur compétence et leur conscience profesionnelle, l'inspiration chrétienne de leur enseignement, respectant toujours _ évidemment _ l'autonomie des différentes sciences et disciplines. Il est particulièrement important que la recherche scientifique et technique menée par des fidèles laïcs prenne comme critère le service de l'homme dans la totalité de ses valeurs et de ses exigences: à ces fidèles laïcs, l'Eglise confie le soin de rendre plus compréhensible à tous le lien intime qui existe entre la foi et la science, entre l'Evangile et la culture humaine(221).

«Ce Synode _ lisons-nous dans l'une des propositions _ fait appel au rôle prophétique des écoles et des universités catholiques et loue le dévouement des maîtres et des enseignants, actuellement en très grande partie laïcs, pour que, dans les maisons d'éducation catholique, ils puissent former des hommes et des femmes en qui s'incarne "le commandement nouveau". La présence simultanée de prêtres et de laïcs, et aussi de religieux et de religieuses, offre aux étudiants une vivante image de l'Eglise et facilite la connaissance de ses richesses (cf. Congrégation pour l'Education Catholique, "Le laïc éducateur, témoin de la foi dans les écoles")»(222).

Pareillement, les groupes, les associations et les mouvements ont leur place dans la formation des fidèles laïcs: ils ont, en effet, chacun avec leurs méthodes propres, la possibilité d'offrir une formation profondément ancrée dans l'expérience même de la vie apostolique; ils ont également l'occasion de compléter, de concrétiser et de spécifier la formation que leurs membres reçoivent d'autres maîtres ou d'autres communautés.

La formation réciproquement reçue et donnée par tous

63. La formation n'est pas le privilège de certains, mais bien un droit et un devoir pour tous. A ce sujet, les Pères synodaux ont demandé «que la possibilité de la formation soit offerte à tous, surtout aux pauvres, qui à leur tour peuvent être eux-mêmes des sources de formation pour tous»; et ils ont ajouté: «Pour la formation, qu'on emploie des moyens adaptés qui aideront les chrétiens à mieux réaliser leur pleine vocation humaine et chrétienne»(223).

Pour mettre en oeuvre une pastorale vraiment efficace, il est nécessaire de promouvoir, y compris en instituant des cours et des écoles spécialisées, la formation des formateurs. Former ceux qui, à leur tour, devront s'employer à la formation des fidèles laïcs, constitue une exigence première pour assurer la formation générale et capillaire de tout le Peuple de Dieu, de tous les fidèles laïcs.

Dans l'oeuvre de formation, il est nécessaire de consacrer une attention spéciale à la culture locale, selon l'invitation explicite du Synode: «La formation des chrétiens tiendra le plus grand compte de la culture humaine du lieu, qui contribue à la formation elle-même, et elle guidera dans le jugement des valeurs déjà contenues dans la culture traditionnelle et de celles qui se trouvent dans la culture moderne. Il faut donner l'attention requise aux différentes cultures qui peuvent coexister en un même peuple, en une même nation. L'Eglise, Mère et Maîtresse des peuples, s'efforcera de sauvegarder, le cas échéant, la culture des minorités qui vivent au milieu de grandes nations»(224).

Dans l'oeuvre de la formation, certaines convictions se révèlent particulièrement nécessaires et fécondes. La conviction, tout d'abord, qu'il n'y a pas de formation véritable et efficace si chacun n'assume pas et ne développe pas par lui-même la responsabilité de sa formation: toute formation, en effet, est essentiellement «auto-formation».

La conviction, ensuite, que chacun de nous est à la fois le terme et le principe de la formation: mieux nous nous formons, plus nous nous rendons capables de former les autres.

D'une importance singulière est la conscience que l'oeuvre de formation, qui, assurément, ne peut jamais se passer de recourir avec intelligence aux moyens et aux méthodes des sciences humaines, n'est cependant efficace que dans la mesure de la disponibilité à l'action de Dieu: seul le sarment qui ne craint pas de se laisser émonder par le vigneron porte davantage de fruit pour lui-même et pour les autres.

Appel et prière

64. En conclusion de ce document post-synodal, je me fais l'écho, une fois de plus, de l'invitation du «maître du domaine» dont parle l'Evangile: Allez, vous aussi, à ma vigne. On peut dire que le sens du Synode sur la vocation et la mission des laïcs réside justement en cet appel du Seigneur adressé à tous, et en particulier aux fidèles laïcs, hommes et femmes.

Les travaux du Synode ont constitué pour tous les participants une grande expérience spirituelle: celle d'une Eglise attentive, dans la lumière et la force de l'Esprit Saint, à discerner et à accueillir l'appel répété du Seigneur, en vue de proposer à nouveau au monde d'aujourd'hui le mystère de sa communion et le dynamisme de sa mission de salut, et cela en saisissant bien la place et le rôle spécifiques des fidèles laïcs. Le fruit du Synode, que cette Exhortation entend faire abonder le plus possible dans toutes les Eglises répandues dans le monde, naîtra de l'accueil effectif que l'appel recevra de la part de tout le Peuple de Dieu et, en lui, de la part des fidèles laïcs.

C'est pourquoi j'adresse, à tous et à chacun, une vive exhortation à ne jamais se lasser de maintenir éveillée, dans le coeur et dans la vie, la conscience ecclésiale, c'est-à-dire la conscience d'être membre de l'Eglise de Jésus-Christ et de participer à son mystère de communion et à son énergie apostolique et missionnaire.

Il est souverainement important que tous les chrétiens aient conscience de l'extraordinaire dignité qui leur a été donnée par le Baptême: par grâce, nous sommes appelés à être des enfants aimés du Père, membres incorporés à Jésus-Christ et à son Eglise, temples vivants et saints de l'Esprit. Ecoutons encore une fois, avec émotion et reconnaissance, les paroles de Jean l'Evangéliste: «Voyez comme il est grand, l'amour dont le Père nous a comblés: Il a voulu que nous soyons appelés enfants de Dieu, et nous le sommes!» (1 Jn 3, 1).

Cette «nouveauté chrétienne» donnée aux membres de l'Eglise, qui constitue pour tous la base de la participation à la fonction sacerdotale, prophétique et royale du Christ, et aussi de la vocation à la sainteté dans l'amour, s'exprime et se réalise dans les fidèles laïcs selon le «caractère séculier» qui leur est «propre et particulier».

La conscience ecclésiale comporte, avec le sens de la dignité chrétienne de tous, celui d'appartenir au mystère de l'Eglise-Communion: c'est là un aspect fondamental et décisif pour la vie et pour la mission de l'Eglise. Pour tous et pour chacun, la prière ardente de Jésus à la dernière Cène: «Qu'ils soient un!», doit devenir chaque jour un programme exigeant et inéluctable de vie et d'action.

Le sens vivant de la communion ecclésiale, don de l'Esprit qui sollicite notre réponse libre, aura comme fruit précieux la mise en valeur harmonieuse, dans l'Eglise «une et catholique», de la riche variété des vocations et des conditions de vie, des charismes, des ministères, des tâches et des responsabilités, comme aussi une collaboration plus convaincue et plus résolue des groupes, des associations et des mouvements de fidèles laïcs dans l'accomplissement solidaire de la commune mission de salut de l'Eglise ellemême. Cette communion est déjà en elle-même le premier grand signe de la présence du Christ Sauveur dans le monde; en même temps, elle favorise et elle stimule l'action apostolique directe et missionnaire de l'Eglise.

Au seuil du troisième millénaire, l'Eglise tout entière, pasteurs et fidèles, doit sentir plus fortement la responsabilité qu'elle a d'obéir au commandement du Christ: «Allez dans le monde entier et prêchez l'Evangile à toutes les créatures» (Mc 16, 15), et de prendre un nouvel élan missionnaire. A l'Eglise est confiée une entreprise de grande envergure, exigeante et magnifique: celle d'une nouvelle évangélísation, dont le monde d'aujourd'hui a un immense besoin. Les fidèles laïcs doivent se sentir partie prenante dans cette entreprise, appelés qu'ils sont à annoncer et à vivre l'Evangile, en servant la personne humaine et la société dans tout ce que l'une et l'autre présentent de valeurs et d'exigences.

Le Synode des Evêques, qui s'est déroulé au mois d'octobre de l'Année Mariale, a confié ses travaux, d'une façon toute particulière, à l'intercession de la Vierge Marie, Mère du Rédempteur. C'est à la même intercession que je confie maintenant le succès spirituel des fruits du Synode. Au terme de ce document post-synodal, je m'adresse à la Vierge, en union avec les Pères et les fidèles laïcs présents au Synode, et avec tous les autres membres du Peuple de Dieu. Mon appel se fait prière.

O Vierge très sainte,
Mère du Christ et Mère de l'Eglise,
avec joie et admiration,
nous nous unissons à ton Magnificat,
à ton chant d'amour reconnaissant.

Avec Toi, nous rendons grâce à Dieu,
dont «l'amour s'étend d'âge en âge»,
pour la splendide vocation
et pour la mission multiforme
des fidèles laïcs,
appelés par Dieu, chacun personnellement,
à vivre en communion d'amour
et de sainteté avec Lui
et à être unis fraternellement
dans la grande famille des enfants de Dieu,
envoyés aussi pour rayonner
la lumière du Christ
et communiquer le feu de l'Esprit
par leur vie évangélique
dans tous les secteurs
de la vie du monde.

Vierge du Magnificat,
remplis leurs coeurs
de reconnaissance et d'enthousiasme
pour cette vocation et cette mission.

Toi qui as été,
avec humilité et magnanimité,
«la servante du Seigneur»,
donne-nous la totale disponibilité
qui fut la tienne pour le service de Dieu
et le salut du monde.
Ouvre nos coeurs
aux immenses perspectives
du Règne de Dieu
et de l'annonce de l'Evangile
à toutes les créatures.

Ton coeur de Mère
se préoccupe sans cesse
des nombreux dangers,
des maux innombrables
qui écrasent les hommes et les femmes
de notre temps.
Mais il est attentif aussi
aux nombreuses initiatives
prises en vue du bien,
aux grandes aspirations vers les valeurs,
aux progrès accomplis
qui produisent des fruits abondants de salut.

Vierge courageuse,
inspire-nous la force d'âme
et la confiance en Dieu,
qui nous permettront de surmonter
tous les obstacles que nous rencontrons
dans l'accomplissement de notre mission.
Enseigne-nous à traiter les réalités du monde
avec un sens très vif
de responsabilité chrétienne
et dans la joyeuse espérance
de la venue du Règne de Dieu,
de nouveaux cieux et d'une terre nouvelle.

Toi qui, avec les Apôtres en prière,
te trouvais au Cénacle
dans l'attente de la venue
de l'Esprit de Pentecôte,
demande qu'Il se répande de nouveau
sur tous les fidèles laïcs, hommes et femmes,
pour qu'ils répondent pleinement
à leur vocation et à leur mission,
comme sarments de la vraie vigne,
appelés à porter beaucoup de fruit
pour la vie du monde.

Vierge Mère,
guide-nous et soutiens-nous
pour que nous vivions toujours
comme de véritables fils et filles
de l'Eglise de ton Fils,
et que nous puissions contribuer
à établir sur la terre
la civilisation de la vérité et de l'amour,
selon le désir de Dieu
et pour sa gloire.

Amen.

Donné à Rome, près de Saint-Pierre, le 30 Décembre, fête de la Sainte Famille de Jésus, Marie et Joseph, de l'an 1988, onzième de mon Pontificat.


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Apostolat des Laïcs - Vocation et Mission des Laïcs dans l'Eglise et dans le Monde Empty Re: Apostolat des Laïcs - Vocation et Mission des Laïcs dans l'Eglise et dans le Monde

Message par Her Dim 3 Avr - 21:37

PAUL, ÉVÊQUE,
SERVITEUR DES SERVITEURS DE DIEU,
AVEC LES PÈRES DU SAINT CONCILE,
POUR QUE LE SOUVENIR S'EN MAINTIENNE À JAMAIS

DÉCRET SUR L'APOSTOLAT DES LAÏCS
APOSTOLICAM ACTUOSITATEM


Donné à Rome, à Saint-Pierre, le 18 novembre 1965.


PRÉAMBULE

1.

Le saint Concile, dans sa volonté de rendre plus intense l’activité apostolique du Peuple de Dieu [1], se tourne avec une grande attention vers les chrétiens laïcs, dont il a déjà rappelé en d’autres documents le rôle propre et absolument nécessaire dans la mission de l’Église [2]. L’apostolat des laïcs, en effet, ne peut jamais manquer à l’Église, car il est une conséquence de leur vocation chrétienne. L’Écriture elle-même montre parfaitement (cf. Ac 11, 19-21 ; 18, 26 ; Rm 16, 1-16 ; Ph 4, 3) combien cette activité se manifesta spontanément aux premiers jours de l’Église et combien elle fut féconde.

Notre temps n’exige pas un moindre zèle de la part des laïcs ; les circonstances actuelles réclament d’eux au contraire un apostolat toujours plus intense et plus étendu. En effet l’augmentation constante de la population, le progrès des sciences et des techniques, la solidarité plus étroite entre les hommes ont non seulement élargi à l’infini le champ de l’apostolat des laïcs, en grande partie ouvert à eux seuls, mais ils ont fait surgir de nouveaux problèmes, qui réclament de leur part une vigilance et une recherche toutes particulières. Cet apostolat devient d’autant plus urgent que s’est affirmée, comme c’est normal, l’autonomie de nombreux secteurs de la vie humaine, entraînant parfois un certain délaissement de l’ordre moral et religieux, au grand péril de la vie chrétienne. Il faut ajouter qu’en de nombreuses régions les prêtres sont très peu nombreux ou parfois privés de la liberté indispensable à leur ministère, de sorte que, sans le travail des laïcs, l’Église et son action ne pourraient que difficilement être présentes.

Le signe de cette urgente nécessité aux multiples aspects est l’action manifeste du Saint-Esprit qui rend aujourd’hui les laïcs de plus en plus conscients de leur propre responsabilité et les invite partout à servir le Christ et l’Église [3]. Dans ce décret le Concile se propose d’éclairer la nature de l’apostolat des laïcs, son caractère et sa variété, d’en énoncer les principes fondamentaux et de donner des directives pastorales pour qu’il s’exerce plus efficacement. La révision du droit canon concernant l’apostolat des laïcs devra prendre pour règle tout ce qui est contenu dans ce décret.



CHAPITRE PREMIER :
Vocation des laïcs à l’apostolat

2. Participation des laïcs à la mission de l’Église

L’Église est faite pour étendre le règne du Christ à toute la terre, pour la gloire de Dieu le Père ; elle fait ainsi participer tous les hommes à la rédemption et au salut [4]; par eux elle ordonne en vérité le monde entier au Christ. On appelle apostolat toute activité du Corps mystique qui tend vers ce but : l’Église l’exerce par tous ses membres, toutefois de diverses manières. En effet, la vocation chrétienne est aussi par nature vocation à l’apostolat. Dans l’organisme d’un corps vivant aucun membre ne se comporte de manière purement passive, mais participe à la vie et à l’activité générale du corps. Ainsi dans le Corps du Christ qui est l’Église, « tout le corps opère sa croissance selon le rôle de chaque partie » (Ep 4, 16). Bien plus, les membres de ce corps sont tellement unis et solidaires (cf. Ep 4, 16) qu’un membre qui ne travaille pas selon ses possibilités à la croissance du corps doit être réputé inutile à l’Église et à lui-même.

Il y a dans l’Église diversité de ministères, mais unité de mission. Le Christ a confié aux apôtres et à leurs successeurs la charge d’enseigner, de sanctifier et de gouverner en son nom et par son pouvoir. Mais les laïcs rendus participants de la charge sacerdotale, prophétique et royale du Christ assument, dans l’Église et dans le monde, leur part dans ce qui est la mission du Peuple de Dieu tout entier [5]. Ils exercent concrètement leur apostolat en se dépensant à l’évangélisation et à la sanctification des hommes ; il en est de même quand ils s’efforcent de pénétrer l’ordre temporel d’esprit évangélique et travaillent à son progrès de telle manière que, en ce domaine, leur action rende clairement témoignage au Christ et serve au salut des hommes. Le propre de l’état des laïcs étant de mener leur vie au milieu du monde et des affaires profanes ; ils sont appelés par Dieu à exercer leur apostolat dans le monde à la manière d’un ferment, grâce à la vigueur de leur esprit chrétien.

3. Fondements de l’apostolat des laïcs

Les laïcs tiennent de leur union même avec le Christ Chef le devoir et le droit d’être apôtres. Insérés qu’ils sont par le baptême dans le Corps mystique du Christ, fortifiés grâce à la confirmation par la puissance du Saint-Esprit, c’est le Seigneur lui-même qui les députe à l’apostolat. S’ils sont consacrés sacerdoce royal et nation sainte (cf. 1 P 2, 4-10), c’est pour faire de toutes leurs actions des offrandes spirituelles, et pour rendre témoignage au Christ sur toute la terre. Les sacrements et surtout la sainte Eucharistie leur communiquent et nourrissent en eux cette charité qui est comme l’âme de tout apostolat [6].

L’apostolat se vit dans la foi, l’espérance et la charité que le Saint-Esprit répand dans les cœurs de tous les membres de l’Église. Bien plus, le précepte de la charité, qui est le plus grand commandement du Seigneur, presse tous les chrétiens de travailler à la gloire de Dieu par la venue de son règne et à la communication de la vie éternelle à tous les hommes : « Qu’ils connaissent le seul vrai Dieu et celui qu’il a envoyé, Jésus Christ » (cf. Jn 17, 3).

À tous les chrétiens donc incombe la très belle tâche de travailler sans cesse pour faire connaître et accepter le message divin du salut par tous les hommes sur toute la terre. Pour l’exercice de cet apostolat, le Saint-Esprit qui sanctifie le Peuple de Dieu par les sacrements et le ministère accorde en outre aux fidèles des dons particuliers (cf. 1 Co 12, 7), les « répartissant à chacun comme il l’entend » (cf. 1 Co 12, 11) pour que tous et « chacun selon la grâce reçue se mettant au service des autres » soient eux-mêmes « comme de bons intendants de la grâce multiforme de Dieu » (1 P 4, 10), en vue de l’édification du Corps tout entier dans la charité (cf. Ep 4, 16). De la réception de ces charismes, même les plus simples, résulte pour chacun des croyants le droit et le devoir d’exercer ces dons dans l’Église et dans le monde, pour le bien des hommes et l’édification de l’Église, dans la liberté du Saint-Esprit qui « souffle où il veut » (Jn 3, Cool, de même qu’en communion avec ses frères dans le Christ et très particulièrement avec ses pasteurs. C’est à eux qu’il appartient de porter un jugement sur l’authenticité et le bon usage de ces dons, non pas pour éteindre l’Esprit, mais pour éprouver tout et retenir ce qui est bon (cf. 1 Th 5, 12.19.21) [7].

4. De la spiritualité des laïcs dans l’ordre de l’apostolat

Le Christ envoyé par le Père étant la source et l’origine de tout l’apostolat de l’Église, il est évident que la fécondité de l’apostolat des laïcs dépend de leur union vitale avec le Christ, selon cette parole du Seigneur : « Celui qui demeure en moi et moi en lui, celui-là porte beaucoup de fruits. Car sans moi vous ne pouvez rien faire » (Jn 15, 5). Cette vie d’intime union avec le Christ dans l’Église est alimentée par des nourritures spirituelles communes à tous les fidèles, en particulier par la participation active à la sainte liturgie [8]. Les laïcs doivent les employer de telle sorte que, remplissant parfaitement les obligations du monde dans les conditions ordinaires de l’existence, ils ne séparent pas l’union du Christ et leur vie, mais grandissent dans cette union en accomplissant leurs travaux selon la volonté de Dieu. De cette manière les laïcs progresseront en sainteté avec ardeur et joie, s’efforçant de surmonter les difficultés inévitables avec prudence et patience [9]. Ni le soin de leur famille ni les affaires temporelles ne doivent être étrangers à leur spiritualité, selon ce mot de l’Apôtre : « Tout ce que vous faites, en paroles ou en œuvres, faites-le au nom du Seigneur Jésus Christ, rendant grâces par lui à Dieu le Père » (Col 3, 17).

Une telle vie exige un continuel exercice de la foi, de l’espérance et de la charité.

Seules la lumière de la foi et la méditation de la Parole de Dieu peuvent permettre toujours et partout de reconnaître Dieu « en qui nous avons la vie, le mouvement et l’être » (Ac 17, 28) ; c’est ainsi seulement qu’on pourra chercher en tout sa volonté, discerner le Christ dans tous les hommes, proches ou étrangers, juger sainement du vrai sens et de la valeur des réalités temporelles, en elles-mêmes et par rapport à la fin de l’homme.

Ceux qui ont cette foi vivent dans l’espérance de la révélation des fils de Dieu se souvenant de la croix et de la résurrection du Seigneur.

Dans le pèlerinage qu’est cette vie, cachés en Dieu avec le Christ, délivrés de la servitude des richesses, à la recherche des biens qui demeurent éternellement, ils mettent généreusement en œuvre toutes leurs forces pour étendre le règne de Dieu, animer et parfaire les réalités temporelles selon l’esprit chrétien. Dans les difficultés de l’existence, ils puisent le courage dans l’espérance, estimant que « les souffrances de cette vie ne sont proportionnées à la gloire future qui doit se révéler en nous » (Rm 8, 18).

Poussés par la charité qui vient de Dieu, ils pratiquent le bien à l’égard de tous, surtout de leurs frères dans la foi (cf. Ga 6, 10), rejetant « toute malice, toute fraude, hypocrisie, envie, toute médisance » (1 P 2, 1), entraînant ainsi les hommes vers le Christ. Or, la charité divine, qui « est répandue dans les cœurs par l’Esprit Saint qui nous a été donné » (Rm 5, 5), rend les laïcs capables d’exprimer concrètement dans leur vie l’esprit des Béatitudes. Suivant Jésus pauvre, ils ne connaissent ni dépression dans la privation, ni orgueil dans l’abondance ; imitant le Christ humble, ils ne deviennent pas avides d’une vaine gloire (cf. Ga 5, 26), mais ils s’efforcent de plaire à Dieu plutôt qu’aux hommes, toujours prêts à tout abandonner pour le Christ (cf. Lc 14, 26) et à souffrir persécution pour la justice (cf. Mt 5, 10) se souvenant de la parole du Seigneur : « Si quelqu’un veut venir à ma suite, qu’il se renie lui-même, qu’il se charge de sa croix et qu’il me suive » (Mt 16, 24). Entretenant entre eux une amitié chrétienne, ils se prêtent un mutuel appui en toutes nécessités.

Cette spiritualité des laïcs doit revêtir des caractéristiques particulières suivant les conditions de vie de chacun : vie conjugale et familiale, célibat et veuvage, état de maladie, activité professionnelle et sociale. Chacun doit donc développer sans cesse les qualités et les dons reçus et en particulier ceux qui sont adaptés à ses conditions de vie et se servir des dons personnels de l’Esprit Saint.

Enfin les laïcs qui selon leur vocation particulière se sont agrégés à des associations ou instituts approuvés par l’Église doivent s’efforcer de toujours mieux réaliser les caractères de la spiritualité qui leur est propre.

Qu’ils estiment beaucoup la compétence professionnelle, le sens familial et civique, et les vertus qui regardent la vie sociale telles que la probité, l’esprit de justice, la sincérité, la délicatesse, la force d’âme : sans elles il n’y a pas de vraie vie chrétienne.

La Bienheureuse Vierge Marie, Reine des Apôtres, est l’exemple parfait de cette vie spirituelle et apostolique. Tandis qu’elle menait sur terre une vie semblable à celle de tous, remplie par les soins et les labeurs familiaux, Marie demeurait toujours intimement unie à son Fils et coopérait à l’œuvre du Sauveur à un titre absolument unique. Aujourd’hui où elle est au ciel, « son amour maternel la rend attentive aux frères de son Fils dont le pèlerinage n’est pas achevé, et qui se trouvent engagés dans les peines et les épreuves jusqu’à ce qu’ils parviennent à la patrie bienheureuse [10] ». Tous doivent avoir envers elle une vraie dévotion et confier leur vie et leur apostolat à sa sollicitude maternelle.



CHAPITRE II :
Les buts à atteindre

5. Introduction

L’œuvre de rédemption du Christ, qui concerne essentiellement le salut des hommes, embrasse aussi le renouvellement de tout l’ordre temporel. La mission de l’Église, par conséquent, n’est pas seulement d’apporter aux hommes le message du Christ et sa grâce, mais aussi de pénétrer et de parfaire par l’esprit évangélique l’ordre temporel. Les fidèles laïcs accomplissant cette mission de l’Église, exercent donc leur apostolat aussi bien dans l’Église que dans le monde, dans l’ordre spirituel que dans l’ordre temporel. Bien que ces ordres soient distincts, ils sont liés dans l’unique dessein divin ; aussi Dieu lui-même veut-il, dans le Christ, réassumer le monde tout entier, pour en faire une nouvelle créature en commençant dès cette terre et en lui donnant sa plénitude au dernier jour. Le laïc, qui est tout ensemble membre du Peuple de Dieu et de la cité des hommes n’a qu’une conscience chrétienne. Celle-ci doit le guider sans cesse dans les deux domaines.

6. L’apostolat destiné à évangéliser et sanctifier les hommes

La mission de l’Église concerne le salut des hommes, qui s’obtient par la foi au Christ et par sa grâce. Par son apostolat l’Église et tous ses membres doivent donc d’abord annoncer au monde le message du Christ par leurs paroles et leurs actes et lui communiquer sa grâce. Cela s’accomplit principalement par le ministère de la parole et des sacrements. Confié spécialement au clergé, il comporte pour des laïcs un rôle propre de grande importance, qui fait d’eux les « coopérateurs de la vérité » (3 Jn Cool. Dans ce domaine surtout l’apostolat des laïcs et le ministère pastoral se complètent mutuellement.

Les laïcs ont d’innombrables occasions d’exercer l’apostolat d’évangélisation et de sanctification. Le témoignage même de la vie chrétienne et les œuvres accomplies dans un esprit surnaturel sont puissants pour attirer les hommes à la foi et à Dieu ; le Seigneur dit en effet : « Que votre lumière brille devant les hommes pour qu’ils voient vos œuvres bonnes et glorifient votre Père qui est aux cieux » (Mt 5, 16). Cet apostolat cependant ne consiste pas dans le seul témoignage de la vie ; le véritable apôtre cherche les occasions d’annoncer le Christ par la parole, soit aux incroyants pour les aider à cheminer vers la foi, soit aux fidèles pour les instruire, les fortifier, les inciter à une vie plus fervente, « car la charité du Christ nous presse » (2 Co 5, 14). C’est dans les cœurs de tous que doivent résonner ces paroles de l’Apôtre : « Malheur à moi si je n’évangélise pas » (1 Co 9, 16) [11].

À une époque où se posent des questions nouvelles et où se répandent de très graves erreurs tendant à ruiner radicalement la religion, l’ordre moral et la société humaine elle-même, le Concile exhorte instamment les laïcs, chacun suivant ses talents et sa formation doctrinale, à prendre une part plus active selon l’esprit de l’Église, dans l’approfondissement et la défense des principes chrétiens comme dans leur application adaptée aux problèmes de notre temps.

7. Le renouvellement chrétien de l’ordre temporel

Tel est le dessein de Dieu sur le monde : que les hommes, d’un commun accord, construisent l’ordre des réalités temporelles et le rendent sans cesse plus parfait. Tout ce qui compose l’ordre temporel : les biens de la vie et de la famille, la culture, les réalités économiques, les métiers et les professions, les institutions de la communauté politique, les relations internationales et les autres réalités du même genre, leur évolution et leur progrès, n’ont pas seulement valeur de moyen par rapport à la fin dernière de l’homme. Ils possèdent une valeur propre, mise en eux par Dieu lui-même, soit qu’on regarde chacun d’entre eux, soit qu’on les considère comme parties de l’ensemble de l’univers temporel : « Et Dieu vit tout ce qu’il avait fait et c’était très bon » (Gn 1, 31). Cette bonté naturelle qui est leur reçoit une dignité particulière en raison de leur relation avec la personne humaine au service de laquelle ils ont été créés. Enfin il a plu à Dieu de rassembler toutes les réalités, aussi bien naturelles que surnaturelles, en un seul tout dans le Christ « pour que celui-ci ait la primauté en tout » (Col 1, 18). Cette destination, loin de priver l’ordre naturel de son autonomie, de ses fins, de ses lois propres, de ses moyens, de son importance pour le bien des hommes, rend au contraire plus parfaites sa force et sa valeur propre ; elle le hausse en même temps au niveau de la vocation intégrale de l’homme ici-bas.

Au cours de l’histoire, l’usage des choses temporelles a été souillé par de graves aberrations. Atteints par la faute originelle, les hommes sont tombés souvent en de nombreuses erreurs sur le vrai Dieu, la nature humaine et les principes de la loi morale : alors les mœurs et les institutions humaines s’en sont trouvées corrompues, la personne humaine elle-même bien souvent méprisée. De nos jours encore, certains, se fiant plus que de raison aux progrès de la science et de la technique, sont enclins à une sorte d’idolâtrie des choses temporelles : ils en deviennent les esclaves plutôt que les maîtres.

C’est le travail de toute l’Église de rendre les hommes capables de bien construire l’ordre temporel et de l’orienter vers Dieu par le Christ. Il revient aux pasteurs d’énoncer clairement les principes concernant la fin de la création et l’usage du monde et d’apporter une aide morale et spirituelle pour que les réalités temporelles soient renouvelées dans le Christ.

Les laïcs doivent assumer comme leur tâche propre le renouvellement de l’ordre temporel. Éclairés par la lumière de l’Évangile, conduits par l’esprit de l’Église, entraînés par la charité chrétienne, ils doivent en ce domaine agir par eux-mêmes d’une manière bien déterminée. Membres de la cité, ils ont à coopérer avec les autres citoyens suivant leur compétence particulière en assumant leur propre responsabilité et à chercher partout et en tout la justice du Royaume de Dieu. L’ordre temporel est à renouveler de telle manière que, dans le respect de ses lois propres et en conformité avec elles, il devienne plus conforme aux principes supérieurs de la vie chrétienne et soit adapté aux conditions diverses des lieux, des temps et des peuples. Parmi les tâches de cet apostolat l’action sociale chrétienne a un rôle éminent à jouer. Le Concile désire le voir s’étendre aujourd’hui à tout le secteur temporel sans oublier le plan culturel [12].

8. L’action caritative, sceau de l’apostolat chrétien

Tout apostolat trouve dans la charité son origine et sa force, mais certaines œuvres sont par nature aptes à devenir une expression particulièrement parlante de cette charité : le Christ a voulu qu’elles soient le signe de sa mission messianique (cf. Mt 11, 4-5).

Le plus grand commandement de la loi est d’aimer Dieu de tout son cœur et le prochain comme soi-même (cf. Mt 22, 37-40). De cette loi de l’amour du prochain, le Christ a fait son commandement personnel. Il l’a enrichi d’un sens nouveau quand il voulut, s’identifiant à ses frères, être l’objet de cette charité disant : « Dans la mesure où vous l’avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait » (Mt 25, 40). En assumant la nature humaine c’est toute l’humanité qu’il s’est unie par une solidarité surnaturelle qui en fait une seule famille ; il a fait de la charité le signe de ses disciples, par ces paroles : « À ceci tous vous reconnaîtront pour mes disciples : à cet amour que vous aurez les uns pour les autres » (Jn 13, 35).

En ses débuts, la sainte Église en joignant « l’agapè » à la Cène eucharistique la manifestait tout entière réunie autour du Christ par le lien de la charité, ainsi en tout temps elle se fait reconnaître à ce signe d’amour ; tout en se réjouissant des initiatives d’autrui, elle tient aux œuvres charitables comme à une partie de sa mission propre et comme à un droit inaliénable. C’est pourquoi la miséricorde envers les pauvres et les faibles, les œuvres dites de charité et de secours mutuel pour le soulagement de toutes les souffrances humaines sont particulièrement en honneur dans l’Église [13].

Aujourd’hui ces activités et ces œuvres de charité sont beaucoup plus pressantes et doivent davantage prendre les dimensions de l’univers, car les moyens de communication sont plus aisés et plus rapides, la distance entre les hommes est pour ainsi dire vaincue, les habitants du monde entier deviennent comme les membres d’une seule famille. L’action de la charité peut et doit atteindre aujourd’hui tous les hommes et toutes les détresses. Partout où se trouvent ceux qui souffrent du manque de nourriture et de boisson, de vêtements, de logement, de remèdes, de travail, d’instruction, des moyens de mener une vie vraiment humaine, ceux qui sont tourmentés par les épreuves ou la maladie, ceux qui subissent l’exil ou la prison, la charité chrétienne doit les chercher et les découvrir, les réconforter avec un soin empressé, et les soulager par une aide adaptée. Cette obligation s’impose en tout premier lieu aux hommes et aux peuples qui sont les mieux pourvus [14].

Pour que cet exercice de la charité soit toujours au-dessus de toute critique et apparaisse comme tel, il faut voir dans le prochain l’image de Dieu selon laquelle il a été créé et le Christ notre Seigneur à qui est offert en réalité tout ce qui est donné au pauvre. La liberté et la dignité de la personne secourue doivent être respectées avec la plus grande délicatesse. La pureté d’intention ne doit être entachée d’aucune recherche d’intérêt propre ni d’aucun désir de domination [15]. Il faut satisfaire d’abord aux exigences de la justice de peur que l’on n’offre comme don de la charité ce qui est déjà dû en justice. Que disparaissent la cause des maux et pas seulement leurs effets et que l’aide apportée s’organise de telle sorte que les bénéficiaires se libèrent peu à peu de leur dépendance à l’égard d’autrui et deviennent capables de se suffire.

Les laïcs doivent donc estimer profondément et aider, selon leur pouvoir, les œuvres de charité et les initiatives concernant l’assistance sociale, qu’elles soient privées ou publiques, sans oublier les initiatives internationales ; par elles on apporte un secours efficace aux personnes et aux peuples qui souffrent. Qu’en cela ils collaborent avec tous les hommes de bonne volonté [16].



CHAPITRE III :
Les divers champs d’apostolat

9. Introduction

Les laïcs exercent leur apostolat multiforme tant dans l’Église que dans le monde. Dans l’un et l’autre cas leur sont ouverts divers champs d’action apostolique. Nous nous proposons de rappeler ici les principaux d’entre eux : les communautés ecclésiales, la famille, les jeunes, les milieux sociaux, les secteurs nationaux et internationaux. Comme de nos jours les femmes ont une part de plus en plus active dans toute la vie de la société, il est très important que grandisse aussi leur participation dans les divers secteurs de l’apostolat de l’Église.

10. Les communautés ecclésiales

Participant à la fonction du Christ Prêtre, Prophète et Roi, les laïcs ont leur part active dans la vie et l’action de l’Église. Dans les communautés ecclésiales, leur action est si nécessaire que sans elle l’apostolat des pasteurs ne peut, la plupart du temps, obtenir son plein effet. À l’image des hommes et des femmes qui aidaient Paul dans l’annonce de l’Évangile (cf. Ac 18, 18-26 ; Rm 16, 3), les laïcs qui ont vraiment l’esprit apostolique viennent, en effet, en aide à leurs frères, et réconfortent aussi bien les pasteurs que les autres membres du peuple fidèle (cf. 1 Co 16, 17-18). Nourris par leur participation active à la vie liturgique de leur communauté, ils s’emploient avec zèle à ses œuvres apostoliques ; ils acheminent vers l’Église des hommes qui en étaient peut-être fort éloignés ; ils collaborent avec ardeur à la diffusion de la Parole de Dieu, particulièrement par les catéchismes ; en apportant leur compétence ils rendent plus efficace le ministère auprès des âmes de même que l’administration des biens de l’Église.

La paroisse offre un exemple remarquable d’apostolat communautaire, car elle rassemble dans l’unité tout ce qui se trouve en elle de diversités humaines et elle les insère dans l’universalité de l’Église [17]. Que les laïcs prennent l’habitude de travailler dans la paroisse en étroite union avec leurs prêtres [18], d’apporter à la communauté de l’Église leurs propres problèmes, ceux du monde et les questions touchant le salut des hommes pour les examiner et les résoudre en tenant compte de l’avis de tous. Selon leurs possibilités, ils apporteront leur concours à toute entreprise apostolique et missionnaire de leur famille ecclésiale.

Les laïcs développeront sans cesse le sens du diocèse, dont la paroisse est comme une cellule ; ils seront toujours prompts à l’invitation de leur pasteur à participer aux initiatives du diocèse. De plus, pour répondre aux nécessités des villes et des régions rurales [19], ils ne borneront pas leur coopération aux limites de la paroisse ou du diocèse, mais ils s’efforceront de l’élargir au plan interparoissial, interdiocésain, national et international : d’autant plus que l’accroissement constant des migrations de population, la multiplication des liens mutuels, la facilité des communications ne permettent plus à une partie de la société de demeurer repliée sur elle-même. Les laïcs se préoccupent donc des exigences du Peuple de Dieu répandu sur toute la terre. Ils feront leurs en particulier les œuvres missionnaires en leur apportant une aide matérielle, voire même en concours personnel : c’est pour les chrétiens un devoir et un honneur que de restituer à Dieu une partie des biens qu’ils reçoivent de lui.

11. La famille

Le Créateur a fait de la communauté conjugale l’origine et le fondement de la société humaine. Par sa grâce, il en a fait aussi un mystère d’une grande portée dans le Christ et dans l’Église (cf. Ep 5, 32). Aussi l’apostolat des époux et des familles a-t-il une singulière importance pour l’Église comme pour la société civile.

Les époux chrétiens sont l’un pour l’autre, pour leurs enfants et les autres membres de leur famille, les coopérateurs de la grâce et les témoins de la foi. Ils sont les premiers à transmettre la foi à leurs enfants et à en être auprès d’eux les éducateurs. Ils les forment par la parole et l’exemple à une vie chrétienne et apostolique ; ils les aident avec sagesse dans le choix de leur vocation et favorisent de leur mieux une vocation sacrée s’ils la découvrent en eux.

Ce fut toujours le devoir des époux, mais c’est aujourd’hui l’aspect le plus important de leur apostolat, de manifester et de prouver par toute leur vie l’indissolubilité et la sainteté du lien matrimonial ; d’affirmer avec vigueur le droit et le devoir assignés aux parents et aux tuteurs d’élever chrétiennement leurs enfants ; de défendre la dignité et l’autonomie de la famille. Ils doivent donc collaborer, eux et tous les fidèles, avec les hommes de bonne volonté, pour que ces droits soient parfaitement sauvegardés dans la législation civile ; pour qu’il soit tenu compte, dans le gouvernement du pays, des exigences des familles concernant l’habitation, l’éducation des enfants, les conditions de travail, la sécurité sociale et les impôts et que dans les migrations la vie commune de la famille soit parfaitement respectée [20].

Cette mission d’être la cellule première et vitale de la société, la famille elle-même l’a reçue de Dieu. Elle la remplira si par la piété de ses membres et la prière faite à Dieu en commun elle se présente comme un sanctuaire de l’Église à la maison ; si toute la famille s’insère dans le culte liturgique de l’Église ; si enfin elle pratique une hospitalité active et devient promotrice de la justice et de bons services à l’égard de tous les frères qui sont dans le besoin. Parmi les diverses œuvres d’apostolat familial, citons en particulier : adopter des enfants abandonnés, accueillir aimablement les étrangers, aider à la bonne marche des écoles, conseiller et aider les adolescents, aider les fiancés à se mieux préparer au mariage, donner son concours au catéchisme, soutenir époux et familles dans leurs difficultés matérielles ou morales, procurer aux vieillards non seulement l’indispensable mais les justes fruits du progrès économique. Toujours et partout mais spécialement dans les régions où commencent à se répandre les premières semences de l’Évangile, dans celles où l’Église en est à ses débuts, dans celles aussi où elle se heurte à de graves obstacles, les familles rendent au Christ un très précieux témoignage face au monde en s’attachant par toute leur vie à l’Église et en présentant l’exemple d’un foyer chrétien [21].

Afin d’atteindre plus facilement les buts de leur apostolat il peut être opportun pour les familles de se constituer en associations [22].

12. Les jeunes

Les jeunes représentent dans la société moderne une force de grande importance [23] . Les circonstances de leur vie, leurs habitudes d’esprit, les rapports avec leurs propres familles se sont complètement transformés. Ils accèdent souvent très rapidement à une nouvelle condition sociale et économique. Alors que grandit de jour en jour leur importance sociale et même politique, ils apparaissent assez peu préparés à porter convenablement le poids de ces charges nouvelles.

Cet accroissement de leur importance sociale exige d’eux une plus grande activité apostolique, et leur caractère naturel les y dispose. Lorsque mûrit la conscience de leur propre personnalité, poussés par leur ardeur naturelle et leur activité débordante, ils prennent leurs propres responsabilités et désirent être parties prenantes dans la vie sociale et culturelle ; si cet élan est pénétré de l’esprit du Christ, animé par le sens de l’obéissance et l’amour envers l’Église, on peut en espérer des fruits très riches. Les jeunes doivent devenir les premiers apôtres des jeunes, en contact direct avec eux, exerçant l’apostolat par eux-mêmes et entre eux, compte tenu du milieu social où ils vivent [24].

Les adultes auront soin d’engager avec les jeunes des dialogues amicaux qui permettent aux uns et aux autres, en dépassant la différence d’âge, de se connaître mutuellement et de se communiquer leurs propres richesses. C’est par l’exemple d’abord, et, à l’occasion, par un avis judicieux et une aide efficace que les adultes pourront stimuler les jeunes à l’apostolat. De leur côté les jeunes sauront garder le respect et la confiance à l’égard des adultes, et dans leur désir naturel de renouvellement ils sauront apprécier comme elles le méritent les traditions estimables. Les enfants ont également une activité apostolique qui leur est propre. À la mesure de leurs possibilités ils sont les témoins vivants du Christ au milieu de leurs camarades.

13. Le milieu social

L’apostolat dans le milieu social s’efforce de pénétrer d’esprit chrétien la mentalité et les mœurs, les lois et les structures de la communauté où chacun vit. Il est tellement le travail propre et la charge des laïcs que personne ne peut l’assumer comme il faut à leur place. Sur ce terrain, les laïcs peuvent mener l’apostolat du semblable envers le semblable. Là ils complètent le témoignage de la vie par celui de la parole [25]. C’est là qu’ils sont le plus aptes à aider leurs frères, dans leur milieu de travail, de profession, d’étude, d’habitation, de loisir, de collectivité locale.

Les laïcs accomplissent cette mission de l’Église dans le monde avant tout par cet accord de leur vie avec la foi qui fait d’eux la lumière du monde, et par cette honnêteté en toute activité capable d’éveiller en chaque homme l’amour du vrai et du bien, et de les inciter à aller un jour au Christ et à l’Église. Ils disposent insensiblement tous les cœurs à l’action de la grâce du salut par cette vie de charité fraternelle qui leur fait partager les conditions de vie et de travail, les souffrances et les aspirations de leurs frères. Enfin par cette pleine conscience de leur responsabilité propre dans la vie de la société, ils s’efforcent d’accomplir leurs devoirs familiaux, sociaux et professionnels avec une telle générosité chrétienne que leur manière d’agir pénètre peu à peu leur milieu de vie et de travail.

Cet apostolat s’adresse à tous les hommes, aussi nombreux qu’ils soient, et n’a le droit d’exclure aucun bien spirituel ou temporel qu’il est possible de leur procurer. Mais les apôtres authentiques ne se contentent pas de cette seule action, ils ont le souci d’annoncer aussi le Christ par la parole à ceux qui les entourent. Beaucoup d’hommes en effet ne peuvent recevoir l’Évangile et reconnaître le Christ que par les laïcs qu’ils côtoient.

14. Les secteurs national et international

Immense est le champ d’apostolat, sur le plan national et international, où les laïcs surtout sont les intendants de la sagesse chrétienne. Dans le dévouement envers la nation, dans le fidèle accomplissement de leurs devoirs civiques les catholiques se sentiront tenus de promouvoir le vrai bien commun ; c’est ainsi qu’ils pourront amener le pouvoir civil à tenir compte de leur opinion afin qu’il s’exerce dans la justice et que les lois soient conformes aux exigences morales et au bien commun. Que les catholiques compétents en matière politique, affermis comme il convient dans la foi et la doctrine chrétienne, ne refusent pas la gestion des affaires publiques, car ils peuvent par une bonne administration travailler au bien commun et en même temps préparer la route à l’Évangile.

Les catholiques s’attacheront à collaborer avec tous les hommes de bonne volonté pour promouvoir tout ce qui est vrai, juste, saint, digne d’être aimé (cf. Ph 4, Cool. Ils entreront en dialogue avec eux, allant à eux avec intelligence et délicatesse, et rechercheront comment améliorer les institutions sociales et publiques selon l’esprit de l’Évangile.

Parmi les signes de notre temps, il faut noter particulièrement ce sens toujours croissant et inéluctable de la solidarité de tous les peuples, que l’apostolat des laïcs doit développer et transformer en un désir sincère et effectif de fraternité. Enfin les laïcs doivent prendre conscience de l’existence du secteur international, des questions et des solutions doctrinales ou pratiques qui s’y font jour, en particulier en ce qui concerne les peuples qui font effort vers le progrès [26].

Tous ceux qui travaillent dans des nations étrangères, ou leur apportent leur aide, se rappelleront que les relations entre peuples doivent être un véritable échange fraternel dans lequel les deux parties donnent et reçoivent à la fois. Ceux qui voyagent à l’étranger, pour raison d’affaires ou de loisir, doivent se rappeler qu’ils sont également partout les messagers itinérants du Christ et qu’ils ont à se conduire comme tels.


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Apostolat des Laïcs - Vocation et Mission des Laïcs dans l'Eglise et dans le Monde Empty Re: Apostolat des Laïcs - Vocation et Mission des Laïcs dans l'Eglise et dans le Monde

Message par Her Dim 3 Avr - 21:38

PAUL, ÉVÊQUE,
SERVITEUR DES SERVITEURS DE DIEU,
AVEC LES PÈRES DU SAINT CONCILE,
POUR QUE LE SOUVENIR S'EN MAINTIENNE À JAMAIS

DÉCRET SUR L'APOSTOLAT DES LAÏCS
APOSTOLICAM ACTUOSITATEM

Donné à Rome, à Saint-Pierre, le 18 novembre 1965 (Suite et Fin).


CHAPITRE IV :
Les divers modes d’apostolat

15. Introduction

Les laïcs peuvent exercer leur action apostolique soit individuellement, soit groupés en diverses communautés ou associations.

16. Importance et multiplicité des formes de l’apostolat individuel

L’apostolat que chacun doit exercer personnellement et qui découle toujours d’une vie vraiment chrétienne (cf. Jn 4, 14) est le principe et la condition de tout apostolat des laïcs, même collectif, et rien ne peut le remplacer.

Cet apostolat individuel est toujours et partout fécond ; il est en certaines circonstances le seul adapté et le seul possible. Tous les laïcs y sont appelés et en ont le devoir, quelle que soit leur condition, même s’ils n’ont pas l’occasion ou la possibilité de collaborer dans des mouvements.

En ce domaine il existe pour les laïcs de multiples manières de participer à l’édification de l’Église, à la sanctification du monde et à son animation dans le Christ. La forme particulière de l’apostolat individuel des laïcs est le témoignage de toute une vie de laïcs, inspirée par la foi, l’espérance et la charité : elle est d’ailleurs un signe très adapté à notre temps et manifeste le Christ vivant en ses fidèles. Par l’apostolat de la parole, absolument nécessaire en certaines circonstances, les laïcs annoncent le Christ. Par là ils expliquent et répandent sa doctrine chacun selon sa condition, sa compétence et la professent avec fidélité.

En outre, parce qu’ils collaborent comme citoyens de ce monde à tout ce qui touche la construction et la gestion de l’ordre temporel, les laïcs doivent chercher à approfondir dans la vie familiale, professionnelle, culturelle et sociale, à la lumière de la foi leurs raisons d’agir et à l’occasion les révéler aux autres, conscients ainsi d’être les coopérateurs du Dieu créateur, rédempteur et sanctificateur, et de lui rendre gloire. Enfin les laïcs animeront leur vie par la charité et l’exprimeront concrètement à la mesure de leurs moyens.

Tous se souviendront que par le culte public et la prière personnelle, par la pénitence et la libre acceptation des travaux et des peines de la vie qui les conforme au Christ souffrant (cf. 2 Co 4, 10 ; Col 1, 24), ils peuvent atteindre tous les hommes et travailler au salut du monde entier.

17. L’apostolat individuel en certaines circonstances

Cet apostolat individuel est particulièrement nécessaire et urgent dans les régions où la liberté de l’Église est gravement compromise. Dans ces circonstances très difficiles, les laïcs remplaçant les prêtres dans la mesure où ils le peuvent, exposant leur propre liberté et parfois leur vie, enseignent la doctrine chrétienne à ceux qui les entourent, les forment à la vie religieuse et à l’esprit catholique, les incitent à la réception fréquente des sacrements et à la piété surtout envers l’Eucharistie [27]. Le Concile du fond du cœur rend grâces à Dieu qui, encore aujourd’hui, ne cesse de susciter des laïcs au courage héroïque au milieu des persécutions ; il les entoure de sa paternelle affection et leur exprime sa reconnaissance.

L’apostolat individuel trouve une grande place là où les catholiques sont peu nombreux et dispersés. Dans ces circonstances, les laïcs qui n’exercent qu’un apostolat personnel, soit pour les raisons mentionnées plus haut, soit pour des motifs particuliers venant parfois de leur activité professionnelle, peuvent se rassembler utilement par petits groupes, sans aucune forme rigide d’institution ou d’organisation pourvu que le signe de la communauté de l’Église apparaisse toujours aux autres comme un témoignage authentique d’amour.

Ainsi, s’aidant mutuellement au plan spirituel par leur amitié et l’échange de leurs expériences, ils se préparent à surmonter les inconvénients d’une vie et d’une action trop isolées, et à produire des fruits apostoliques plus abondants.

18. Importance de l’apostolat organisé

Les chrétiens sont donc appelés à exercer personnellement l’apostolat dans leurs diverses conditions de vie ; il ne faut cependant pas oublier que l’homme est social par nature et qu’il a plu à Dieu de rassembler ceux qui croient au Christ pour en faire le Peuple de Dieu (cf. 1 P 2, 5-10) et les unir en un seul corps (cf. 1 Co 12, 12). L’apostolat organisé correspond donc bien à la condition humaine et chrétienne des fidèles ; il présente en même temps le signe de la communion et de l’unité de l’Église dans le Christ qui a dit : « Là où deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis au milieu d’eux » (Mt 18, 20).

C’est pourquoi les chrétiens exerceront leur apostolat en s’accordant sur un même but [28]. Qu’ils soient apôtres, tant dans leurs communautés familiales que dans les paroisses et les diocèses qui expriment en tant que tels le caractère communautaire de l’apostolat ; qu’ils le soient aussi dans les groupements libres dans lesquels ils auront choisi de se réunir.

L’apostolat organisé est aussi très important parce que souvent, soit dans les communautés ecclésiales, soit dans les divers milieux de vie, l’apostolat requiert une action d’ensemble. Les organisations créées pour un apostolat collectif soutiennent leurs membres, les forment à l’apostolat, ordonnent et dirigent leur action apostolique de telle sorte qu’on puisse en espérer des résultats beaucoup plus importants que si chacun agissait isolément.

Dans la conjoncture actuelle il est souverainement nécessaire que là où s’exerce l’activité des laïcs se développe l’apostolat sous sa forme collective et organisée ; seule en effet cette étroite conjonction des efforts peut permettre d’atteindre complètement tous les buts de l’apostolat d’aujourd’hui et d’en protéger efficacement les fruits [29]. Dans cette perspective il est particulièrement important que l’apostolat atteigne les mentalités collectives et les conditions sociales de ceux dont il se préoccupe, sinon ceux-ci seront souvent incapables de résister à la pression de l’opinion publique ou des institutions.

19. Les multiples formes de l’apostolat organisé

Il existe une grande variété dans les associations d’apostolat [30]. Les unes se proposent d’atteindre le but apostolique général de l’Église ; d’autres des buts d’évangélisation et de sanctification envisagés sous un angle particulier ; d’autres visent à l’animation chrétienne de l’ordre temporel ; d’autres rendent témoignage au Christ plus spécialement par les œuvres de miséricorde et de charité.

Parmi ces groupements, il faut en premier lieu considérer ceux qui favorisent et mettent en valeur une union plus intime entre la vie concrète de leurs membres et leur foi. Les organisations ne sont pas des fins en soi, mais elles doivent servir la mission de l’Église envers le monde. Leur valeur apostolique dépend de leur conformité aux buts de l’Église, ainsi que de la qualité chrétienne de leur témoignage et de l’esprit évangélique de chacun de leurs membres et de l’association tout entière.

La mission universelle de l’Église, étant donné la mise en place progressive des structures et l’évolution de la société actuelle, requiert de plus en plus le développement des associations apostoliques des catholiques au plan international. Les organisations internationales catholiques atteindront mieux leur but, si les groupes qu’elles rassemblent et leurs membres leur sont plus étroitement unis.

Le lien nécessaire avec l’autorité ecclésiastique étant assuré [31], les laïcs ont le droit de fonder des associations [32], de les diriger et d’adhérer à celles qui existent. Il faut cependant éviter la dispersion des forces ; celle-ci se produirait si l’on fondait de nouvelles associations et œuvres sans raison suffisante, si l’on en conservait d’autres devenues inutiles, ou encore si l’on gardait des méthodes périmées ; enfin il ne sera pas toujours opportun de transplanter sans discernement dans un pays déterminé les formes d’apostolat organisé qui existent dans un autre [33].

20. L’Action catholique

Depuis quelques dizaines d’années, dans un grand nombre de pays, des laïcs adonnés de plus en plus à l’apostolat, se sont réunis en des formes diverses d’action et d’associations qui, en union particulièrement étroite avec la hiérarchie, ont poursuivi et poursuivent des buts proprement apostoliques. Parmi ces institutions, comme parmi d’autres semblables et plus anciennes, il faut mentionner en premier lieu celles qui, tout en suivant diverses méthodes, ont été très fécondes pour le règne du Christ : recommandées et favorisées à juste titre par les papes et de nombreux évêques, elles ont reçu d’eux le nom d’Action catholique ; elles ont été le plus souvent décrites comme une collaboration des laïcs à l’apostolat hiérarchique [34].

Ces formes d’apostolat, qu’elles portent ou non le nom d’Action catholique, exercent aujourd’hui un apostolat précieux. Elles sont constituées par la réunion des éléments suivants qui les caractérisent :

a) Le but immédiat des organisations de ce genre est le but apostolique de l’Église dans l’ordre de l’évangélisation, de la sanctification des hommes et de la formation chrétienne de leur conscience, afin qu’ils soient en mesure de pénétrer de l’esprit de l’Évangile les diverses communautés et les divers milieux.

b) Les laïcs collaborant, selon un mode qui leur est propre, avec la hiérarchie, apportent leur expérience et assument leur responsabilité dans la direction de ces organisations, dans la recherche des conditions de mise en œuvre de la pastorale de l’Église, dans l’élaboration et la poursuite de leur programme d’action.

c) Ces laïcs agissent unis à la manière d’un corps organisé, ce qui exprime de façon plus parlante la communauté ecclésiale et rend l’apostolat plus fécond.

d) Ces laïcs, qu’ils soient venus à l’apostolat de leur propre mouvement ou en réponse à une invitation pour l’action et la coopération directe avec l’apostolat hiérarchique, agissent sous la haute direction de la hiérarchie elle-même, qui peut même authentifier cette collaboration par un mandat explicite.

Les organisations qui, au jugement de la hiérarchie, vérifient l’ensemble de ces caractères, doivent être réputées comme étant d’Action catholique, même si elles ont des structures et des noms variés selon les exigences des lieux et des peuples.

Le saint Concile recommande instamment ces institutions qui répondent certainement en beaucoup de pays aux nécessités de l’apostolat de l’Église, et il invite les prêtres et les laïcs qui y travaillent à réaliser de plus en plus les caractéristiques mentionnées plus haut et à coopérer toujours fraternellement dans l’Église avec toutes les autres formes de l’apostolat.

21. Estime des organisations

Toutes les organisations d’apostolat sont à estimer comme il convient, mais celles que la hiérarchie, selon les besoins des temps et des lieux, aura louées, recommandées, décidé de fonder comme plus urgentes, doivent être mises en première place par les prêtres, les religieux et les laïcs, et développées par chacun suivant sa mission. Parmi ces groupements, il faut mentionner très spécialement aujourd’hui les associations ou groupes internationaux de catholiques.

22. Les laïcs qui sont à un titre spécial au service de l’Église

Sont dignes d’un respect et d’une estime particulière dans l’Église les laïcs célibataires ou mariés qui de manière définitive ou pour un temps mettent leur personne, leur compétence professionnelle au service des institutions et de leurs activités. C’est une grande joie de voir s’augmenter de jour en jour le nombre des laïcs qui se consacrent aux associations et œuvres d’apostolat, soit à l’intérieur de leur pays, soit dans le secteur international, soit surtout dans des communautés catholiques des missions et des églises naissantes. Les pasteurs accueilleront ces laïcs avec joie et reconnaissance ; ils veilleront à ce que leur condition satisfasse aussi parfaitement que possible aux exigences de la justice, de l’équité et de la charité, surtout en ce qui concerne les ressources nécessaires à leur vie et à celles de leur famille ; ils feront en sorte que ces laïcs disposent des moyens nécessaires de formation, de soutien et de stimulant spirituels.



CHAPITRE V :
Les dispositions à observer

23. Introduction

L’apostolat des laïcs, individuel ou collectif, doit s’insérer à sa vraie place dans l’apostolat de toute l’Église. Qui plus est, son lien avec ceux que l’Esprit Saint a constitués pour paître l’Église de Dieu (cf. Ac 20, 28), est un élément essentiel de l ’apostolat chrétien. Non moins nécessaire est la collaboration entre les diverses initiatives apostoliques qu’il est du ressort de la hiérarchie d’organiser harmonieusement.

Une estime mutuelle et une bonne coordination de toutes les formes apostoliques de l’Église, respectant le caractère particulier de chacune sont en effet absolument nécessaires pour promouvoir l’esprit d’unité afin que la charité fraternelle éclate dans tout l’apostolat de l’Église, que les buts communs soient atteints et que les rivalités dommageables soient évitées [35].

Cela apparaît surtout nécessaire quand une action particulière exige, dans l’Église, l’harmonie et la coopération apostolique des deux clergés, des religieux et des laïcs.

24. Relations avec la hiérarchie

Il appartient à la hiérarchie de favoriser l’apostolat des laïcs, de lui donner principes et assistance spirituelle, d’ordonner son exercice au bien commun de l’Église, et de veiller à ce que la doctrine et les dispositions fondamentales soient respectées.

Les liens de l’apostolat des laïcs avec la hiérarchie peuvent revêtir des modalités différentes selon la diversité des formes et des buts de cet apostolat.

On trouve dans l’Église un certain nombre d’initiatives apostoliques qui doivent leur origine au libre choix des laïcs et dont la gestion relève de leur propre jugement prudentiel. De telles initiatives permettent à l’Église, en certaines circonstances, de mieux remplir sa mission ; aussi n’est-il pas rare que la hiérarchie les loue et les recommande [36], mais aucune initiative ne peut prétendre au nom de catholique, sans le consentement de l’autorité ecclésiastique légitime.

Certaines formes de l’apostolat des laïcs sont reconnues explicitement par la hiérarchie sous une forme ou sous une autre.

En outre, eu égard aux exigences du bien commun de l’Église, l’autorité ecclésiastique peut choisir et promouvoir d’une façon spéciale certaines associations et institutions apostoliques, visant directement un but spirituel, et assumer à leur égard une responsabilité particulière. Ainsi la hiérarchie, organisant l’apostolat de diverses manières selon les circonstances, unit plus étroitement à sa propre charge apostolique telle forme d’apostolat sans toutefois altérer la nature propre et la distinction des deux tâches, et par conséquent sans enlever aux laïcs la nécessaire faculté d’agir de leur propre initiative. Cet acte de la hiérarchie a reçu le nom de « mandat » dans divers documents ecclésiastiques.

Enfin il arrive que la hiérarchie confie aux laïcs certaines charges touchant de plus près aux devoirs des pasteurs : dans l’enseignement de la doctrine chrétienne, par exemple, dans certains actes liturgiques et dans le soin des âmes. Par cette mission, les laïcs sont pleinement soumis à la direction du supérieur ecclésiastique pour l’exercice de ces charges.

En ce qui concerne les œuvres et institutions d’ordre temporel, le rôle de la hiérarchie ecclésiastique est d’enseigner et d’interpréter authentiquement les principes moraux à suivre en ce domaine. Il lui est également possible de juger, après mûre réflexion et consultation de personnes compétentes, de la conformité de telle œuvre ou institution avec ces principes moraux et de se prononcer à leur sujet sur ce qui est exigé pour la sauvegarde et la promotion des biens de l’ordre surnaturel.

25. Aide à apporter par le clergé à l’apostolat des laïcs

Les évêques, les curés, et les autres prêtres du clergé séculier et du clergé régulier se souviendront que le droit et le devoir d’exercer l’apostolat sont communs à tous les fidèles, clercs ou laïcs, et que dans l’édification de l’Église les laïcs ont aussi un rôle propre à jouer [37]. C’est pourquoi ils travailleront fraternellement avec les laïcs dans l’Église et pour l’Église et prendront spécialement à cœur le soutien des laïcs dans leurs œuvres d’apostolat [38].

Les évêques choisiront avec soin des prêtres capables et bien avertis pour s’occuper des formes particulières de l’apostolat des laïcs [39]. Ceux qui exercent ce ministère en vertu d’une mission reçue de la hiérarchie, la représentent dans son action pastorale : toujours attachés fidèlement à l’esprit et à la doctrine de l’Église, ils favoriseront entre les laïcs et la hiérarchie les relations convenables ; ils se dépenseront pour nourrir la vie spirituelle et le sens apostolique au sein des associations catholiques qui leur sont confiées ; ils seront présents à leur action apostolique par leurs avis judicieux et favoriseront leurs projets ; en dialogue constant avec les laïcs, ils rechercheront attentivement les formes les plus capables de rendre l’action apostolique plus fructueuse ; ils développeront l’esprit d’unité au sein même de l’association aussi bien qu’entre elle et les autres. Enfin les religieux, frères ou sœurs, estimeront l’action apostolique des laïcs, et, fidèles à l’esprit et aux règles de leur institut, ils se dépenseront volontiers à la développer [40]; ils s’appliqueront à soutenir, à aider et à compléter l’action du prêtre.

26. Moyens utiles à la coopération mutuelle

Au plan des diocèses il faudrait autant que possible qu’il y ait des conseils qui soutiennent le travail apostolique de l’Église tant sur le plan de l’évangélisation et de la sanctification que sur le plan caritatif, social et autre : les clercs et les religieux y collaboreront de manière appropriée avec les laïcs. Ces conseils pourront aider à la coordination mutuelle des diverses associations ou initiatives des laïcs en respectant la nature propre et l’autonomie de chacune [41] .

Des conseils semblables, autant que faire se peut, devraient être constitués au plan paroissial, interparoissial, interdiocésain, voire même au plan national et international [42].

Il faut de plus constituer auprès du Saint-Siège un secrétariat spécial pour le service et la promotion de l’apostolat des laïcs. Ce secrétariat serait comme un centre doté de moyens adaptés pour fournir des informations au sujet des diverses initiatives apostoliques des laïcs. Il s’attacherait aux recherches sur les problèmes qui surgissent aujourd’hui dans ce domaine et assisterait de ses conseils la hiérarchie et les laïcs sur le plan des activités apostoliques. Les divers mouvements et organisations apostoliques des laïcs du monde entier devraient être parties prenantes de ce secrétariat où se retrouveraient aussi des clercs pour collaborer avec les laïcs.

27. Coopération avec les autres chrétiens et les non-chrétiens

Le patrimoine évangélique commun, et le devoir commun qui en résulte de porter un témoignage chrétien, recommandent et souvent exigent la coopération de catholiques avec les autres chrétiens ; cette collaboration peut être le fait des individus et des communautés ecclésiales et concerner la participation soit à des activités, soit à des associations, sur le plan national ou international [43].

Les valeurs humaines communes réclament aussi de la part des chrétiens qui poursuivent des fins apostoliques une coopération de ce genre avec ceux qui ne professent pas le christianisme mais reconnaissent ces valeurs.

Par cette coopération dynamique et prudente [44], particulièrement importante dans les activités temporelles, les laïcs apportent un témoignage au Christ Sauveur du monde et à l’unité de la famille humaine.



CHAPITRE VI :
Formation à l’apostolat

28. Nécessité d’une formation à l’apostolat

L’apostolat ne peut atteindre une pleine efficacité que grâce à une formation à la fois différenciée et complète. C’est ce qu’exigent non seulement le constant progrès spirituel et doctrinal du laïc lui-même mais aussi diverses circonstances tenant aux réalités, aux personnes et aux obligations auxquelles son activité doit pouvoir s’adapter. Cette formation à l’apostolat s’appuiera comme sur des fondements sur les propositions et déclarations faites ailleurs par le Concile [45]. Un certain nombre de formes d’apostolat requièrent en plus de la formation commune à tous les chrétiens une formation spécifique et particulière en raison de la diversité des personnes et des circonstances.

29. Principes de la formation des laïcs à l’apostolat

Les laïcs ayant leur manière à eux de participer à la mission de l’Église, leur formation apostolique sera adaptée au caractère séculier propre au laïcat et à la vie spirituelle qui leur convient.

Cette formation à l’apostolat suppose une formation humaine conforme à la personnalité et aux conditions de la vie de chacun. Le laïc, en effet, grâce à une bonne connaissance du monde actuel, doit être un membre bien inséré dans son groupe social et dans la culture qui est la sienne.

Mais, en premier lieu, le laïc apprendra à accomplir la mission du Christ et de l’Église en vivant par la foi le mystère divin de la création et de la rédemption sous la motion de l’Esprit Saint qui anime le Peuple de Dieu et qui sollicite tous les hommes à aimer Dieu comme un père et à aimer le monde et les hommes. Cette formation doit être considérée comme le fondement et la condition même de tout apostolat fécond.

Outre la formation spirituelle, une solide connaissance doctrinale est requise en matière théologique, morale et philosophique ; cette connaissance devra être adaptée à l’âge, aux conditions de vie ainsi qu’aux aptitudes de chacun. De plus, il ne faut aucunement oublier l’importance d’une culture générale appropriée jointe à une formation pratique et technique.

En vue de faciliter au mieux les « relations humaines », il convient aussi de favoriser le développement des valeurs authentiquement humaines, en particulier celles qui concernent l’art de vivre en esprit fraternel, de collaborer ainsi que de dialoguer avec les autres.

Parce que la formation à l’apostolat ne peut consister dans la seule instruction théorique, il faut apprendre graduellement et prudemment dès le début de cette formation, à voir toutes choses, à juger, à agir à la lumière de la foi, à se former et à se perfectionner soi-même avec les autres par l’action. C’est ainsi qu’on entrera activement dans le service de l’Église [46]. Cette formation est sans cesse à perfectionner à cause du développement progressif de la personne humaine et de l’évolution même des problèmes ; elle requiert une connaissance toujours plus profonde et une adaptation constante de l’action. Tout en cherchant à répondre à ses multiples exigences, on aura le souci constant de respecter l’unité et l’intégrité totale de la personne humaine afin d’en préserver et d’en intensifier l’harmonieux équilibre.

De cette manière, le laïc peut s’insérer profondément et activement dans la réalité même de l’ordre temporel et prendre part efficacement à la marche des choses ; en même temps, comme membre vivant et témoin de l’Église, il rend celle-ci présente et agissante au cœur même des réalités temporelles [47].

30. Ceux qui doivent former les autres à l’apostolat

La formation à l’apostolat doit commencer dès la première éducation des enfants, mais ce sont plus spécialement les adolescents et les jeunes qui doivent être initiés à l’apostolat et marqués de son esprit. Cette formation sera d’ailleurs à poursuivre tout au long de la vie en fonction des exigences posées par de nouvelles tâches. Il est donc clair qu’il revient à ceux qui ont la charge de l’éducation chrétienne de s’attacher à cette éducation apostolique.

C’est aux parents qu’il incombe, au sein même de la famille, de préparer leurs enfants dès leur jeune âge à découvrir l’amour de Dieu envers tous les hommes ; ils leur apprendront peu à peu – et surtout par leur exemple – à avoir le souci des besoins de leur prochain, tant au plan matériel que spirituel. C’est la famille tout entière, dans sa communauté de vie, qui doit réaliser ainsi le premier apprentissage de l’apostolat.

Mais il est par ailleurs nécessaire de former les enfants de telle manière que, dépassant le cadre familial, ils ouvrent leur esprit à la vie des communautés, aussi bien ecclésiales que temporelles. Leur intégration à la communauté paroissiale locale doit être faite de telle manière qu’ils y prennent conscience d’être membres vivants et agissants du Peuple de Dieu. Les prêtres auront donc le souci constant de cette formation à l’apostolat : dans les catéchismes, les prédications, la direction des âmes ainsi que dans les diverses autres fonctions du ministère pastoral.

Ce sont également les écoles, les collèges et les diverses institutions catholiques consacrées à l’éducation qui doivent susciter chez les jeunes le sens catholique et l’action apostolique. Si ces moyens font défaut, soit que les jeunes ne fréquentent pas ces écoles, soit pour toute autre raison, que les parents et les pasteurs, ainsi que les mouvements d’apostolat, prennent d’autant plus soin d’y pourvoir. Quant aux maîtres et aux éducateurs, qui, par vocation et par devoir d’état, exercent une excellente forme de l’apostolat des laïcs, il importe qu’ils soient pénétrés de la doctrine et de la pédagogie nécessaires pour transmettre efficacement cette éducation.

Les groupements et associations diverses de laïcs qui se consacrent à l’apostolat ou à toute autre fin spirituelle doivent soigneusement et assidûment favoriser, selon leurs objectifs et leurs propres modalités, cette formation à l’apostolat [48]. Ces organismes constituent d’ailleurs souvent la voie ordinaire de cette formation à l’apostolat. On y trouve en effet la formation doctrinale, spirituelle et pratique. Leurs membres réunis en petits groupes avec leurs compagnons ou leur amis, examinent les méthodes et les résultats de leur action apostolique et cherchent ensemble dans l’Évangile à juger leur vie quotidienne.

Cette formation doit être poursuivie de façon telle qu’elle tienne compte de tout l’apostolat qui incombe aux laïcs, car celui-ci ne doit pas s’exercer seulement à l’intérieur des groupements et des associations mais dans toutes les circonstances de la vie, en particulier de la vie professionnelle et sociale. Bien plus, c’est chaque laïc qui doit se préparer lui-même activement à l’apostolat ; ceci est tout particulièrement vrai des adultes. En avançant en âge, en effet, l’esprit s’ouvre davantage, et chacun est donc plus capable de découvrir les talents qui lui ont été départis par Dieu et peut exercer plus efficacement les charismes que l’Esprit Saint lui a donnés pour le bien de ses frères.

31. Adaptation de la formation aux diverses formes d’apostolat

Les diverses formes d’apostolat nécessitent une formation particulièrement adaptée.

a) En ce qui concerne l’apostolat d’évangélisation et de sanctification, les laïcs doivent être spécialement préparés à engager le dialogue avec les autres, croyants ou non-croyants, afin de manifester à tous le message du Chris [49].

Mais comme en notre temps le matérialisme sous des formes diverses se répand un peu partout, même parmi les catholiques, il est nécessaire que les laïcs non seulement étudient avec soin la doctrine, particulièrement les points remis en cause, mais qu’en face de toute forme de matérialisme ils donnent le témoignage d’une vie évangélique.

b) En ce qui concerne la transformation chrétienne de l’ordre temporel les laïcs doivent être instruits de la véritable signification et de la valeur des biens temporels considérés tant en eux-mêmes que dans leurs rapports avec toutes les fins de la personne humaine; ils doivent être entraînés à bien user des choses et acquérir l’expérience de l’organisation des institutions, en restant attentifs au bien commun suivant les principes de la doctrine morale et sociale de l’Église. Les laïcs doivent assimiler tout particulièrement les principes et les conclusions de cette doctrine sociale, de sorte qu’ils deviennent capables de travailler pour leur part à son développement aussi bien que de l’appliquer correctement aux cas particuliers [50].

c) Comme les œuvres de charité et de miséricorde présentent un excellent témoignage de vie chrétienne, la formation apostolique doit aussi inviter à les accomplir, en sorte que dès leur enfance les disciples du Christ apprennent à partager les souffrances de leurs frères et à pourvoir avec générosité à leurs besoins [51].

32. Moyens à prendre

Les laïcs consacrés à l’apostolat disposent déjà de nombreux moyens de formation : sessions, congrès, récollections, exercices spirituels, rencontres fréquentes, conférences, livres et commentaires qui permettent d’approfondir la connaissance de l’Écriture sainte et de la doctrine catholique ainsi que de progresser dans la vie spirituelle, de connaître les conditions de vie du monde, de découvrir et d’utiliser les méthodes les plus aptes à l’apostolat [52].

Ces moyens de formation sont fonction des diverses formes d’apostolat à mettre en œuvre selon les milieux à atteindre.

Dans ce but ont même été créés des centres d’études ou des instituts supérieurs qui ont déjà donné d’excellents résultats.

Le Concile se réjouit des initiatives de ce genre et de leur rayonnement déjà florissant en certaines contrées et souhaite leur fondation là où la nécessité s’en fera sentir. De plus, il préconise la création de centres de documentation et d’études non seulement en matière théologique mais aussi pour les sciences humaines : anthropologie, psychologie, sociologie, méthodologie, afin de développer les aptitudes des laïcs, hommes, femmes, jeunes et adultes, pour tous les secteurs d’apostolat.



EXHORTATION

Le saint Concile adjure donc avec force au nom du Seigneur tous les laïcs de répondre volontiers avec élan et générosité à l’appel du Christ qui, en ce moment même, les invite avec plus d’insistance, et à l’impulsion de l’Esprit Saint. Que les jeunes réalisent bien que cet appel s’adresse très particulièrement à eux, qu’ils le reçoivent avec joie et de grand cœur. C’est le Seigneur lui-même qui, par le Concile, presse à nouveau tous les laïcs de s’unir intimement à lui de jour en jour, et de prendre à cœur ses intérêts comme leur propre affaire (cf. Ph 2, 5), de s’associer à sa mission de Sauveur ; il les envoie encore une fois en toute ville et en tout lieu où il doit aller lui-même (cf. Lc 10, 1) ; ainsi à travers la variété des formes et des moyens du même et unique apostolat de l’Église, les laïcs se montreront ses collaborateurs, toujours au fait des exigences du moment présent, « se dépensant sans cesse au service du Seigneur, sachant qu’en lui leur travail ne saurait être vain » (cf. 1 Co 15, 58). Tout l’ensemble et chacun des points qui ont été édictés dans ce décret ont plu aux Pères du Concile. Et Nous, en vertu du pouvoir apostolique que Nous tenons du Christ, en union avec les vénérables Pères, Nous les approuvons, arrêtons et décrétons dans le Saint-Esprit, et Nous ordonnons que ce qui a été établi en Concile soit promulgué pour la gloire de Dieu.

Rome, à Saint-Pierre, le 18 novembre 1965.

Moi, Paul, évêque de l’Église catholique.



(Suivent les signatures des Pères)

[1] Cf. Jean XXIII, Const. apost. Humanae Salutis, 25 décembre 1961 : AAS 54 (1962), p. 7-10.

[2] Cf. Conc. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n. 33 s. – Cf. aussi Const. Sacrosanctum concilium, n. 26-40. – Décret De instrumentis commun. socialis. – Décret Unitatis redintegratio. – Décret Christus Dominus, n. 16, 17, 18. Déclar. Gravissimum educationis n. 3, 5, 7.

[3] Cf. Pie XII, Alloc. aux cardinaux, 18 février 1946 : AAS 38 (1946), p.101-102.-Idem, Sermo ad Iuvenes operarios catholicos, 25 août 1957 : AAS 49 (1957), p.843.

[4] Cf. Pie XI, Encycl. Rerum Ecclesiae : AAS 18 (1926), p. 65.

[5] Cf. Conc. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n. 31.

[6] Cf. Conc. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n. 33, cf. aussi n. 10.

[7] Cf. Ibid., n. 12.

[8] Cf. Conc. Vat. II, Const. Sacrosanctum concilium, n. 11.

[9] Cf. Conc. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n. 32 ; cf. aussi n. 40-41.

[10] Cf. Conc. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n. 62 ; cf. aussi n. 65.

[11] Cf. Pie XI, Encycl. Ubi arcano, 23 décembre 1922 : AAS 14 (1922), p. 659. – Pie XII, Encycl. Summi Pontificatus, 20 octobre 1939 : AAS 31 (1939), p. 442-443.

[12] Cf. Léon XIII, Encycl. Rerum Novarum : AAS 23 (1890-1891), p. 647. – Pie XI, Encycl. Quadragesimo Anno : AAS 23 (1931), p. 190. – Pie XII, Message radioph. 1er juin 1941 : AAS 33 (1941), p. 207.

[13] Cf. Jean XXIII, Encycl. Mater et Magistra : AAS 53 (1961), p. 402.

[14] Cf. Jean XXIII, Encycl. Mater et Magistra : AAS 53 (1961), p. 440-441.

[15] Cf. Ibid., p. 442-443.

[16] Cf. Pie XII, Alloc. Ad « Pax Romana M.I.I.C. », 25 avril 1957 : AAS 49 (1957), p. 298-299 ; et surtout Jean XXIII, Ad Conventum Consilii « Food and Agriculture Organization (F.A.O.) », 10 novembre 1959 : AAS 51 (1951), p. 856, 866.

[17] Cf. Pie X, lettre apost. Creationis duarum novarum paroeciarum, 1er juin 1905 : AAS 38 (1905), p. 65-67. – Pie XII, Alloc. Aux fidèles de la paroisse Saint-Saba, 11 janvier 1953 : Discours et messages radioph. de Pie XII, 14 (1952-1953), p. 449-454. – Jean XXIII, Alloc. Clero et christifidelibus e dioecesi suburbicaria Albanensi, ad Arcem Gandulfi habita, 26 août 1962 : AAS 54 (1962), p. 565-660.

[18] Cf. Léon XIII, Alloc. du 28 janvier 1894, Acta 14 (1894), p. 424-425.

[19] Cf. Pie XII, Alloc. ad Parochos, etc., 6 février 1951, Discours et messages radioph. de Pie XII, 12 (1950- 1951), p. 437-443 ; 8 mars 1952 : ibid., 14 (1952-1953), p. 5-10 ; 27 mars 1953 : ibid., 15 (1953-1954), p. 27-35 ; 28 février 1954 : ibid., p. 585-590.

[20] Cf. Pie XI, Encycl. Casti connubii : AAS 22 (1930), p. 554. – Pie XII, Message radioph., 1er janvier 1941 : AAS 33 (1941), p. 203. Idem, Delegatis ad Conventum unionis intern. sodalitatum ad iura familiae tuenda, 20 septembre 1949 : AAS 41 (1949), p. 552. – Idem, Ad Patresfamilias e Gallia Romam peregrinantes, 18 septembre 1951 : AAS 43 (1951), p. 731. – Idem, Message radioph. de Noël, 1952 : AAS 45 (1953), p. 41. – Jean XXIII, Encycl. Mater et Magistra, 15 mai 1961 : AAS 53 (1961), p. 429, 439.

[21] 5. Cf. Pie XII, Encycl. Evangelii Praecones, 2 juin 1951 : AAS 43 (1951), p. 514.

[22] Cf. Pie XII, Delegatis ad Conventum Unionis internationalis sodalitatum ad iura familiae tuenda, 20 septembre 1949 : AAS 41 (1949), p. 552.

[23] Cf. Pie X, Alloc. ad catholicam Associationem Iuventutis Gallicae de pietate, scientia et actione, 25 septembre 1904 : AAS 37 (1904-1905), p. 296-300.

[24] Cf. Pie XII, Épître Dans quelques semaines, ad Archiepiscopum Marianopolitanum, de conventibus a iuvenibus operariis christianis canadiensibus indictis, 24 mai 1947 : AAS 39 (1947), p. 257 ; Message radioph. à la j.o.c., Bruxelles, 3 septembre 1950 : AAS 42 (1950), p. 640-641.

[25] Cf. Pie XI, Encycl. Quadragesimo Anno, 15 mai 1931 ; AAS 23 (1931), p. 225-226.

[26] Cf. Jean XXIII, Encycl. Mater et Magistra, 15 mai 1961 : AAS 53 (1961), p. 448-450.

[27] Cf. Pie XII, Alloc. Ad I Conventum ex Omnibus Gentibus Laicorum Apostolatui provehendo, 15 octobre 1951 : AAS 43 (1951), p. 788.

[28] Cf. ibid., p. 787-788.

[29] Cf. Pie XII, Encycl. Le pèlerinage à Lourdes, 2 juillet 1957 : AAS 49 (1957), p. 615.

[30] Cf Pie XII, Alloc. ad Consilium Foederationis internationalis virorum catholicorum, 08 décembre 1956 : AAS 49 (1957), p. 26-27.

[31] Cf. infra chap.V, n. 24.

[32] Cf. S.C. du Concile, résolution Corrienten., 13 novembre 1920 : AAS 13 (1921), p. 139.

[33] Cf. Jean XXIII, Encycl. Princeps Pastorum, 10 décembre 1959 : AAS 51 (1959), p. 856.

[34] Cf. Pie XI, épître Quae nobis, au card. Bertram, 13 novembre 1928 : AAS 20 (1928), p. 385. – Cf. aussi Pie XII, Alloc. Ad. A. C. Italicam, 4 septembre 1940 : AAS 32 (1940), p. 362.

[35] Cf. Pie XI, Encycl. Quamvis Nostra, 30 avril 1936 : AAS 28 (1936), p. 160-161.

[36] Cf. S. C. du Concile, résolution Corrienten., 13 novembre 1920 : AAS 13 (1921), p. 137-140.

[37] Cf. Pie XII, Alloc. Ad II Conventum ex Omnibus Gentibus Laicorum Apostolatui provehendo, 5 octobre 1957 : AAS 49 (1957), p. 927.

[38] Cf. Conc. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n. 37.

[39] Cf. Pie XII, exhort. apost. Menti Nostrae, 23 septembre 1950 : AAS 42 (1950), p. 660.

[40] Cf. Conc. Vat. II, décret Perfecta caritatis, n. 8.

[41] Cf. Benoît XIV, Du Synode diocésain, liv. III, c. IX, n. VII-VIII : Opera omnia in tomos XVII distributa, t. XI (Prati, 1844), p. 76-77.

[42] Cf. Pie XI, Encycl. Quamvis Nostra, 30 avril 1936 : AAS 28 (1936), p. 160-161.

[43] Cf. Jean XXIII, Encycl. Mater et Magistra, 15 mai 1961 : AAS 53 (1961), p. 456-457. – Cf. Conc. Vat. II, décret Unitatis redintegratio, n. 12.

[44] Cf. Conc. Vat. II, décret Unitatis redintegratio, n. 12. Cf. aussi Const. dogm. Lumen gentium n. 15.

[45] Cf. Conc. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, chap. II, IV, V. – Cf. aussi décret Unitatis redintegratio, n. 4, 6, 7, 12. – Cf. aussi supra, n. 4.

[46] Cf. Conc. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium chap. II, IV, V. – Cf. aussi décret Unitatis redintegratio, n. 4, 6, 7, 12. – Cf. aussi supra, n. 4.

[47] Cf. Conc. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n. 33.

[48] Cf. Jean XXIII, Encycl. Mater et Magistra, 15 mai 1961 : AAS 53 (1961), p. 455.

[49] Cf. Pie XII, Encycl. Sertum laetitiae, 1er novembre 1939 : AAS 31 (1939), p. 635-644. – Cf. Idem, Alloc. aux « laureati » de l’Action catholique italienne, 24 mai 1953 : AAS 45 (1953), p. 413-414.

[50] Cf. Pie XII, Alloc. Ad Congressum Universalem Foederationis Mundialis Iuventutis Feminae Cathol., 18 avril 1952 : AAS (1952), p. 414-419.- Idem, Alloc. Ad Associat. Christianam Operariorum Italiae (ACLI), 1er mai 1955 : AAS 47 (1955), p.470-471.

[51] Cf. Pie XII, Ad delegatos Conventus Sodalitatum Caritatis, 27 avril 1952, p. 470-471.

[52] Cf. Jean XXIII, Encycl. Mater et Magistra, 15 mai 1961 : ASS 53 (1961), p. 454.
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Apostolat des Laïcs - Vocation et Mission des Laïcs dans l'Eglise et dans le Monde Empty Re: Apostolat des Laïcs - Vocation et Mission des Laïcs dans l'Eglise et dans le Monde

Message par Her Dim 3 Avr - 21:42

INSTRUCTION

SUR QUELQUES QUESTIONS CONCERNANT
LA COLLABORATION DES FIDÈLES LAÏCS
AU MINISTÈRE DES PRÊTRES

Le Souverain Pontife, en date du 13 août 1997, a approuvé sous forme spécifique la présente Instruction et en a ordonné la promulgation.

LIBRERIA EDITRICE VATICANA
CITÉ DU VATICAN 1997

AVANT-PROPOS

Il découle du mystère de l'Église que tous les membres du Corps mystique sont appelés à participer activement à la mission et à la construction du Peuple de Dieu, dans une communion organique des divers ministères et charismes. A cet appel ont fait souvent écho les documents du Magistère, particulièrement depuis le Concile Vatican II.(1) Les trois dernières assemblées générales ordinaires du Synode des Évêques, surtout, devaient réaffirmer l'identité propre des fidèles laïcs, des ministres sacrés et des personnes consacrées, leur commune dignité dans une diversité de fonctions. Tous les fidèles ont été encouragés à édifier l'Église, en collaborant en communion au salut du monde.

Il faut avoir à l'esprit l'urgence et l'importance de l'action apostolique des fidèles laïcs pour le présent et pour l'avenir de l'évangélisation. L'Église ne peut négliger ce type d'action, parce qu'elle est inscrite dans sa nature de Peuple de Dieu, et parce qu'elle en a besoin pour réaliser sa mission évangélisatrice propre.

L'appel fait à tous les fidèles de participer activement à la mission de l'Église n'est pas resté sans écho. Le Synode des Évêques de 1987 a constaté « de quelle façon l'Esprit a continué de rajeunir l'Église, en suscitant en elle de nouvelles énergies de sainteté avec la participation de nombreux fidèles laïcs. Nous en trouvons un témoignage entre autres, dans le nouveau style de collaboration entre prêtres, religieux et fidèles laïcs; dans la participation active à la liturgie, à l'annonce de la Parole de Dieu, à la catéchèse; dans les multiples services et tâches confiés aux fidèles laïcs et assurés par eux; dans la floraison exubérante de groupes, d'associations et de mouvements consacrés à la spiritualité et à l'engagement des laïcs; dans la participation plus large et plus marquée des femmes à la vie de l'Église et au développement de la société ».(2) De même, lors de la préparation du Synode des Évêques de 1994 sur la vie consacrée, s'est fait jour « partout un désir sincère d'instaurer d'authentiques rapports de communion et de collaboration entre évêques, instituts de vie consacrée, clergé séculier et laïcs ».(3) Dans l'exhortation apostolique post-synodale qui s'en suivit, le Souverain Pontife confirme l'apport spécifique de la vie consacrée à la mission et à l'édification de l'Église.(4)

Il y a en effet une collaboration de tous les fidèles dans chacun des deux domaines de la mission de l'Église: tant dans la sphère spirituelle pour porter aux hommes le message du Christ et sa grâce, que dans la sphère temporelle pour imprégner et perfectionner l'ordre des réalités du monde de l'esprit de l'Évangile.(5) Dans le premier domaine spécialement — évangélisation et sanctification — « l'apostolat des laïcs et le ministère pastoral se complètent mutuellement ».(6) Les fidèles laïcs des deux sexes y ont d'innombrables occasions de se rendre actifs: par un témoignage cohérent de vie personnelle, familiale et sociale; par l'annonce et le partage de l'Évangile de Jésus-Christ dans tous les milieux; par l'effort pour expliquer, défendre et appliquer correctement aux problèmes actuels les principes chrétiens.(7) En particulier, les pasteurs sont exhortés à « reconnaître et promouvoir les ministères, les offices et les fonctions des fidèles laïcs, offices et fonctions qui ont leur fondement sacramentel dans le Baptême, dans la Confirmation, et de plus, pour beaucoup d'entre eux, dans le Mariage ».(Cool

En réalité, la vie de l'Église dans ce domaine a connu, surtout depuis la remarquable impulsion donnée par le Concile Vatican II et le magistère pontifical, une surprenante floraison d'initiatives pastorales.

Aujourd'hui en particulier, la tâche prioritaire de la nouvelle évangélisation, qui mobilise le Peuple de Dieu tout entier, demande aux prêtres le « premier rôle qui leur est particulier »; elle demande en même temps que l'on retrouve une pleine conscience du caractère séculier de la mission du laïc.(9)

Cette entreprise ouvre tout grands aux fidèles laïcs des horizons immenses, dont certains restent à explorer: l'engagement au milieu du siècle, dans le monde de la culture, de l'art et du spectacle, de la recherche scientifique, du travail, des moyens de communication, de la politique, de l'économie, etc.; elle leur demande de créer intelligemment les conditions permettant toujours plus sûrement à ces domaines de trouver en Jésus-Christ leur plénitude de sens.(10)

Dans ce vaste domaine, où le travail spécifiquement spirituel ou religieux et la consecratio mundi vont de concert, il existe un champ particulier, celui qui concerne le ministère sacré du clergé, à l'exercice duquel les fidèles laïcs — hommes et femmes —, peuvent être appelés à apporter leur aide, comme aussi naturellement les membres non-ordonnés des instituts de vie consacrée et des sociétés de vie apostolique. C'est à ce domaine particulier que le Concile Vatican II fait référence quand il enseigne: « Pour finir, la Hiérarchie confie aux laïcs certaines tâches qui sont plus intimement liées aux devoirs des pasteurs, comme dans la proposition de la doctrine chrétienne, dans certains actes liturgiques ou dans le soin des âmes ».(11)

C'est bien parce qu'il s'agit de tâches plus intimement liées aux devoirs des pasteurs — qui, pour être tels, doivent être revêtus du sacrement de l'Ordre —, que l'on demande à tous ceux qui y sont impliqués d'une façon ou d'une autre un zèle particulier, afin de bien préserver tant la nature et la mission du ministère sacré que la vocation et le caractère séculier des fidèles laïcs. En effet collaborer ne signifie pas se substituer.

Nous devons constater avec une vive satisfaction que dans beaucoup d'Églises particulières, la collaboration des fidèles non-ordonnés au ministère pastoral du clergé s'effectue de manière très positive: avec abondance de bons fruits, dans le respect des limites fixées par la nature des sacrements et par la diversité des charismes et des fonctions ecclésiales; pour faire face aux situations d'absence ou de rareté des ministres sacrés, on met en oeuvre des solutions généreuses et intelligentes.(12) De cette façon, on a rendu manifeste cet aspect de la communion en vertu duquel certains membres de l'Église s'emploient avec sollicitude à remédier — dans la mesure où cela leur est possible, n'étant pas munis du caractère du sacrement de l'Ordre —, à des situations d'urgence et de besoins persistants, dans certaines communautés.(13) Ces fidèles sont appelés et députés pour assumer des tâches précises, aussi importantes que délicates, soutenus par la grâce du Seigneur, accompagnés par les ministres sacrés et bien accueillis par les communautés auxquelles ils prêtent leur service. Les pasteurs sacrés sont profondément reconnaissants pour la générosité avec laquelle de nombreuses personnes consacrées et fidèles laïcs se proposent pour ce service spécifique, accompli avec un fidèle sensus Ecclesiae et un dévouement édifiant. La gratitude et l'encouragement concernent particulièrement ceux qui accomplissent ces tâches dans des situations de persécution de la communauté chrétienne, dans des contextes de mission, qu'ils soient territoriaux ou culturels, là où l'Église est encore faiblement implantée et où la présence du prêtre n'est encore que sporadique.(14)

Ce n'est pas le lieu pour approfondir toute la richesse théologique et pastorale du rôle des fidèles laïcs dans l'Église. Elle a déjà été amplement illustrée par l'Exhortation apostolique Christifideles laici.

Le but de ce document est simplement de fournir une réponse claire et autorisée aux pressantes et nombreuses demandes parvenues à nos Dicastères de la part d'évêques, de prêtres et de laïcs qui, confrontés à de nouvelles formes d'activité « pastorale » des fidèles non-ordonnés, dans le contexte des paroisses et des diocèses, ont demandé des éclaircissements.

Fréquemment en effet il s'agit de pratiques qui, bien que nées dans des situations d'urgence et de précarité, et souvent instaurées avec le désir de fournir une aide généreuse à l'activité pastorale, peuvent avoir des conséquences gravement néfastes pour la juste compréhension de la vraie communion ecclésiale. Ces pratiques sont en réalité plus particulièrement présentes dans quelques régions, avec parfois de grandes différences à l'intérieur d'une même région.

Cependant, elles rappellent à leur grave responsabilité pastorale ceux, et spécialement les évêques,(15) qui sont préposés à la promotion et à la garde de la discipline universelle de l'Église; celle-ci se base sur quelques principes doctrinaux déjà clairement énoncés par le concile oecuménique Vatican II(16) et par le magistère pontifical qui lui fait suite.(17)

Un travail de réflexion a été réalisé au sein de nos Dicastères. Des représentants des épiscopats les plus concernés par ce problème ont participé à un symposium réuni sur ce thème, et finalement une ample consultation a été menée auprès de nombreux présidents de conférences d'Évêques, d'autres prélats et d'experts dans les diverses disciplines ecclésiastiques et provenant de divers lieux. Il en est résulté une claire convergence dans le sens précis de la présente Instruction: elle ne prétend pourtant pas être exhaustive, autant parce qu'elle se limite à considérer les cas actuellement les plus connus, que parce que ces cas se présentent dans une variété extrême de circonstances particulières.

L'application fidèle du texte, rédigé sur la base sûre du magistère extraordinaire et ordinaire de l'Église, est confiée aux évêques, mais il est porté à la connaissance également des prélats chargés des circonscriptions ecclésiastiques qui ne connaissent pas de telles pratiques abusives mais qui pourraient être concernées par elles à brève échéance, en raison de la rapidité actuelle de propagation des faits.

Avant de répondre aux cas concrets qui nous sont parvenus, il paraît nécessaire de rappeler quelques éléments théologiques brefs et essentiels sur le sens de l'Ordre sacré dans la constitution de l'Église. Ils sont susceptibles d'aider à une meilleure compréhension des motifs de la discipline ecclésiastique, qui entend promouvoir, dans le respect de la vérité et de la communion ecclésiale, les droits et les devoirs de tous, en vue du « salut des âmes qui doit toujours être dans l'Église la loi suprême ».(18)

PRINCIPES THÉOLOGIQUES

1. Le sacerdoce commun et le sacerdoce ministériel

Le Christ Jésus, Souverain et Éternel prêtre, a voulu que son unique et indivisible sacerdoce soit participé par son Église. C'est elle le Peuple de la Nouvelle Alliance, dans lequel, « par la régénération et l'onction du Saint-Esprit, les baptisés sont consacrés pour former un temple spirituel et un sacerdoce saint, pour offrir, à travers toutes les activités du chrétien, des sacrifices spirituels et faire connaître les hauts faits de Celui qui, des ténèbres, les a appelés à son admirable lumière (cf 1 P 2, 4-10) ».(19) « Il n'y a donc qu'un seul Peuple choisi par Dieu: 'un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême' (Ep 4, 5); la dignité des membres est commune en raison de leur régénération dans le Christ, la grâce des fils est commune, la vocation à la perfection est commune ».(20) Alors « qu'a cours entre eux tous une vraie égalité quant à la dignité et à l'action commune à tous les fidèles concernant l'édification du Corps du Christ », certains sont constitués, par volonté du Christ, « docteurs, dispensateurs des mystères et pasteurs pour les autres ».(21) Le sacerdoce commun des fidèles et le sacerdoce ministériel ou hiérarchique, « bien qu'ils diffèrent selon l'essence et non seulement de degré, sont cependant ordonnés l'un à l'autre; l'un et l'autre, en effet, chacun selon son mode propre, participent de l'unique sacerdoce du Christ ».(22) Il règne entre eux une unité efficace, parce que l'Esprit Saint unifie l'Église dans la communion et le service et lui garantit divers dons hiérarchiques et charismatiques.(23)

La différence essentielle entre le sacerdoce commun et le sacerdoce ministériel ne réside donc pas dans le sacerdoce du Christ, qui demeure toujours unique et indivisible, ni non plus dans la sainteté à laquelle sont appelés tous les fidèles: « Le sacerdoce ministériel, en effet, ne signifie pas en soi un degré plus élevé de sainteté par rapport au sacerdoce commun des fidèles; mais, par le sacerdoce ministériel, les prêtres ont reçu du Christ, par l'Esprit, un don spécifique, afin de pouvoir aider le peuple de Dieu à exercer fidèlement et pleinement le sacerdoce commun qui lui est conféré ».(24) Dans l'édification de l'Église, Corps du Christ, la diversité des membres et des fonctions est en vigueur, mais il n'y a qu'un seul Esprit, qui pour l'utilité de l'Église distribue ses divers dons avec une largesse proportionnée à sa richesse et aux nécessités des services (cf 1 Co 12, 1-11).(25)

La diversité concerne le mode de participation au sacerdoce du Christ, et elle est essentielle en ce sens que « alors que le sacerdoce commun des fidèles se réalise dans le déploiement de la grâce baptismale, vie de foi, d'espérance et de charité, vie selon l'Esprit, le sacerdoce ministériel est au service du sacerdoce commun, il est relatif au déploiement de la grâce baptismale de tous les chrétiens ».(26) Par conséquent, « le sacerdoce ministériel diffère essentiellement du sacerdoce commun des fidèles parce qu'il confère un pouvoir sacré pour le service des fidèles ».(27) Dans ce but le prêtre est exhorté à « croître dans la conscience de la profonde communion qui le relie au peuple de Dieu » pour « susciter et développer la coresponsabilité dans une même et unique mission de salut en valorisant avec empressement et de bon cœur tous les charismes et les fonctions que l'Esprit répartit aux croyants pour la construction de l'Église ».(28)

On peut synthétiser ainsi les caractéristiques qui différencient le sacerdoce ministériel des évêques et des prêtres du sacerdoce commun des fidèles, et qui tracent donc aussi les limites de la collaboration de ceux-ci au ministère sacré:

a) le sacerdoce ministériel a sa racine dans la succession apostolique, et est doté d'un pouvoir sacré,(29) lequel consiste dans la faculté et la responsabilité d'agir en la personne du Christ Tête et Pasteur.(30)

b) il fait des ministres sacrés les serviteurs du Christ et de l'Église, par le moyen de la proclamation avec autorité de la parole de Dieu, de la célébration des sacrements et de la conduite pastorale des fidèles.(31)

Poser les fondements du ministère ordonné dans la succession apostolique, en tant que ce ministère continue la mission reçue des apôtres de la part du Christ, est un point essentiel de la doctrine ecclésiologique catholique.(32)

Le ministère ordonné, par conséquent, est constitué sur le fondement des apôtres pour l'édification de l'Église:(33) « il est totalement au service de l'Église elle-même ».(34) « Intrinsèquement lié à la nature sacramentelle du ministère ecclésial est son caractère de service. En effet, entièrement dépendants du Christ qui donne mission et autorité, les ministres sont vraiment "esclaves du Christ" (Rm 1, 1), à l'image du Christ qui a pris librement pour nous "la forme d'esclave" (Ph 2, 7). Parce que la parole et la grâce dont ils sont les ministres ne sont pas les leurs, mais celles du Christ qui les leur a confiées pour les autres, ils se feront librement esclaves de tous ».(35)

2. Unité et diversification des tâches ministérielles

Les fonctions du ministère ordonné, prises dans leur ensemble, constituent, en raison de leur unique fondement,(36) une unité indivisible. Comme dans le Christ,(37) il n'y a en effet qu'une unique racine de l'action de salut, signifiée et réalisée par le ministre dans l'accomplissement des fonctions d'enseigner, de sanctifier et de gouverner les autres fidèles. Cette unité qualifie essentiellement l'exercice des fonctions du ministère sacré, lesquelles sont toujours, sous divers aspects, un exercice du rôle du Christ Tête de l'Église.

Si donc l'exercice par le ministre ordonné du munus docendi, sanctificandi et regendi constitue la substance du ministère pastoral, les diverses fonctions des ministres sacrés forment une indivisible unité et ne peuvent être comprises séparément les unes des autres; au contraire, elles doivent être considérées dans leur réciprocité et leur complémentarité. Ce n'est que pour certaines d'entre elles, et dans une certaine mesure, que d'autres fidèles non-ordonnés peuvent coopérer avec les pasteurs, s'ils sont appelés à cette collaboration par l'autorité légitime et selon les modalités requises. En effet le Christ « dans son corps, c'est-à-dire dans l'Église, dispose continuellement les dons des services par lesquels, en Sa vertu, nous contribuons au salut les uns des autres ».(38) « L'exercice d'une telle fonction ne fait pas du fidèle laïc un pasteur: en réalité, ce qui constitue le ministère, ce n'est pas l'activité en elle-même, mais l'ordination sacramentelle. Seul le sacrement de l'Ordre confère au ministre ordonné une participation particulière à la fonction du Christ Chef et Pasteur et à son sacerdoce éternel. La fonction exercée en tant que suppléant tire sa légitimité formellement et immédiatement de la délégation officielle reçue des pasteurs et, dans l'exercice concret de cette fonction, le suppléant est soumis à la direction de l'autorité ecclésiastique ».(39)

Il faut réaffirmer cette doctrine parce que certaines pratiques, destinées à suppléer aux faibles effectifs des ministres ordonnés au sein de la communauté, ont pu en certains cas faire pression sur une conception du sacerdoce commun des fidèles qui en arrive à rendre confus son caractère et sa signification spécifique. Cela favorise entre autre la diminution du nombre des candidats au sacerdoce, et obscurcit la spécificité du séminaire comme lieu typique de la formation du ministre ordonné. Il s'agit de phénomènes intimement liés, et il faudra méditer convenablement sur leur relation pour en tirer de sages conclusions pratiques.

3. Caractère irremplaçable du ministère ordonné

Une communauté de fidèles, pour pouvoir être appelée Église et pour l'être vraiment, ne peut faire découler sa direction de critères d'organisation de nature associative ou politique. Toute Église particulière doit au Christ sa direction, parce que c'est Lui qui à la base a concédé à cette Église le ministère apostolique. De ce fait, aucune communauté n'a le pouvoir de se donner à elle-même cette direction,(40) ni de l'établir au moyen d'une délégation. L'exercice du munus de magistère et de gouvernement requiert en effet sa détermination canonique ou juridique de la part de l'autorité hiérarchique.(41)

Le sacerdoce ministériel est par conséquent nécessaire à l'existence même de la communauté en tant qu'Église: « On ne doit donc pas considérer le sacerdoce ordonné comme s'il était (...) postérieur à la communauté ecclésiale, comme si celle-ci pouvait être comprise comme étant déjà constituée sans ce sacerdoce ».(42) En effet, si dans la communauté le prêtre fait défaut, elle se trouve privée de l'exercice et de la fonction sacramentelle du Christ Tête et Pasteur, essentielle pour la vie même de la communauté ecclésiale.

Le sacerdoce ministériel est donc absolument irremplaçable. On en déduit aussitôt la nécessité d'une pastorale des vocations pleine de zèle, bien ordonnée et continuelle, afin de donner à l'Église les ministres dont elle a besoin; on en déduit également la nécessité de réserver une formation soignée à ceux qui dans les séminaires se préparent à recevoir le presbytérat. Toute autre solution pour faire face aux problèmes dus au manque de ministres sacrés ne peut être que précaire.

« Le devoir de favoriser les vocations revient à la communauté chrétienne tout entière, qui doit s'en acquitter avant tout par une vie pleinement chrétienne ».(43) Tous les fidèles en sont coresponsables, en contribuant à encourager l'acquiescement à la vocation sacerdotale, en suivant toujours plus fidèlement Jésus-Christ, et en se dégageant de l'indifférence de leur milieu, surtout dans les sociétés fortement marquées par le matérialisme.

4. La collaboration de fidèles non-ordonnés au ministère pastoral

Dans les documents conciliaires, parmi les divers aspects de la participation à la mission de l'Église des fidèles non-revêtus du caractère de l'Ordre, on envisage leur collaboration directe aux tâches spécifiques des pasteurs.(44) En effet, « lorsque la nécessité ou l'utilité de l'Église l'exigent, les pasteurs peuvent, selon les normes établies par le droit universel, confier aux fidèles laïcs certaines fonctions connexes à leur propre charge de pasteurs, mais qui n'exigent pas le caractère de l'Ordre ».(45) Cette collaboration a ensuite été réglée par la législation post-conciliaire et, de façon particulière, par le nouveau Code de Droit Canonique.

Celui-ci se réfère d'abord aux obligations et aux droits de tous les fidèles;(46) puis au titre suivant, consacré aux obligations et droits des fidèles laïcs, il traite non seulement de ceux propres à leur condition séculière,(47) mais aussi d'autres tâches ou fonctions qui ne leur reviennent pas de façon exclusive. Parmi elles, certaines reviennent à n'importe quel fidèle, ordonné ou non;(48) d'autres au contraire se situent dans la lignée d'un service direct au ministère sacré des fidèles ordonnés.(49) Les fidèles non-ordonnés ne détiennent aucun droit à exercer ces dernières tâches ou fonctions, mais ils ont « capacité à être admis par les Pasteurs sacrés à des offices ecclésiastiques et à des charges qu'ils peuvent exercer selon les dispositions du droit »,(50) ou bien « par défaut de ministres (...) ils peuvent suppléer à certains de leurs offices (...) selon les dispositions du droit ».(51)

Afin qu'une telle collaboration prenne harmonieusement sa place dans la pastorale ministérielle, il est nécessaire que pour éviter des déviations pastorales et des abus disciplinaires, les principes doctrinaux soient clairs et que par conséquent, avec une détermination cohérente, on suscite dans toute l'Église une application attentive et loyale des dispositions en vigueur, sans étendre abusivement le domaine de l'exception aux cas qui ne peuvent en relever.

Si des abus et des transgressions existent en quelque lieu, que les pasteurs mettent en œuvre les moyens nécessaires et opportuns pour empêcher catégoriquement leur propagation, et pour éviter de porter dommage à la bonne compréhension de la nature même de l'Église. En particulier, ils voudront bien appliquer les normes disciplinaires déjà établies, qui apprennent à connaître et à respecter dans les faits la distinction et la complémentarité de fonctions vitales pour la communion ecclésiale. Ensuite, là où de telles transgressions sont déjà répandues, il devient absolument impossible de retarder encore l'intervention responsable de l'autorité dont c'est le devoir; par cette intervention, elle devient vrai artisan de communion, laquelle ne peut se bâtir exclusivement qu'autour de la vérité.

Communion, vérité, justice, paix et charité sont des termes interdépendants.(52)

A la lumière de ces principes, on indique ci-dessous les remèdes qui conviennent pour faire face aux abus signalés à nos Dicastères. Les dispositions qui suivent sont tirées de la normative de l'Église.



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Apostolat des Laïcs - Vocation et Mission des Laïcs dans l'Eglise et dans le Monde Empty Re: Apostolat des Laïcs - Vocation et Mission des Laïcs dans l'Eglise et dans le Monde

Message par Her Dim 3 Avr - 21:43

INSTRUCTION

SUR QUELQUES QUESTIONS CONCERNANT
LA COLLABORATION DES FIDÈLES LAÏCS
AU MINISTÈRE DES PRÊTRES

Le Souverain Pontife, en date du 13 août 1997, a approuvé sous forme spécifique la présente Instruction et en a ordonné la promulgation. (Suite et Fin)

LIBRERIA EDITRICE VATICANA
CITÉ DU VATICAN 1997

DISPOSITIONS PRATIQUES

Article 1

Nécessité d'une terminologie appropriée

Le Saint-Père, dans le discours adressé aux participants au symposium sur la « Collaboration des fidèles laïcs au ministère presbytéral », a souligné la nécessité d'éclaircir et de distinguer les diverses acceptions prises par le mot « ministère » dans le langage théologique et canonique.(53)

§ 1. « Depuis un certain temps, s'est établi l'usage d'appeler ministères non seulement les officia (offices) et les munera (charges) exercés par les pasteurs en vertu du sacrement de l'Ordre, mais aussi ceux qu'exercent des fidèles non-ordonnés en vertu du sacerdoce baptismal. La question de vocabulaire devient encore plus complexe et délicate quand est reconnue à tous les fidèles la possibilité d'exercer — en tant que suppléants, par délégation officielle accordée par les pasteurs — certaines fonctions plus spécifiques des clercs, mais qui n'exigent pourtant pas le caractère de l'Ordre. Il faut reconnaître que le langage devient incertain, confus, et donc inutile pour exprimer la doctrine de la foi, chaque fois que, de quelque manière que ce soit, est voilée la différence "d'essence et pas seulement de degré" qui existe entre le sacerdoce baptismal et le sacerdoce ordonné ».(54)

§ 2. « Ce qui a permis, dans quelques cas, l'extension du terme ministère aux munera propres aux fidèles laïcs, c'est le fait qu'eux aussi, à leur mesure, sont une participation à l'unique sacerdoce du Christ. Les officia, qui leur sont confiés temporairement, sont au contraire exclusivement le résultat d'une délégation de l'Église. Seule une constante référence à l'unique source que constitue le "ministère du Christ" (...) permet, dans une certaine mesure, d'appliquer aussi aux fidèles laïcs le terme de ministère, sans ambiguïté: c'est-à-dire sans qu'il soit perçu et vécu comme une aspiration indue au ministère ordonné, ou comme une érosion progressive de sa spécificité.

Dans ce sens originel, le terme ministère (servitium) exprime simplement l'œuvre par laquelle les membres de l'Église prolongent, pour elle-même et pour le monde, "la mission et le ministère du Christ". Quand au contraire, le terme est spécifié dans le rapport et la comparaison entre les divers munera et officia, il convient alors d'avertir clairement que c'est seulement en raison de l'Ordination sacrée qu'il acquiert cette plénitude et cette univocité de sens que la tradition lui a toujours attribué ».(55)

§ 3. Le fidèle non-ordonné peut être appelé génériquement « ministre extraordinaire » seulement quand il est appelé par l'autorité compétente à accomplir, uniquement dans des fonctions de suppléance, les charges considérées par le can. 230, § 3,(56) et par les canons 943 et 1112. Naturellement on peut utiliser le terme concret qui détermine canoniquement la fonction confiée, comme par exemplecatéchiste, acolyte, lecteur, etc.

La députation temporaire dans les actions liturgiques considérées par le can. 230, § 2 ne confère aucune dénomination spéciale au fidèle non-ordonné.(57)

Il n'est donc pas licite de faire prendre à des fidèles non-ordonnés la dénomination de « pasteur », d'« aumônier », de « chapelain », de « coordinateur », de « modérateur » ou autres dénominations qui, quoi qu'il en soit, pourraient confondre leur rôle avec celui du pasteur, qui est uniquement l'évêque et le prêtre.(58)

Article 2

Le ministère de la parole(59)

§ 1. Le contenu de ce ministère consiste en « la prédication pastorale, la catéchèse et tout l'enseignement chrétien, au sein duquel l'homélie liturgique doit avoir une place privilégiée ».(60)

L'exercice originaire des fonctions liées à ce ministère est le propre de l'Évêque diocésain, en tant que modérateur dans son Église de tout le ministère de la parole;(61) c'est aussi le propre des prêtres ses coopérateurs.(62) Ce ministère revient encore aux diacres, en communion avec l'Évêque et son presbytérium.(63)

§ 2. Les fidèles non-ordonnés participent, selon leur nature, à la fonction prophétique du Christ; ils sont constitués comme ses témoins, ils sont munis du sens de la foi et de la grâce de la parole. Tous sont appelés à devenir, toujours plus, « des hérauts efficaces de la foi en ce qu'il faut espérer (cf He 11, 1) ».(64) Aujourd'hui, c'est en particulier l'oeuvre de la catéchèse qui dépend beaucoup de leur engagement et de leur générosité au service de l'Église.

C'est pourquoi les fidèles, et particulièrement les membres des instituts de vie consacrée et des sociétés de vie apostolique, peuvent être appelés à collaborer, selon les modalités légitimes, à l'exercice du ministère de la parole.(65)

§ 3. Pour que cette aide soit efficace, il est nécessaire de rappeler quelques conditions concernant ses modalités.

Le C.I.C., au canon 766, établit les conditions dans lesquelles l'autorité compétente peut admettre les fidèles non-ordonnés à prêcher in ecclesia vel oratorio. L'expression elle-même, admitti possunt, souligne comment il ne s'agit en aucun cas d'un droit propre comme celui spécifique aux évêques,(66) ni d'une faculté comme celle des prêtres ou des diacres.(67)

Les conditions auxquelles est soumise cette admission — « si la nécessité le requiert en certaines circonstances », « si l'utilité s'en fait sentir dans des cas particuliers » — montrent à quel point le fait est exceptionnel. Le canon 766 précise en outre qu'il faut toujours agir iuxta Episcoporum conferentiae praescripta. Avec cette dernière clause, le canon cité établit quelle est la première source pour discerner correctement s'il y a nécessité ou utilité dans les cas concrets, puisque ces dispositions de la conférence des Évêques, qui ont besoin de la recognitio du Siège Apostolique, doivent signaler les critères opportuns qui peuvent aider l'Évêque diocésain à prendre les décisions pastorales appropriées: ces décisions lui reviennent en propre en raison de la nature même de l'office épiscopal.

§ 4. Au cas où les ministres sacrés, dans des zones circonscrites, se feraient rares, des situations permanentes et objectives de nécessité ou d'utilité peuvent se présenter, suggérant d'admettre des fidèles non-ordonnés à la prédication.

La prédication dans les églises et les oratoires par des fidèles non-ordonnés peut être concédée en suppléance des ministres sacrés, ou pour des raisons spéciales d'utilité dans les cas particuliers prévus par la législation universelle de l'Église ou celle des conférences d'Évêques, et elle ne peut donc devenir un fait ordinaire, ni être comprise comme une authentique promotion du laïcat.

§ 5. Surtout dans la préparation aux sacrements, que les catéchistes aient soin de susciter l'intérêt des catéchisés envers le rôle et la figure du prêtre, en tant que seul dispensateur des mystères divins auxquels ils se préparent.

Article 3

L'homélie

§ 1. L'homélie, forme éminente de prédication « qua per anni liturgici cursum ex textu sacro fidei mysteria et normae vitae christianae exponuntur »,(68) fait partie intégrante de la liturgie.

Durant la célébration de l'Eucharistie, l'homélie doit donc être réservée au ministre sacré, prêtre ou diacre.(69) Les fidèles non-ordonnés en sont exclus, même s'ils remplissent le rôle d'« assistants pastoraux » ou de catéchistes, auprès de n'importe quel type de communauté ou de groupe. Il ne s'agit pas en effet d'une plus grande facilité d'exposition — un cas éventuel —, ni de préparation théologique, mais de fonction réservée à qui est consacré par le sacrement de l'Ordre sacré; ce qui fait que l'Évêque diocésain lui-même n'est pas autorisé à dispenser de la norme de ce canon,(70) du moment qu'il ne s'agit pas d'une loi purement disciplinaire, mais d'une loi qui concerne les fonctions d'enseignement et de sanctification étroitement liées entre elles.

On ne peut donc admettre l'usage, pratiqué en quelques circonstances, de confier la prédication de l'homélie à des séminaristes, étudiants en théologie non encore ordonnés.(71) L'homélie en effet ne peut être considérée comme un entraînement en vue du ministère futur.

Il faut tenir pour abrogée par le can. 767, § 1 toute norme antérieure qui aurait admis des fidèles non-ordonnés à prononcer l'homélie durant la célébration de la Messe.(72)

§ 2. Il est licite de proposer une brève présentation qui favorise une meilleure compréhension de la liturgie célébrée; exceptionnellement, on peut aussi proposer un éventuel témoignage, toujours adapté aux normes liturgiques, à l'occasion de liturgies eucharistiques célébrées en des journées particulières (journée du séminaire, des malades, etc.), si l'on considère que cela convient objectivement, pour donner du relief à l'homélie que prononce le prêtre célébrant selon la règle. Ces présentations et ces témoignages ne doivent pas revêtir des caractéristiques qui pourraient les faire confondre avec l'homélie.

§ 3. La possibilité du « dialogue » dans l'homélie(73) peut parfois être utilisée avec prudence par le ministre célébrant, comme un moyen d'exposition qui ne comporte aucune délégation du devoir de la prédication.

§ 4. L'homélie en-dehors de la Messe peut être prononcée par des fidèles non-ordonnés en conformité avec le droit et les normes liturgiques, dans le respect des clauses qu'ils contiennent.

§ 5. L'homélie ne peut être confiée, en aucun cas, à des prêtres ou des diacres qui auraient perdu l'état clérical, ou qui auraient abandonné de toute façon l'exercice du ministère sacré.(74)

Article 4

Le curé et la paroisse

Les fidèles non-ordonnés peuvent remplir des tâches de collaboration effective au ministère pastoral des clercs, comme il faut s'en féliciter dans de nombreux cas, dans les paroisses, dans le domaine des maisons de soin, de l'assistance, de l'instruction, des prisons, auprès des ordinariats militaires, etc. Une forme extraordinaire de collaboration, dans les conditions prévues, est celle réglée par le can. 517, § 2.

§ 1. La compréhension et l'application correcte de ce canon, en vertu duquel « si ob sacerdotum penuriam Episcopus diocesanus aestimaverit participationem in exercitio curae pastoralis paroeciae concredendam esse diacono aliive personae sacerdotali charactere non insignitae aut personarum communitati, sacerdotem constituat aliquem qui, potestatibus et facultatibus parochi instructus, curam pastoralem moderetur », demande que cette mesure exceptionnelle intervienne dans le scrupuleux respect des clauses qu'elle contient, à savoir:

a) ob sacerdotum penuriam, et non pas pour des raisons de commodité ou d'une équivoque « promotion du laïcat », etc.

b) restant ferme qu'il s'agit de participatio in exercitio curae pastoralis, et non pas de diriger, coordonner, modérer, gouverner la paroisse; chose qui, selon les termes même du canon, ne revient qu'à un prêtre.

C'est justement parce qu'il s'agit de cas exceptionnels qu'il faut avant tout considérer la possibilité de profiter des services, par exemple, de prêtres âgés encore valides, ou de confier diverses paroisses à un seul prêtre ou à un coetus sacerdotum.(75)

Il ne faut pas négliger, de toute façon, la préférence qu'établit le même canon en faveur du diacre.

Il reste que la normative canonique elle-même affirme que ces formes de participation dans la cure des paroisses ne peuvent remplacer d'aucune façon l'office de curé. La normative définit en effet que même dans ces cas exceptionnels « Episcopus dioecesanus [...] sacerdotem constituat aliquem qui, potestatibus et facultatibus parochi instructus, curam pastoralem moderetur ». L'office de curé, en effet, ne peut être validement conféré qu'à un prêtre (cf can. 521, § 1), même en cas de manque objectif de clercs.(76)

§ 2. A cet égard il faut aussi tenir compte de ce que le curé est le pasteur propre de la paroisse qui lui est confiée,(77) et qu'il demeure tel tant que son office pastoral n'a pas cessé.(78)

Le fait qu'un curé présente sa démission pour avoir dépassé l'âge de soixante-quinze ans n'entraîne pas ipso iure la cessation de son office pastoral. La cessation n'intervient que quand l'évêque diocésain — après avoir prudemment considéré toutes les circonstances — a accepté définitivement sa démission, selon la norme du can. 538, § 3, et le lui a communiqué par écrit.(79) Au contraire, vu les situations de pénurie de prêtres existantes en certaines régions, il sera sage d'être particulièrement prudent en la matière.

Considérant également le droit que possède chaque prêtre d'exercer les fonctions inhérentes à l'ordre reçu, à moins qu'interviennent de graves motifs de santé ou de discipline, on rappelle que l'âge de soixante-quinze ans n'est pas un motif suffisant pour obliger l'évêque à accepter une démission. Ceci aussi pour éviter une conception fonctionnaliste du ministère sacré.(80)

Article 5

Les organismes de collaboration dans l'Église particulière

Ces organismes, demandés et expérimentés avec fruit dans le chemin de renouvellement de l'Église selon le Concile Vatican II, et codifiés par la législation canonique, représentent une forme de participation active à la vie et à la mission de l'Église comme communion.

§ 1. La normative du Code sur le conseil presbytéral établit quels sont les prêtres qui peuvent en être membres.(81) Il est en effet réservé aux prêtres, parce qu'il se fonde sur la commune participation de l'évêque et des prêtres au même sacerdoce et ministère.(82)

Ni les diacres ni les fidèles non-ordonnés ne peuvent donc y jouir de voix active et passive, même s'ils sont collaborateurs des ministres sacrés, ni non plus les prêtres qui auraient perdu l'état clérical ou qui auraient de toute façon abandonné le ministère sacré.

§ 2. Le conseil pastoral, diocésain et paroissial(83) et le conseil paroissial pour les affaires économiques,(84) dont font aussi partie des fidèles non-ordonnés, jouissent uniquement de voix consultative et ne peuvent en aucune façon devenir des organismes délibératifs. Ne peuvent être élus à de telles charges que les fidèles qui possèdent les qualités requises par la normative canonique.(85)

§ 3. C'est le propre du curé que de présider les conseils paroissiaux. Par conséquent les décisions élaborées par un conseil paroissial réuni hors de la présidence du curé, voire contre lui, sont invalides, et donc nulles.(86)

§ 4. Dans tous les conseils diocésains, le consentement à un acte de l'évêque ne peut être exprimé validement que quand le droit le requiert expressément.

§ 5. Étant données les réalités locales, les Ordinaires peuvent se prévaloir de groupes spéciaux d'étude ou d'experts sur des questions particulières. Mais ceux-ci ne peuvent devenir des organismes parallèles, ou vidant de leur sens les conseils diocésains presbytéraux et pastoraux, comme aussi les conseils paroissiaux: ceux-ci sont régis par le droit universel de l'Église dans les can. 536, § 1 et 537(87). Si dans le passé de tels organismes ont surgi, sur la base de coutumes locales ou de circonstances particulières, que l'on mette en acte les moyens nécessaires pour les rendre conformes à la législation de l'Église en vigueur.

§ 6. Les vicaires forains, appelés aussi doyens, archiprêtres ou autre, et ceux qui en tiennent lieu, « pro-vicaires », « pro-doyens », etc., doivent toujours être prêtres.(88) Par conséquent celui qui n'est pas prêtre ne peut être validement nommé à de telles charges.

Article 6

Les célébrations liturgiques

§ 1. Les actions liturgiques doivent manifester clairement l'unité ordonnée du Peuple de Dieu dans sa condition de communion organique(89) et donc la connexion intime qui relie l'action liturgique et la nature organiquement structurée de l'Église.

Cela se réalise quand tous les participants exécutent avec foi et dévotion le rôle qui leur est propre.

§ 2. Afin de sauvegarder, dans ce domaine également, l'identité ecclésiale de chacun, il faut supprimer les abus de divers genres qui s'opposent à la prescription du can. 907: dans la célébration eucharistique il n'est pas permis aux diacres et aux fidèles non-ordonnés de proférer les oraisons ni toute autre partie réservée au prêtre célébrant — surtout la prière eucharistique avec sa doxologie conclusive —, ni d'exécuter des actions et des gestes qui sont propres au célébrant. C'est aussi un grave abus que de permettre à un fidèle non-ordonné d'exercer de fait une quasi « présidence » de l'eucharistie, en ne laissant au prêtre que le minimum nécessaire pour en garantir la validité.

Dans la même ligne, il est évidemment illicite, pour quelqu'un qui n'est pas ordonné, d'utiliser dans les cérémonies liturgiques des ornements réservés aux prêtres ou aux diacres (étole, chasuble, dalmatique).

On doit chercher à éviter soigneusement jusqu'à l'apparence de confusion qui peut ressortir des comportements liturgiquement hors-normes. De même qu'on rappelle aux ministres ordonnés l'obligation d'endosser tous les ornements sacrés qui sont prescrits, de même les fidèles non-ordonnés ne peuvent revêtir ce qui ne leur appartient pas en propre.

Pour éviter toute confusion entre la liturgie sacramentelle, présidée par un prêtre ou un diacre, et d'autres actes animés ou guidés par des fidèles non-ordonnés, il est nécessaire que pour ces derniers on emploie des formulaires clairement distincts.

Article 7

Les célébrations dominicales en absence du prêtre

§ 1. En certains lieux les célébrations dominicales(90) sont guidées, par manque de prêtres ou de diacres, par des fidèles non-ordonnés. Ce service, aussi valable que délicat, s'exerce selon l'esprit et les normes spécifiques émanées à son sujet par l'autorité ecclésiastique compétente.(91) Pour guider ces célébrations, le fidèle non-ordonné devra avoir un mandat spécial de la part de l'évêque, qui prendra soin de donner des indications opportunes concernant sa durée, son lieu, ses conditions et le prêtre qui en est responsable.

§ 2. De telles célébrations, dont les textes doivent toujours être ceux approuvés par l'autorité ecclésiastique compétente, se présentent toujours comme des solutions temporaires.(92) Il est interdit d'insérer dans leur structure des éléments propres à la liturgie du sacrifice, surtout la « prière eucharistique », même sous forme narrative, pour ne pas engendrer d'erreurs dans l'esprit des fidèles.(93) Dans ce but, il faut toujours redire à ceux qui participent à ces célébrations qu'elles ne remplacent pas le Sacrifice eucharistique, et qu'on n'accomplit le précepte de sanctifier les fêtes qu'en participant à la Messe.(94) Dans les cas où les distances et les conditions physiques le permettent, les fidèles doivent être encouragés et aidés à faire leur possible pour accomplir le précepte.

Article 8

Le ministre extraordinaire de la sainte Communion

Les fidèles non-ordonnés collaborent depuis déjà longtemps dans divers domaines de la pastorale avec les ministres sacrés afin que « le don ineffable de l'Eucharistie soit connu toujours plus profondément et que l'on participe toujours plus intensément à sa vertu salutaire ».(95)

Il s'agit d'un service liturgique qui répond à des besoins objectifs des fidèles, et il s'adresse surtout aux malades et aux assemblées liturgiques dans lesquelles sont particulièrement nombreux les fidèles désireux de recevoir la sainte Communion.

§ 1. La discipline canonique sur le ministre extraordinaire de la sainte Communion doit cependant être correctement appliquée pour ne pas provoquer de confusion. Elle dispose que le ministre ordinaire de la sainte Communion est l'évêque, le prêtre et le diacre,(96) tandis que sont ministres extraordinaires soit l'acolyte institué, soit le fidèle député dans ce but aux termes du can. 230, § 3.(97)

Un fidèle non-ordonné, si des motifs de vraie nécessité y invitent, peut être député en qualité de ministre extraordinaire par l'Évêque diocésain, en utilisant la formule de bénédiction liturgique appropriée:(98) pour distribuer la sainte Communion y compris en dehors de la célébration eucharistique ad actum vel ad tempus, ou de façon stable. Dans des cas exceptionnels et imprévisibles, l'autorisation peut être concédée ad actum par le prêtre qui préside la célébration eucharistique.

§ 2. Pour que le ministre extraordinaire, durant la célébration eucharistique, puisse distribuer la sainte Communion, il est nécessaire ou bien qu'il n'y ait pas d'autres ministres ordinaires présents, ou bien que ceux-ci soient vraiment empêchés.(99) Il peut remplir aussi cette charge quand, à cause d'une participation particulièrement nombreuse de fidèles désireux de recevoir la sainte Communion, la célébration eucharistique se prolongerait excessivement en raison de l'insuffisance de ministres ordonnés. (100)

Une telle charge est supplétive et extraordinaire, (101) et elle doit être exercée selon les normes du droit. Dans ce but il est opportun que l'Évêque diocésain édicte des normes particulières qui, en étroite harmonie avec la législation universelle de l'Église, règlent l'exercice de cette charge. Il faut prévoir, entre autre, que le fidèle député à cela soit convenablement instruit sur la doctrine eucharistique, sur le caractère de son service, sur les rubriques à observer pour l'honneur dû à un si grand sacrement, et sur la discipline concernant l'admission à la communion.

Pour ne pas provoquer de confusions, il faut éviter et faire disparaître plusieurs pratiques, qui se sont répandues depuis quelque temps dans certaines Églises particulières, comme par exemple:

— le fait de se communier soi-même comme si l'on était concélébrant;

— le fait d'associer à la rénovation des promesses des prêtres, dans la Messe chrismale du Jeudi Saint, d'autres catégories de fidèles qui renouvellent des voeux religieux, ou reçoivent le mandat de ministres extraordinaires de la communion.

— l'usage habituel de ministres extraordinaires au cours des Messes, en étendant arbitrairement le concept de « nombreuse participation ».

Article 9

L'apostolat des malades

§ 1. Dans ce domaine, les fidèles non-ordonnés peuvent apporter une collaboration précieuse. (102) Il y a d'innombrables témoignages des œuvres et des gestes de charité envers les malades que réalisent des personnes non-ordonnées, soit à titre individuel soit sous des formes d'apostolat communautaire. Cela assure une présence chrétienne de premier ordre dans le monde de la souffrance et de la maladie. Là où les fidèles non-ordonnés accompagnent les malades aux moments les plus graves, leur tâche principale est de susciter le désir des sacrements de Pénitence et des Malades, en favorisant les dispositions des malades et en les aidant à préparer une bonne confession sacramentelle individuelle, comme aussi à recevoir l'Onction. Quand ils ont recours à des sacramentaux, les fidèles non-ordonnés veilleront à ce que ce geste ne soit pas confondu avec les sacrements dont l'administration est réservée en propre et exclusivement à l'évêque et au prêtre. Ceux qui ne sont pas prêtres ne peuvent en aucun cas pratiquer des onctions, ni avec de l'huile bénite pour le Sacrement des malades, ni avec toute autre huile.

§ 2. Pour l'administration de ce Sacrement, la législation canonique reçoit la doctrine théologiquement certaine et la pratique séculaire de l'Église, (103) selon lesquelles l'unique ministre valide en est le prêtre. (104) Cette normative est pleinement cohérente avec le mystère théologique signifié et réalisé par le moyen de l'exercice du service sacerdotal.

Il faut affirmer que le fait de réserver exclusivement au prêtre le ministère de ce Sacrement est lié à sa relation au pardon des péchés et à la digne réception de l'Eucharistie. Personne d'autre ne peut remplir le rôle de ministre ordinaire ou extraordinaire de ce sacrement, et tout geste dans cette direction constitue une simulation du sacrement. (105)

Article 10

L'assistance aux Mariages

§ 1. La possibilité de déléguer des fidèles non-ordonnés pour assister aux Mariages peut s'avérer nécessaire dans des circonstances très particulières de manque grave de ministres sacrés.

Elle est cependant soumise à trois conditions. En effet, l'Évêque diocésain ne peut concéder une telle délégation que dans les cas où prêtres et diacres font défaut, et seulement après avoir obtenu pour son diocèse l'avis favorable de la conférence des Évêques, ainsi que la permission nécessaire du Saint-Siège. (106)

§ 2. Dans ces cas également il faut s'en tenir à la normative canonique concernant la validité de la délégation, (107) ainsi qu'à celle sur l'idonéité, la capacité et l'aptitude du fidèle non-ordonné. (108)

§ 3. Sauf dans le cas extraordinaire — prévu par le can. 1112 du C.I.C. —, de manque absolu de prêtres ou de diacres pouvant assister à la célébration du Mariage, aucun ministre ordonné ne peut autoriser un fidèle non-ordonné pour une telle assistance, qui implique de demander et de recevoir le consentement matrimonial selon la norme du can. 1108, § 2.

Article 11

Le ministre du Baptême

Il faut louer particulièrement la foi avec laquelle de nombreux chrétiens, dans des situations pénibles de persécution, comme aussi dans les territoires de mission et en cas de nécessité spéciale, ont assuré — et assurent toujours — le sacrement du Baptême aux nouvelles générations, étant donnée l'absence de ministres ordonnés.

Outre le cas de nécessité, la normative canonique prévoit qu'en l'absence de ministre ordinaire, ou quand celui-ci est empêché, (109) le fidèle non-ordonné puisse être désigné comme ministre extraordinaire du Baptême. (110) Il faut cependant faire attention à des interprétations trop extensives et éviter de concéder cette faculté sous forme habituelle.

Ainsi par exemple, à l'absence ou à l'empêchement qui rendent licite la députation de fidèles non-ordonnés pour administrer le Baptême, on ne peut assimiler le travail excessif de la part du ministre ordinaire, ni le fait qu'il ne réside pas sur le territoire de la paroisse, ni non plus son indisponibilité au jour prévu par la famille. Aucune de ces raisons ne constitue un motif suffisant.

Article 12

La conduite de la célébration des funérailles ecclésiastiques

Dans les circonstances actuelles de croissante déchristianisation et d'éloignement par rapport à la pratique religieuse, le moment de la mort et des obsèques peut parfois devenir l'une des occasions pastorales les plus opportunes pour permettre aux ministres ordonnés de rencontrer directement les fidèles qui ne pratiquent pas habituellement.

Il est donc souhaitable, même au prix de quelques sacrifices, que les prêtres ou les diacres président personnellement les rites funéraires selon les usages locaux les plus recommandables, pour prier convenablement pour les défunts, tout en se faisant proche des familles et en en profitant pour faire oeuvre d'évangélisation.

Les fidèles non-ordonnés ne peuvent guider les funérailles ecclésiastiques que dans le cas d'un vrai manque de ministre ordonné, et en observant les normes liturgiques en la matière. (111) Ils devront être bien préparés pour cette tâche, doctrinalement et liturgiquement.

Article 13

Nécessité d'un discernement et d'une formation adéquate

L'autorité compétente, face à l'objective nécessité d'une « suppléance », dans les cas indiqués dans les articles précédents, a le devoir de choisir un fidèle de saine doctrine et à la conduite exemplaire. On ne peut donc admettre à l'exercice de ces tâches les catholiques qui ne mènent pas une vie digne, qui ne jouissent pas d'une bonne réputation, ou qui se trouvent dans des situations de famille contredisant l'enseignement moral de l'Église. De plus, ils doivent posséder la formation requise pour accomplir convenablement la fonction qui leur sera confiée.

Selon les normes du droit particulier, ils devront perfectionner leurs connaissances en fréquentant, dans la mesure du possible, les cours de formation que l'autorité compétente organisera au niveau de l'Église particulière (112) — en d'autres lieux que les séminaires, lesquels doivent être réservés aux seuls candidats au sacerdoce (113) —, en prenant grand soin de ce que la doctrine enseignée soit absolument conforme au magistère ecclésial et de ce que le climat en soit vraiment spirituel.

CONCLUSION

Le Saint-Siège confie ce document au zèle pastoral des Évêques diocésains des diverses Églises particulières et aux autres Ordinaires, confiant que son application produira des fruits abondants pour faire croître dans la communion les ministres sacrés et les fidèles non-ordonnés.

En effet, comme l'a rappelé le Saint-Père, « il faut reconnaître, défendre, promouvoir, discerner et coordonner avec sagesse et détermination le don particulier de chaque membre de l'Église, sans confusion de rôles, de fonctions, ou de conditions théologiques et canoniques ». (114)

Si d'une part la raréfaction du nombre des prêtres est spécialement ressentie dans certaines régions, en d'autres on constate une floraison prometteuse de vocations qui laisse entrevoir des perspectives d'avenir positives. Les solutions proposées pour remédier à la rareté des ministres ordonnés, par conséquent, ne peuvent être que transitoires et aller de pair avec une pastorale spécifique prioritaire de promotion des vocations au sacrement de l'Ordre. (115)

A cet égard le Saint Père rappelle que « dans certaines situations locales, on a cherché des solutions généreuses et intelligentes. Les normes même du Code de Droit Canonique ont proposé des possibilités nouvelles, mais elles doivent être appliquées correctement pour ne pas tomber dans l'équivoque de considérer ordinaires et normales des solutions normatives prévues pour des situations extraordinaires d'absence ou de rareté des ministres sacrés ». (116)

Ce document entend tracer des directives précises pour assurer une collaboration efficace des fidèles non-ordonnés dans de telles contingences, et dans le respect de l'intégralité du ministère pastoral des prêtres. « Il faut faire comprendre que ces précisions et distinctions ne naissent pas de la préoccupation de défendre des privilèges cléricaux, mais de la nécessité d'obéir à la volonté du Christ, en respectant la forme constitutive qu'il a imprimée de façon indélébile à son Église ». (117)

Leur droite application, dans le cadre de cette vitale communio hiérarchique, profitera aux fidèles laïcs eux-mêmes, invités à développer toutes les riches potentialités de leur identité et « la disponibilité toujours plus grande à la vivre dans l'accomplissement de leur propre mission ». (118)

La recommandation passionnée qu'adresse à Timothée l'apôtre des Nations, « Je t'adjure devant Dieu et devant le Christ Jésus, (...) proclame la parole, insiste à temps et à contretemps, réfute, menace, exhorte (...) veille attentivement (...) remplit ton ministère » (2 Tm 4, 1-5), interpelle tout spécialement les Pasteurs sacrés, appelés à remplir leur rôle propre de « promouvoir la discipline commune à toute l'Eglise (...) d'urger l'observation de toutes les lois ecclésiastiques ». (119)

Ce grave devoir constitue l'instrument nécessaire pour que les riches énergies que contient chaque état de vie ecclésial soient correctement guidées selon les admirables desseins de l'Esprit, et que la communio soit une réalité effective dans le chemin quotidien de la communauté tout entière.

Que la Vierge Marie, Mère de l'Église, à l'intercession de qui nous confions ce document, aide chacun à en comprendre les intentions, et à tout mettre en oeuvre pour sa fidèle application, afin de permettre une meilleure fécondité apostolique.

Les lois particulières et les coutumes en vigueur, qui seraient contraires à ces normes, sont révoquées, comme aussi d'éventuelles facultés concédées ad experimentum par le Saint-Siège ou par toute autre autorité qui lui est subordonnée.

Le Souverain Pontife, en date du 13 août 1997, a approuvé sous forme spécifique la présente Instruction et en a ordonné la promulgation.

Du Vatican, le 15 août 1997, solennité de l'Assomption de la Bienheureuse Vierge Marie.

Congrégation pour le Clergé

Darío Castrillón Hoyos
Pro-Préfet

Crescenzio Sepe
Secrétaire

Conseil Pontifical pour les Laïcs

James Francis Stafford
Président

Stanislaw Rylko
Secrétaire

Congrégation pour la Doctrine de la Foi

Joseph Card. Ratzinger
Préfet

Tarcisio Bertone SDB
Secrétaire

Congrégation pour le Culte divin et la Discipline des sacrements

Jorge Arturo Medina Estévez
Pro-Préfet

Geraldo Majella Agnelo
Secrétaire

Congrégation pour les Evêques

Bernardin Card. Gantin
Préfet

Jorge María Mejía
Secrétaire

Congrégation pour l'Evangélisation des peuples

Jozef Card. Tomko
Préfet

Giuseppe Uhac
Secrétaire

Congrégation pour les Instituts de vie consacrée et les Sociétés de vie apostolique

Eduardo Card. Martínez Somalo
Préfet

Piergiorgio Silvano Nesti CP
Secrétaire

Conseil Pontifical pour l'interprétation des Textes Législatifs

Julián Herranz
Président

Bruno Bertagna
Secrétaire

INDEX

Avant-propos

Principes théologiques

1. Le sacerdoce commun et le sacerdoce ministériel
2. Unité et diversification des tâches ministérielles
3. Caractère irremplaçable du ministère ordonné
4. La collaboration des fidèles non-ordonnés au ministère pastoral

Dispositions pratiques

Conclusion

(1) Cf Concile œcuménique Vatican II, Constitution dogmatique sur l'Église Lumen gentium, n. 33; Décret sur l'apostolat des laïcs Apostolicam actuositatem, n. 24.

(2) Jean-Paul II, Exhort. ap. post-synodale Christifideles laici (30 décembre 1988), n. 2: AAS 81 (1989), p. 396.

(3) Synode des Evêques, IXe Assemblée générale ordinaire, Instrumentum laboris, n. 73.

(4) Cf Jean-Paul II, Exhort. ap. post-synodale Vita consecrata (25 mars 1996), n. 47: AAS 88 (1996), p. 420.

(5) Cf Conc. œcum. Vat. II, Décret Apostolicam actuositatem, n. 5.

(6) Ibid., 6.

(7) Cf ibid.

(Cool Jean-Paul II, Exhort. ap. post-synodale Christifideles laici (30 décembre 1988), n. 23: AAS 81 (1989), p. 429.

(9) Cf Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n. 31; Jean-Paul II, Exhort. ap. post-synodale Christifideles laici, n. 15: l.c., pp. 413-416.

(10) Cf Conc. œcum. Vat. II, Const. pastorale sur l'Eglise dans le monde de ce temps Gaudium et spes, n. 32.

(11) Conc. œcum. Vat. II, Décret Apostolicam actuositatem, n. 24.

(12) Cf Jean-Paul II, Allocution au Symposium sur la « Collaboration des laïcs au ministère pastoral des prêtres » (22 avril 1994), n. 2: L'Osservatore Romano, 23 avril 1994.

(13) Cf C.I.C., cann. 230, § 3; 517, § 2; 861, § 2; 910, § 2; 943; 1112; Jean-Paul II, Exhort. ap. post-synodale Christifideles laici (30 décembre 1988), n. 23 et note 72: AAS 81 (1989), p. 430.

(14) Cf Jean-Paul II, Encycl. Redemptoris missio (7 décembre 1990), n. 37: AAS 83 (1991), pp. 282-286.

(15) Cf C.I.C., can. 392.

(16) Cf surtout Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium; Const. Sacrosanctum Concilium; Décret Presbyterorum Ordinis et Décret Apostolicam actuositatem.

(17) Cf surtout les Exhortations apostoliques post-synodales Christifideles laici et Pastores dabo vobis.

(18) C.I.C., can. 1752.

(19) Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n. 10.

(20) Ibid., n. 32.

(21) Ibid.

(22) Ibid., n. 10.

(23) Cf ibid., n. 4.

(24) Jean-Paul II, Exhort. ap. post-synodale Pastores dabo vobis (25 mars 1992), n. 17: AAS 84 (1992), p. 684.

(25) Cf Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n. 7.

(26) Catéchisme de l'Eglise catholique, n. 1547.

(27) Ibid., n. 1592.

(28) Jean-Paul II, Exhort. ap. post-synodale Pastores dabo vobis (25 mars 1992), n. 74: AAS 84 (1992), p. 788.

(29) Cf Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, nn. 10; 18; 27; 28; Décret sur le ministère et la vie des prêtres Presbyterorum Ordinis, nn. 2; 6; Catéchisme de l'Eglise catholique nn. 1538; 1576.

(30) Cf Jean-Paul II, Exhort. ap. post-synodale Pastores dabo vobis (25 mars 1992), n. 15: AAS 84 (1992), p. 680; Catéchisme de l'Eglise catholique, n. 875.

(31) Cf Jean-Paul II, Exhort. ap. post-synodale Pastores dabo vobis, n. 16: l.c., pp. 681-684; Catéchisme de l'Eglise catholique, n. 1592.

(32) Cf Jean-Paul II, Exhort. ap. post-synodale Pastores dabo vobis, nn. 14-16: l.c., pp. 678-684; Congrégation pour la Doctrine de la Foi, Lettre Sacerdotium ministeriale (6 août 1983), III, 2-3: AAS 75 (1983), pp. 1004-1005.

(33) Cf Eph 2, 20; Ap 21, 14.

(34) Jean-Paul II, Exhort. ap. post-synodale Pastores dabo vobis (25 mars 1992), n. 16: AAS 84 (1992), p. 681.

(35) Catéchisme de l'Eglise catholique, n. 876.

(36) Cf Catéchisme de l'Eglise catholique, n. 1581.

(37) Cf Jean-Paul II, Lettre Novo incipiente (8 avril 1979), n. 3: AAS 71 (1979), p. 397.

(38) Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n. 7.

(39) Jean-Paul II, Exhort. ap. post-synodale Christifideles laici (30 décembre 1988), n. 23: AAS 81 (1989), p. 430.

(40) Cf Congrégation pour la Doctrine de la Foi, Lettre Sacerdotium ministeriale, III, 2: l.c., p. 1004.

(41) Cf Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, Nota explicativa praevia, n. 2.

(42) Jean-Paul II, Exhort. ap. post-synodale Pastores dabo vobis, n. 16: l.c., p. 682.

(43) Conc. œcum. Vat. II, Décret sur la formation des prêtres Optatam totius, n. 2.

(44) Cf Conc. œcum. Vat. II, Décret Apostolicam actuositatem, n. 24.

(45) Jean-Paul II, Exhort. ap. post-synodale Christifideles laici (30 décembre 1988), n. 23: AAS 81 (1989), p. 429.

(46) Cf C.I.C., cann. 208-223.

(47) Cf ibid., cann. 225, § 2; 226; 227; 231, § 2.

(48) Cf C.I.C., cann. 225, § 1; 228, § 2; 229; 231, § 1.

(49) Cf ibid., can. 230, §§ 2-3, dans le cadre de la liturgie; can. 228, § 1, pour d'autres domaines du ministère sacré; ce dernier paragraphe s'étend encore à d'autres sphères, en dehors du ministère des clercs.

(50) Ibid., can. 228, § 1.

(51) Ibid., can. 230, § 3; cf 517, § 2; 776; 861, § 2; 910, § 2; 943; 1112.

(52) Cf Sacrée Congrégation pour le Culte Divin et la Discipline des Sacrements, Instruction Inaestimabile donum (3 avril 1980), introduction: AAS 72 (1980), pp. 331-333.

(53) Cf Jean-Paul II, Allocution au Symposium sur la « Collaboration des fidèles laïcs au Ministère presbytéral » (22 avril 1994), n. 3: l.c.

(54) Ibid.

(55) Cf Jean-Paul II, Allocution au Symposium sur la « Collaboration des fidèles laïcs au Ministère presbytéral » (22 avril 1994), n. 3: l.c.

(56) Cf Commission pontificale pour l'interprétation authentique du Code de Droit Canonique, Réponse (1 juin 1988): AAS 80 (1988) p. 1373.

(57) Cf Conseil pontifical pour l'interprétation des Textes Législatifs, Réponse (11 juillet 1992): AAS 86 (1994) pp. 541-542. Quand on prévoit une cérémonie pour confier à des assistants pastoraux une charge de coopération au ministère des clercs, que l'on évite de faire coïncider ou d'unir ce rite avec une cérémonie d'ordination sacrée, comme aussi de célébrer un rite analogue à celui de l'acolytat ou du lectorat.

(58) Il faut inclure parmi ces exemples toutes les expressions qui en d'autres langues pourraient, de façon analogue ou équivalente, signifier un rôle directif de conduite, ou de vicariété envers cette direction.

(59) Sur les diverses formes de prédication, cf. C.I.C., can. 761; Missale Romanum, Ordo lectionum Missae, Praenotanda: ed. Typica altera, 1981.

(60) Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Dei verbum, n. 24.

(61) Cf C.I.C., can. 756, § 2.

(62) Cf ibid., can. 757.

(63) Cf ibid.

(64) Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n. 35.

(65) Cf C.I.C., cann. 758-759; 785, § 1.

(66) Cf Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n. 25; C.I.C., can. 763.

(67) Cf C.I.C., can. 764.

(68) Conc. œcum. Vat. II, Const. Sacrosanctum Concilium, n. 52; cf C.I.C., can. 767, § 1.

(69) Cf Jean-Paul II, Exhort. ap. Catechesi tradendae (16 octobre 1979), n. 48: AAS 71 (1979), pp. 1277-1340; Commission pontificale pour l'interprétation des Décrets du Concile Vatican II, Réponse (11 janvier 1971): AAS 63 (1971), p. 329; Sacrée Congrégation pour le Culte Divin, Instruction Actio pastoralis (15 mai 1969), n. 6d: AAS 61 (1969), p. 809; Institutio Generalis Missalis Romani (26 mars 1970), nn. 41; 42; 165; Instruction Liturgicae instaurationes (15 septembre 1970), n. 2a: AAS 62 (1970), p. 696; Sacrée Congrégation pour les Sacrements et le Culte Divin, Instruction Inaestimabile donum (3 avril 1980), n. 3: AAS 72 (1980), p. 331.

(70) Commission pontificale pour l'interprétation authentique du Code de Droit Canonique, Réponse (20 juin 1987): AAS 79 (1987), p. 1249.

(71) Cf C.I.C., can. 266, § 1.

(72) Cf C.I.C., can. 6, § 1, 2o.

(73) 7Cf Sacrée Congrégation pour le Culte Divin, Directoire Pueros baptizatos pour les messes d'enfants (1 novembre 1973), n. 48: AAS 66 (1974), p. 44.

(74) En ce qui concerne les prêtres qui auraient obtenu la dispense du célibat, cf Sacrée Congrégation pour la Doctrine de la Foi, Normae De dispensatione a sacerdotali coelibatu ad instantiam partis (14 octobre 1980), « Normae substantiales » art. 5.

(75) Cf C.I.C., can. 517, § 1.

(76) On doit donc éviter d'attribuer le titre de « Guide de la communauté » — ou d'autres expressions analogues — au fidèle non-ordonné ou au groupe de fidèles à qui on confie une participation à l'exercice de la cure pastorale.

(77) Cf C.I.C., can. 519.

(78) Cf ibid., can. 538, §§ 1-2.

(79) Cf ibid., can. 186.

(80) Cf Congrégation pour le Clergé, Directoire pour le ministère et la vie des prêtres Tota Ecclesia (31 janvier 1994), n. 44.

(81) Cf C.I.C., cann. 497-498.

(82) Cf Conc. œcum. Vat. II, Decr. Presbyterorum Ordinis, n. 7.

(83) Cf C.I.C., cann. 514 et 536.

(84) Cf ibid., can. 537.

(85) Cf ibid., can. 512, §§ 1 et 3; Catéchisme de l'Eglise catholique, n. 1650.

(86) Cf C.I.C., can. 536.

(87) Cf ibid., can. 135, § 2.

(88) Cf C.I.C., can. 553, § 1.

(89) Cf Conc. œcum. Vat. II, Const. past. Sacrosanctum Concilium, nn. 26-28; C.I.C., can. 837.

(90) Cf C.I.C., can. 1248, § 2.

(91) Cf ibid., can. 1248, § 2; Sacrée Congrégation des Rites, Instruction Inter oecumenici (26 septembre 1964), n. 37: AAS 66 (1964), p. 885; Sacrée Congrégation pour le Culte Divin, Directoire pour les célébrations dominicales en absence de prêtres Christi Ecclesia (10 juin 1988): Notitiae 263 (1988).

(92) Cf Jean-Paul II, Allocution à des évêques d'Amérique du Nord en visite ad limina (5 juin 1993): AAS 86 (1994), p. 340.

(93) Sacrée Congrégation pour le Culte Divin, Directoire pour les célébrations dominicales en absence de prêtres Christi Ecclesia (10 juin 1988), n. 35: Notitiae 263 (1988); voir aussi C.I.C., can. 1378, § 2, n. 1 et § 3; can. 1384.

(94) Cf C.I.C., can. 1248.

(95) Sacrée Congrégation pour la Discipline des Sacrements, Instruction Immensae caritatis (29 janvier 1973), introduction: AAS 65 (1973), p. 264.

(96) Cf C.I.C., can. 910, § 1; voir aussi Jean-Paul II, Lettre Dominicae Coenae (24 février 1980), n. 11: AAS 72 (1980), p. 142.

(97) Cf C.I.C., can. 910, § 2.

(98) Cf Sacrée Congrégation pour la Discipline des Sacrements, Instruction Immensae caritatis (29 janvier 1973), n. 1: AAS 65 (1973), p. 264; Missale Romanum, Appendix: Ritus ad deputandum ministrum S. Communionis ad actum distribuendae; Pontificale Romanum: De institutione lectorum et acolythorum.

(99) Commission pontificale pour l'interprétation authentique du Code de Droit Canonique, Réponse (1 juin 1988): AAS 80 (1988), p. 1373.

(100) Cf Sacrée Congrégation pour la Discipline des Sacrements, Instruction Immensae caritatis (29 janvier 1973), n. 1: AAS 65 (1973), p. 264; Sacrée Congrégation pour les Sacrements et le Culte Divin, Instruction Inaestimabile donum (3 avril 1980), n. 10: AAS 72 (1980), p. 336.

(101) Le C.I.C., can. 230, § 2 et 3, affirme que les services liturgiques qu'il mentionne ne peuvent être exercés par des fidèles non-ordonnés que « ex temporanea deputatione » ou en suppléance.

(102) Cf Rituale Romanum - Ordo Unctionis infirmorum, Praenotanda, n. 17: Editio typica, 1972.

(103) Cf Jc 5, 14-15; Saint Thomas d'Aquin, In IV Sent., d. 4, q. un.; Conc. œcum. de Florence, bulle Exsultate Deo (DS 1325); Conc. œcum. de Trente, Doctrina de sacramento extremae unctionis, ch. 3 (DS 1697; 1700) et can. 4 de extrema unctione (DS 1719); Catéchisme de l'Eglise catholique, n. 1516.

(104) Cf C.I.C., can. 1003, § 1.

(105) Cf C.I.C., cann. 1379 et 392, § 2.

(106) Cf ibid., can. 1112.

(107) Cf ibid., can. 1111, § 2.

(108) Cf ibid., can. 1112, § 2.

(109) Cf C.I.C., can. 861, § 2; Ordo baptismi parvulorum, Praenotanda generalia, nn. 16-17.

(110) Cf C.I.C., can. 230.

(111) Cf Ordo Exsequiarum, praenotanda, n. 19.

(112) Cf C.I.C., can. 231, § 1.

(113) Il faut exclure les séminaires dits « intégrés ».

(114) Jean-Paul II, Allocution au Symposium sur la « Collaboration des fidèles laïcs au Ministère presbytéral » (22 avril 1994), n. 3: l.c.

(115) Cf ibid., n. 6.

(116) Ibid., n. 2.

(117) Ibid., n. 5.

(118) Jean-Paul II, Exhortation ap. post-synodale Christifideles laici (30 décembre 1988), n. 58: l.c., p. 507.

(119) C.I.C., can. 392.
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Message par Her Lun 9 Mai - 7:06

http://www.zenit.org/french

Le pape à Aquilée : être des chrétiens convaincus au cœur du monde

Benoît XVI rencontre l’Assemblée du deuxième congrès d’Aquilée

ROME, Dimanche 8 mai 2011 (ZENIT.org) - Dans un monde en profond changement, le pape Benoît XVI a invité les fidèles à être des « chrétiens convaincus » et fiers de l'Evangile, capables « d'affronter les nouveaux défis culturels » et de construire « une cité plus humaine » avec les hommes de bonne volonté, croyants et non-croyants.

Au début de son 22e voyage apostolique en Italie, le pape a rencontré, le 7 mai, les membres de l'Assemblée de préparation du deuxième congrès d'Aquilée qui se déroulera en avril 2012 dans cette ville au passé significatif : Aquilée connut son apogée durant l'Antiquité, au point d'être parfois qualifiée de ‘seconde Rome'. Centre militaire, commercial et religieux, elle est à l'origine de l'évangélisation des Eglises du nord-est de l'Italie mais aussi des Eglises de Slovénie et d'Autriche, et de certaines Eglises de la Croatie, de la Bavière et de la Hongrie.

Dans la basilique patriarcale, le pape s'est exprimé en présence de tous les évêques de la région, des conseils pastoraux diocésains et des représentants des Eglises du nord-est, en présence aussi des évêques des Eglises européennes qui sont nées de l'Eglise d'Aquilée.

Dans cette région, « carrefour » entre l'est et l'ouest de l'Europe mais aussi entre le nord et le sud, le pape a invité à une « nouvelle évangélisation ». « Les changements culturels en cours vous demandent d'être des chrétiens convaincus », a-t-il insisté, « capables d'affronter les nouveaux défis culturels ».

« Dans ce contexte, qui est toujours celui que la Providence nous donne, il est nécessaire que les chrétiens, soutenus par une ‘espérance confiante', propagent la beauté de l'avènement de Jésus-Christ, Chemin, Vérité et Vie, à tout homme et à toute femme, dans un rapport franc et sincère avec les non pratiquants, avec les non croyants et avec les croyants d'autres religions ».

Et d'ajouter : « Vous êtes appelés à vivre cette attitude chargée de foi qui est décrite dans la Lettre à Diognète : ne reniez rien de l'Evangile auquel vous croyez, mais soyez au milieu des autres hommes avec sympathie, communiquant dans votre style de vie cet humanisme qui répand ses racines dans le christianisme, cherchant à construire avec tous les hommes de bonne volonté une ‘cité' plus humaine, plus juste et solidaire ».

Les signes d'une région « riche de foi, de culture et d'art » sont encore bien visibles, a estimé le pape en citant notamment un « attachement aux traditions religieuses », « les manifestations de la piété populaire » ou encore « le sens de la solidarité et du volontariat ». « Protégez, renforcez, vivez ce précieux héritage, - a-t-il insisté. Soyez jaloux de ce qui a fait la grandeur et de ce qui fait toujours la grandeur de ces terres ».

Les pauvres, la famille, les jeunes au cœur de l'action pastorale

Dans son discours, Benoît XVI a évoqué la « mission prioritaire » confiée aux prêtres et aux fidèles par le Seigneur : « témoigner de l'amour de Dieu pour l'homme » et ce, en s'engageant auprès « des personnes concrètes », à commencer par « les plus faibles » comme « les pauvres, les personnes âgées, les malades, les personnes handicapées ».

Le pape a aussi évoqué l'importance de prendre soin des familles et des jeunes.

« Ayez soin de mettre au centre de votre attention la famille, berceau de l'amour et de la vie, cellule fondamentale de la société et de la communauté ecclésiale ». Un engagement devenu encore « plus urgent » en raison de la « crise toujours plus importante de la vie conjugale et de la chute de la natalité », a-t-il affirmé.

Le pape a aussi invité à réserver « un soin spécial » aux jeunes qui « regardent l'avenir avec une grande incertitude » mais qui « portent dans le cœur une grand faim et soif de Dieu ».

« La foi chrétienne doit aujourd'hui affronter de nouveaux défis », a-t-il poursuivi : « la recherche souvent exaspérée d'un bien-être économique dans une phase de grave crise économique et financière, le matérialisme pratique, le subjectivisme dominant ».

« Dans la complexité de ces situations, vous êtes appelés à promouvoir le sens chrétien de la vie, à travers l'annonce explicite de l'Evangile », a-t-il conclu. « De la foi vécue avec courage découle, aujourd'hui comme par le passé, une culture féconde faite d'amour de la vie de la conception jusqu'à son terme naturel, de la promotion de la dignité de la personne, de l'exaltation de l'importance de la famille fondée sur le mariage fidèle et ouvert à la vie, de l'engagement pour la justice et la solidarité ».

Marine Soreau
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Message par Her Sam 14 Mai - 7:56

USA : Les évêques rappellent l’importance de la journée des vocations

Ils demandent de soutenir et encourager les vocations

ROME, Vendredi 13 mai 2011 (ZENIT.org) - Les évêques américains invitent les diocèses, les paroisses, les organisations, à participer, ce dimanche, à la 48ème Journée mondiale de prière pour les vocations sur le thème : « Proposer les vocations dans l'Église locale ».

« Nous avons tous la responsabilité d'inviter les jeunes à considérer si Dieu les appelle au sacerdoce ou à la vie consacrée », souligne l'archevêque de Saint-Louis, Mgr Robert Carlson, président du Comité américain pour le clergé, à la lumière du Message de Benoît XVI. « Chaque communauté chrétienne, chaque fidèle, devrait assumer avec conscience l'engagement de promouvoir les vocations », dit-il.

« Il est important d'encourager et de soutenir ceux qui montrent des signes clairs de l'appel à la vie sacerdotale et à la consécration religieuse, afin qu'ils sentent la proximité de toute la communauté au moment où ils prononcent leur 'oui' à Dieu et à l'Église », souligne le pape dans son message.

« Un appel de ce genre est un défi pour nos convictions les plus profondes et conduit à la recherche de la Vérité la plus intime qui est en nous », commente Mgr Carlson. « Tous ceux que Dieu appelle, méritent nos prières et notre encouragement pour répondre généreusement et sans réserve ».

La Conférence des évêques catholiques des États-Unis invitent à se connecter au portail ForYourVocation.org et à utiliser les ressources qui sont fournies.
On y trouve notamment des témoignages vidéos de prêtres, religieux, et parents de membres du clergé ou de personnes consacrées, ainsi que des prières, du matériel pour le discernement, des projets pour les éducateurs et du matériel pour les retraites.
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Apostolat des Laïcs - Vocation et Mission des Laïcs dans l'Eglise et dans le Monde Empty Re: Apostolat des Laïcs - Vocation et Mission des Laïcs dans l'Eglise et dans le Monde

Message par Her Mer 18 Mai - 6:14

http://www.osservatore-vaticano.org/messages-du-pape/leglise-est-essentiellement-mission?utm_source=feedburner&utm_medium=email&utm_campaign=Feed%3A+osservatore-vaticano+%28Osservatore+Vaticano%29

L’Eglise est essentiellement mission
Posté par Vini Ganimara dans Messages du Pape le 05 17th, 2011 | pas de réponse
Le Pape a reçu les participants à l’Assemblée générale des Œuvres pontificales missionnaires… et il leur a tenu un discours assez éloigné de « l’enfouissement » des années 70!
Il a souligné que

« tous doivent s’engager dans la mission ad gentes, évêques, prêtres, religieux, religieuses et laïcs ».

Et il a ajouté qu’

« une attention particulière doit être apportée afin que tous les domaines de la pastorale, de la catéchèse et de la charité soient caractérisés par la dimension missionnaire: l’Eglise est mission… La condition fondamentale pour l’annonce est de se laisser complètement porter par le Christ, Parole de Dieu incarnée. »

Enfin, il a rappelé que

« c’est seulement en étant profondément enracinés dans le Christ et dans sa Parole que l’on est capable de ne pas céder à la tentation de réduire l’évangélisation à un seul projet humain, social, cachant ou taisant la dimension transcendante du salut offert par Dieu en Christ. Cette parole doit être témoignée et proclamée explicitement parce que sans un témoignage cohérent, elle en ressort moins compréhensible et moins crédible ».
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Message par Her Ven 21 Oct - 9:58

http://ZENIT.org/

Le pape invite à coopérer activement à la mission

Journée missionnaire mondiale

ROME, mercredi 19 octobre 2011 (ZENIT.org) – Le pape Benoît XVI invite les baptisés à coopérer activement à la mission.

C’est ce qu’a demandé le pape aux visiteurs de Slovaquie présents place Saint-Pierre à l’audience du mercredi.

A l’occasion de la Journée missionnaire mondiale qui sera célébrée dimanche prochain, le pape a souligné que cette journée « constitue une invitation à renouveler notre coopération active aux œuvres missionnaires de l’Eglise ».
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